Michelle* affirme avoir toujours souhaité avoir des enfants. Mais depuis que cette ancienne enseignante du canton de Thurgovie s'est engagée dans la grève du climat, elle a pris une décision radicale: ne pas en avoir.
Aujourd'hui, à peine trois ans plus tard, des incendies dévastateurs font rage dans de vastes régions du sud de l'Europe, la chaleur et la sécheresse affectent également la Suisse. Dans les pays en développement, de plus en plus de personnes doivent quitter leur foyer en raison des changements climatiques et des catastrophes naturelles.
Phénomènes météorologiques extrêmes de plus en plus fréquents
Les prévisions ne sont pas plus joyeuses: les phénomènes météorologiques extrêmes et leurs conséquences deviennent plus fréquents et plus violents à chaque dixième de degré en plus sur l'ensemble de la planète, les chercheurs sont unanimes sur ce point.
Cela fait particulièrement peur à la jeune génération. Une étude internationale datant de 2021 le montre: plus de la moitié des jeunes de 16 à 25 ans sont très préoccupés par le changement climatique, 65% se sentent même abandonnés par les gouvernements dans la lutte contre ce phénomène. Certains à tel point qu'ils se sentent le devoir de prendre des décisions lourdes de conséquences pour leur propre vie.
Une décision difficile à prendre
C'est le cas de Michelle. Après avoir lu les rapports du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), la jeune femme a dit adieu à son désir d'enfant. «Si ces prévisions me font déjà craindre l'avenir à ce point, il y a de quoi me poser des questions. Comment pourrais-je prendre la responsabilité de mettre au monde des enfants qui devront ensuite porter le poids de la catastrophe climatique à venir?»
La décision n'a pas été facile à prendre pour elle. «C'était très intense émotionnellement, non seulement pour moi, mais aussi pour ma famille, en particulier pour mon père.» C'est surtout le sentiment d'impuissance qui a donné du fil à retordre à ce dernier. «Si des difficultés financières avaient été la raison de ma décision de ne pas avoir d'enfants, il aurait pu m'aider et résoudre le problème. Mais il ne peut rien faire seul contre la crise climatique. Cela l'a rendu très triste.»
Les efforts de la politique sont-ils suffisants?
Pour elle aussi, cette décision est douloureuse, déplore Michelle. Elle reconnait que la parentalité est un processus très beau et passionnant, surtout dans l'accompagnement des enfants dans leur croissance. «En fait, j'aimerais bien vivre ça. Mais je ne crois tout simplement pas que nous puissions penser de manière aussi individualiste alors que nous avons tant de problèmes à résoudre.»
Les inquiétudes de Michelle ne sont pas infondées. Les efforts actuels des gouvernements ne suffisent pas à limiter le réchauffement climatique à moins de 1,5 degré par rapport à l'ère préindustrielle.
Une étude prévoit deux fois plus d'incendies de forêt
Et cela a des conséquences: selon l'Organisation météorologique mondiale, les vagues de chaleur comme celle que nous vivons actuellement seront la norme en Europe à l'avenir. L'étude réalisée en 2021 par une équipe de climatologues internationaux a également montré à quel point la dernière génération sera plus touchée par les phénomènes météorologiques extrêmes que la génération des baby-boomers, par exemple.
Selon cette étude, un enfant né en 2020 connaîtra au cours de sa vie en moyenne deux fois plus de feux de forêt, jusqu'à trois fois plus de sécheresses, d'inondations et de mauvaises récoltes, et sept fois plus de vagues de chaleur que ses grands-parents.
Le climatologue belge Wim Thiery fait partie des auteurs de l'étude. Les résultats ne l'ont, certes, pas beaucoup surpris dans le cadre de son activité de climatologue: «Nous savons que les conditions météorologiques deviennent plus extrêmes avec l'augmentation du réchauffement climatique.» Mais en tant qu'être humain et père de trois jeunes fils, ces données ont fait l'effet d'un «coup de poing dans l'estomac», raconte-t-il.
L'espoir demeure
L'étude est donc un appel urgent à l'action. Le scientifique estime en effet qu'il y a encore de l'espoir: «Si nous parvenons à limiter le réchauffement à 1,5 degré, nous pourrons éviter les pires scénarios.»
Si cet objectif climatique était atteint, la fréquence des vagues de chaleur pourrait par exemple être réduite de 40%. «Mais pour cela, nous devons abandonner le plus rapidement possible l'utilisation des combustibles fossiles, poursuit Wim Thierry. Les solutions sont là, ce qui manque, c'est une politique climatique ambitieuse.»
Michelle aussi souhaite «une politique qui préserve nos besoins vitaux.» Elle n'est toutefois pas très confiante. Les décideurs reconnaissent le danger de la crise climatique, «mais ils voient dans le changement nécessaire une menace pour leur profit et le font passer sciemment avant nos vies.»
Il faut «agir de manière radicale»
Ce point de vue et sa décision de renoncer à avoir des enfants pour ne pas avoir à les exposer aux conséquences du réchauffement climatique témoignent du désespoir d'une jeune génération qui se sent impuissante et incertaine face au futur de la planète - Michelle le reconnaît elle-même.
«Mais je suis convaincue que pour provoquer un changement de société, il faut des gens qui agissent radicalement.»
*Nom connu de la rédaction
(Adaptation par Lliana Doudot)