Ils se promènent seuls dans Berne, ils se mêlent à la foule pour faire l'apéro et ils se déplacent sans protection personnelle visible. Le fait que les conseillers fédéraux suisses se déplacent aussi librement en public ne cesse d'étonner à l'étranger. L'image de 2014, lorsque le président de la Confédération de l'époque, Didier Burkhalter, attendait son train seul à la gare, est devenue virale, symbole de la proximité de la politique suisse avec le peuple.
Mais les apparences sont parfois trompeuses. Dans notre pays aussi, on ne peut pas se passer totalement de protection et surtout pas lors d'un déplacement à l'étranger. Pour les événements officiels où un conseiller fédéral est annoncé, des collaborateurs de l'Office fédéral de la police (Fedpol) compétents sont automatiquement présents, a révélé l'année dernière le conseiller fédéral Beat Jans.
Alors comment s'organise la protection d'un conseiller fédéral? L'été dernier, le Fedpol n'a pas voulu se confier à Blick, «pour ne pas influencer l'impact des mesures». Dans tous les cas, toutes les mesures de sécurité ne sont pas visibles. Mais Fedpol propose un rare aperçu du travail des gardes du corps du Conseil fédéral. Dans son dernier rapport annuel, il décrit deux «missions de protection» concrètes.
En réalité, dès qu'un conseiller fédéral se rend à l'étranger, une opération de haute précision commence. Les mesures de sécurité sont mises en place des semaines à l'avance. Rien ne peut se faire sans des agents de police sur place, des gardes du corps suisses et une planification détaillée, mais flexible.
Une promenade: trop dangereux?
L'année dernière, le ministre de la Justice Beat Jans s'est rendu en Tunisie pour une visite professionnelle. Des semaines de préparation avaient précédé le voyage pour mettre en place des mesures de sécurité méticuleuses. Chaque lieu a été passé en revue, chaque étape a été sécurisée, soulevant quelques questions. Par exemple, une promenade dans la médina est-elle trop dangereuse? Le Conseil fédéral peut-il se rendre sans problème dans un lieu en bord de mer?
Rien n'est laissé au hasard, des moyens de communication à la coordination logistique. La situation géopolitique, la criminalité, le risque terroriste: tout cela est pris en compte. «Qu'est-ce qui pourrait inciter une personne à s'en prendre à un ministre suisse?», peut-on lire dans le rapport.
En Tunisie, personne n'a lâché le conseiller fédéral. Beat Jans était accompagné d'une équipe dite de protection rapprochée dont l'attaché de police qui était également à ses côtés. Si la circulation à Tunis et imprévisible et dense, les agents de Fedpol se sont habilement fondus dans l'agitation. «Ils maîtrisent l'art subtil de l'esquive», peut-on lire dans le rapport. La mission de protection a été un succès.
Dans les favelas de Rio de Janeiro
La situation était également délicate à Rio de Janeiro, en automne 2024, lorsque la conseillère fédérale Elisabeth Baume-Schneider a participé dans la métropole brésilienne à la réunion des ministres de la Santé du G20. La procédure était fondamentalement similaire. Des autorisations de la police fédérale brésilienne ont dû être obtenues avant l'intervention.
Mais l'itinéraire depuis l'aéroport traversait des favelas, des zones interdites dans lesquelles même la police brésilienne ose à peine entrer. «Les échanges de tirs entre gangs rivaux sont monnaie courante», peut-on lire dans le rapport. Les autorités brésiliennes ont pris «des mesures appropriées conformément aux recommandations de l’équipe de protection personnelle suisse».
Une manifestation spontanée a eu lieu en marge du sommet. Elle s'est déroulée de manière pacifique, mais les gardes du corps sont restés vigilants. «Dans mon travail, le moindre détail fait souvent la différence. Dans une ville comme Rio de Janeiro, c’est précisément là que réside la frontière entre sécurité et risque», a témoigné un responsable de l'équipe de protection.
Une fois élus, les membres du Conseil fédéral sont considérés comme des personnes présentant un intérêt pour la sécurité nationale. Leur protection peut paraître discrète, mais elle demande un travail considérable.