«Je n'ai plus de force pour ce combat»
Une Suissesse atteinte d'une maladie rare se bat avec les assurances

Une maladie rare cause à Selina, une Suissesse de 24 ans, non seulement de grandes douleurs et une tonne de paperasse. Devant se battre pour obtenir un soutien, la jeune femme se sent abandonnée par le système de santé. Une situation très pesante.
Publié: 09.08.2022 à 10:53 heures
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Dernière mise à jour: 09.08.2022 à 11:00 heures
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Selina affirme ne pas pouvoir tourner son poignet plus loin que la position visible sur la photo.
Photo: Luisa Ita
Luisa Ita

Selina* (24 ans) est assise à la table de sa salle à manger. Abattue, elle feuillette les rapports médicaux. Bien qu’elle n’en ait pas l’air, la jeune femme est traversée par de fortes douleurs.

Selon les experts de l’Hôpital de l’Île de Berne, elle souffre d’une maladie rare: une légère modification des os de la main, précisément de la première rangée du carpe. Son bras droit est principalement touché mais elle a également des problèmes à gauche.

Une malformation «très rare»

«Mes poignets sont bloqués», témoigne la jeune femme. «Je ne peux pas les tourner vers l’intérieur et j’ai constamment mal. Je ne peux également bouger mes épaules que de manière limitée». Il s’agit probablement d’une infirmité congénitale. «Je suis venue au monde prématurément en tant que jumelle», raconte-t-elle. «Mon frère est malheureusement décédé peu de temps après.»

Selon l’Hôpital de l’Île, une malformation de la main de ce type est «très rare». Elle survient plus souvent chez les filles et est généralement bilatérale. Les symptômes se manifestent principalement par des douleurs chroniques du poignet et des restrictions de mouvement.

Diagnostiquée que tardivement

Enfant déjà, elle avait de grandes douleurs en écrivant. Selina s’en souvient bien: «Je rentrais tous les soirs en pleurant. Et le médecin de famille disait simplement que je faisais semblant parce que je ne voulais pas aller à l’école.»

Mais selon la ligne d’assistance téléphonique pour les maladies rares de l’hôpital pédiatrique universitaire de Zurich, elle n’est pas seule dans ce cas: «Le chemin vers le bon diagnostic d’une maladie rare est souvent long et difficile et dure souvent des années, voire des décennies.» A 16 ans, Selina voulait savoir exactement de quoi elle souffrait. Elle a persévéré jusqu’à ce que les médecins finissent par diagnostiquer chez elle cette malformation.

Pour qu’une maladie soit considérée comme rare, elle doit toucher moins d’une personne sur 2000 habitants, selon le centre d’accueil du Centre des maladies rares de Zurich. La malformation congénitale de la Suissesse entre justement dans cette catégorie.

Personne ne sait ce qui pourrait l’aider

En raison de la rareté de son affection, Selina a des problèmes depuis des années. Comme deux os contigus pourraient être à l’origine des douleurs, une opération pourrait éventuellement aider – mais il n’y a aucune garantie à ce sujet. Sinon, il ne semble pas y avoir de possibilité de traitement.

«Dans 95% des cas, il ne reste que le traitement des symptômes comme unique solution», explique le centre d’information. «La recherche est et reste donc le plus grand espoir pour les personnes concernées. Malheureusement, le développement de nouveaux médicaments contre les maladies rares n’est généralement pas très intéressant pour l’industrie pharmaceutique, compte tenu de la faible demande.»

«C’est désespérant!»

Ce n’est toutefois pas seulement le manque de possibilités de traitement, c’est aussi l’absence de perspectives professionnelles qui fait souffrir la jeune femme. Se lancer dans le monde du travail n’est pas envisageable pour l’instant: «J’aimerais vraiment travailler, même si certaines personnes me disent le contraire. C’est désespérant!»

Même les choses les plus simples, comme par exemple taper sur un clavier, se sécher les cheveux ou se brosser les dents, génèrent de grandes douleurs.

Le combat avec les assurances

Sans physiothérapie régulière, ces douleurs seraient presque insupportables, mais elle doit toujours se battre pour que ces soins soient pris en charge par l’assurance: «Chaque fois, j’ai des discussions avec la caisse maladie CSS.» Elle ne peut guère chiffrer les heures qu’elle consacre à de tels appels téléphoniques et échanges de lettres.

La CSS concernée explique que la jeune femme se situe dans un cadre habituel. «Nous avons jusqu’à présent pris en charge toutes les prestations obligatoires sans discussion. Seules les prestations de physiothérapie seront vraisemblablement prises en charge pour une durée limitée, car nous ne disposons pas des documents détaillés nécessaires à la poursuite du paiement.»

Un chemin semé d’embûches

Pour Selina, la situation actuelle est insupportable. «C’est extrêmement pénible et pesant. Je n’ai plus beaucoup de force pour ce combat permanent.» Depuis des années, elle espère, en vain, une rente d’invalidité: «Comme ma maladie est rare, personne ne sait comment la gérer.» Elle se sent tout simplement abandonnée.

La ligne d’assistance téléphonique pour les maladies rares confirme que ces patients ont souvent un parcours semé d’embûches: «Souvent, la prise en charge des coûts par les assurances et l’AI n’est pas claire, l’intégration scolaire et professionnelle est difficile et les offres de soutien psychosocial font défaut.» A cela s’ajoute le fait que «les médicaments spécifiques ne sont souvent pas reconnus et ne sont pas couverts par l’assurance de base.»

*Nom modifié

(Adaptation par Mathilde Jaccard)


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