L'ambiance au Kolbenacker, dans le quartier de Seebach, au nord de Zurich, était déprimante mercredi soir: plusieurs centaines de personnes à la recherche d'un logement se tiennent devant un immeuble d'habitation rénové. Pourtant, la visite officielle ne fait que commencer. Mais les premiers intéressés sont arrivés avec plus d'une heure d'avance. Au point culminant, la file d'attente est longue de 150 mètres et s'étend sur toute la rue d'accès jusqu'à la prochaine maison d'habitation.
Pourtant, dans le quartier de Seebach, les administrations étaient confrontées il y a quelques années à un tout autre problème. A l'époque, seuls les chômeurs et les bénéficiaires de l'aide sociale se présentaient à ces visites. Les appartements étaient parfois mis au concours à plusieurs reprises. Mais ce n'est plus le cas. Entre-temps, les longues files d'attente à Zurich se sont étendues jusque dans les banlieues de la ville. L'immeuble d'habitation de Kolbenacker est à une demi-heure de la gare centrale en transports publics.
«Comme au concert de Justin Bieber»
Le directeur de l'agence immobilière zurichoise s'attendait à une telle affluence. «Il y a un an déjà, nous cherchions des locataires pour un immeuble d'habitation dans le quartier et l'affluence était énorme. Depuis, la situation s'est encore aggravée», explique-t-il à Blick. Malgré tout, il est impressionné par le spectacle. «On a des files d'attente comme pour un concert de Justin Bieber.» Il souhaite rester anonyme. Son nom et celui de l'entreprise n'ont, en réalité, que peu d'importance. Ils ne sont que la pointe de l'iceberg qu'est la crise du logement à Zurich, Lausanne ou Genève.
Minutes après minutes, d'autres personnes arrivent, aperçoivent la file d'attente et secouent la tête avec résignation. «Je n'ai jamais rien vu de tel», entend-on au cours d'une conversation. Les gens parlent peu. Beaucoup sont perdus dans leurs pensées. Ils se demandent peut-être comment se démarquer parmi les centaines de personnes intéressées. Ou ils calculent mentalement la probabilité d'obtenir l'un des appartements. Ils auraient peut-être plus de chance de gagner au loto.
Des milliers de demandes par mail
Devant l'entrée, le gérant divise les personnes qui attendent en trois files. Selon s'ils sont là pour visiter un appartement d'une pièce, de 2,5 pièces ou de 3,5 pièces. 24 appartements sont à louer. Un appartement d'une pièce de 29,3 mètres carrés coûte 1290 francs. Les 2,5 pièces de 51 mètres carrés sont disponibles pour 1700 francs et les 3,5 pièces de 60,7 mètres carrés pour 2000 francs. Ils sont donc extrêmement bon marché pour la ville de Zurich.
Un jeune homme est refoulé à l'entrée. Il a oublié les documents de candidature avec le formulaire d'inscription, l'extrait du registre des poursuites et la pièce d'identité – bien que l'administration l'ait signalé dans ses annonces. L'administration reçoit des milliers de demandes par e-mail pour le lotissement, explique le chef d'entreprise au malchanceux. Il n'est tout simplement pas possible de prendre en compte les candidatures électroniques.
Les bénéficiaires de l'aide sociale ont aussi leur chance
Des groupes de personnes en attente sont autorisés à entrer dans la maison. Une jeune femme parle avec le directeur, pose plusieurs questions, sourit. En déposant son dossier de candidature, un homme raconte que son salaire est variable et qu'il a plutôt mis la barre très bas lorsqu'il a indiqué son revenu. Rien n'est laissé au hasard. «Certaines personnes nous apportent des cadeaux au bureau, comme des chocolats», raconte plus tard le chef d'entreprise, qui souligne l'importance de l'équité dans la sélection.
L'entreprise possède et gère plus de 1000 logements dans et autour de Zurich. «Nous veillons à la mixité sociale dans nos lotissements», explique le chef. Jeunes, vieux, hommes, femmes, différentes nationalités, familles – le mélange est important. Les bénéficiaires de l'aide sociale ont également leur chance. «A Seebach, nous en prenons en compte un à deux par lotissement», précise-t-il. Au-delà de ce nombre, le risque de perte de loyer serait tout simplement trop élevé.
1488 candidatures déposées
Le salaire est un critère décisif lors de la sélection. «Chez de nombreux candidats, le loyer représente nettement plus d'un tiers du salaire. Cela ne tient pas la route», dit-il. Toutefois, ceux qui gagnent particulièrement bien leur vie ont également moins de chance au Kolbenacker. Il y aurait eu des candidatures avec des salaires mensuels de 14'000 francs par exemple. Mais avec un tel salaire, on a beaucoup plus d'alternatives à Zurich que les bas salaires.
La visite du 24 janvier a été suivie d'une deuxième. Au total, 1488 candidatures ont été déposées. «On perd presque la tête lors de la sélection. A la fin, je me fie à mon instinct», explique le chef d'entreprise. Les 24 appartements ont entre-temps été attribués. Sur certains visages de la file d'attente, la frustration aura fait place à un sourire. Les plus chanceux pourront emménager en mars.