«Humiliant et inhumain»
Une migrante enceinte a dû allaiter son bébé alors qu'elle était menottée

Familles séparées, entraves et violences: la Commission fédérale contre la torture critique les excès commis lors des renvois forcés de migrants.
Publié: 11.09.2022 à 22:50 heures
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Prison de renvoi à l'aéroport de Zurich. Des incidents dégradants ont eu lieu lors de renvois forcés de demandeurs d'asile déboutés.
Photo: Keystone
Fabian Eberhard

La Commission nationale de prévention de la torture (CNPT) est formelle : les scènes qui se sont déroulées lors d'une expulsion forcée à Genève sont «dégradantes et inhumaines».

Selon ce rapport, des policiers ont attaché une femme enceinte de quatre mois devant ses enfants et l'ont portée «de manière inadéquate» dans les escaliers, alors qu'elle se plaignait à plusieurs reprises de douleurs au ventre. En outre, la mère a dû allaiter son bébé alors qu'elle était menottée.

En 2021, les membres de la commission anti-torture ont assisté à 33 renvois forcés. Ils en dressent maintenant le bilan. Selon leur rapport, 130 personnes – dont six familles avec quinze enfants – ont été emmenées de force dans leur pays d'origine par des vols spéciaux: le dernier recours lorsque les demandeurs d'asile déboutés s'opposent à leur rapatriement.

Dans l'ensemble, le traitement des réfugiés a été professionnel et respectueux, selon la commission. Mais son procès-verbal rend public plusieurs incidents dégradants.

Menottes utilisées de manière abusive

Dans le canton de Vaud, des unités spéciales cagoulées ont menotté et entravé une personne sur le chemin de l'aéroport, bien qu'elle se soit montrée coopérative. Lors d'autres expulsions, les agents ont également eu recours à des menottes métalliques et des ceintures.

«La commission rappelle que les entraves complètes ne doivent être utilisées qu'en cas de rébellion physiquement manifeste et lorsque les personnes à renvoyer mettent en danger leur vie ou celle d'autrui», écrivent les observateurs.

Un casque sur la tête pendant quatre heures

Dans le canton de Schwytz, des policiers ont mis un casque sur la tête d'un homme et lui ont passé les menottes – soi-disant en raison d'un risque d'automutilation. Mais selon la commission, la personne concernée s'est montrée coopérative. Au cours du trajet vers l'aéroport qui a duré plus de quatre heures, les agents ont interdit à l'homme de descendre brièvement du véhicule, alors qu'il souffrait d'une thrombose veineuse des jambes et devait prendre des médicaments anticoagulants.

Dans leur prise de position, les autorités cantonales se sont justifiées en disant qu'elles accordaient une grande priorité à la sécurité de leurs forces d'intervention.

Isolé de sa famille pendant un mois avant son expulsion

La commission anti-torture critique également les séparations familiales. Dans un cas, un père a été isolé de sa famille avant son expulsion forcée – pendant un mois entier. Les observateurs demandent au Département fédéral de justice et police (DFJP) ainsi qu'à la Conférence cantonale des directrices et directeurs des départements de justice et police (CCDJP) de «considérer en tout temps l'intérêt supérieur de l'enfant comme une priorité» et ont retenu que les enfants ne peuvent être séparés de l'un de leurs parents que dans des cas exceptionnels.

La CNPT a également observé dix-sept tests Covid effectués sous la contrainte dans les aéroports. Lors d'un de ces tests, une personne a été attachée avec une ceinture, placée au sol par cinq personnes et maintenue par la tête pour le prélèvement nasal.

La base juridique correspondante à ces tests Covid – une adaptation de la loi sur les étrangers – est en vigueur depuis début octobre 2021.


(Adaptation par Quentin Durig)

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