L'année dernière, les opposants à la nouvelle pyramide alimentaire avaient tiré à boulet rouge sur la Confédération. Ligués autour de Mike Egger, conseiller national de l'Union démocratique du centre (UDC) et boucher, ils estimaient que les nouvelles recommandations alimentaires dépassaient largement le cadre acceptable, surtout en matière de consommation de viande.
La gauche ne s'était pas non plus montrée emballée, même si les raisons étaient différentes. Pour elle, la Confédération s'était montrée trop tendre et avait négligé la question du climat. Des critiques auxquelles s'étaient jointes plusieurs associations environnementales.
Mais la donne semble désormais avoir changé! En effet, les deux géants de la défense de l'environnement Greenpeace et WWF ont fait calculer l'impact réel des recommandations nutritionnelles de la Confédération. Et à la surprise générale, le scepticisme initial laisse place à un soutien prudent.
Des objectifs climatiques stricts
Le Conseil fédéral s'est fixé pour objectif de réduire l'empreinte carbone de l'alimentation de 25% d'ici 2030 par rapport à 2020 et d'au moins deux tiers d'ici 2050, rappellent lundi les deux organisations écologistes. En septembre 2024, la Confédération avait publié de nouvelles recommandations nutritionnelles tenant compte de critères liés non seulement à la santé mais aussi à l'environnement.
Comme le montrent les calculs de Greenpeace et du WWF, les nouvelles recommandations alimentaires peuvent tout à fait aider à atteindre cet objectif. Et ce, alors que l'Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OFAS) n'a que peu modifié les quantités indiquées en 2014, notamment en matière de consommation de viande, se contentant de mettre l'accent sur les sources alternatives de protéines, comme les légumineuses.
Plus strict que le régime écologique international
Les deux ONG estiment désormais que les conseils de la Confédération, s'ils sont suivis à la lettre, sont même plus le «Planetary Health Diet », un régime élaboré par une équipe internationale de scientifiques pour permettre une alimentation saine et respectueuse de l'environnement dans le monde.
Une interprétation stricte des recommandations de la Confédération laisse en effet entendre que la meilleure alimentation qui soit comprend exclusivement des produits végétariens, sans viande ni poisson. Si les œufs et les produits laitiers restent recommandés, le lait de vache se voit lui remplacé par du lait de soja enrichi en calcium. «Cette déclinaison des recommandations nutritionnelles peut conduire à une réduction considérable de la pollution climatique et environnementale», explique Barbara Wegmann, 41 ans, experte en consommation chez Greenpeace Suisse. La Suisse serait-elle soudainement devenue un précurseur en matière de climat pour les défenseurs de l'environnement?
En y regardant de plus près, on constate que c'est loin d'être le cas. En effet, Greenpeace et le WWF constatent que la pyramide alimentaire de la Confédération propose un éventail (trop) large des modes d'alimentation possibles. Ainsi, elle permet aujourd'hui encore une alimentation qui émet plus du double de gaz à effet de serre par personne que l'objectif visé.
Des nouvelles conditions-cadres nécessaires
«Une recommandation explicite appelant à consommer des aliments moins nocifs pour l'environnement aurait été souhaitable», explique Barbara Wegmann. Selon le rapport des deux ONG, le comportement de consommation contribue pour environ un tiers aux possibilités de réduction des émissions de gaz à effet de serre dans l'alimentation.
Greenpeace et le WWF affirment toutefois qu'une amélioration de la pyramide ne permettrait pas d'atteindre l'objectif dans son intégralité. En effet, la consommation réelle des Suisses est de toute façon nettement plus nocive pour le climat que les recommandations les plus souples de la Confédération.
Outre les consommateurs, ce serait surtout à la politique et au secteur alimentaire d'agir, estiment les deux ONG. «Le plus important est de supprimer les mauvaises incitations que la politique, le commerce et la restauration mettent actuellement en place et qui vont à l'encontre de leurs propres objectifs climatiques», explique Barbara Wegmann. L'experte de Greenpeace fait ici référence à la promotion de la viande suisse par la Confédération, qui se chiffre en millions, ou à la politique en matière de prix des produits d'origine animale. Autant de questions défendues stricto sensu par les opposants à la nouvelle pyramide alimentaire.