C'est un début étrange pour une campagne qui l'est tout autant. Après l'annonce de la démission de Viola Amherd du Conseil fédéral, les favoris se sont désistés un par un. Le président démissionnaire du parti Gerhard Pfister, la Fribourgeoise Isabelle Chassot et le Grison Martin Candinas: tous ont opposé un refus cinglant.
Il a donc fallu attendre que la Saint-Gallois Markus Ritter se lance, pour que Le Centre se trouve enfin un candidat. Et quelques heures avant l'expiration du délai de dépôt des candidatures, le Zougois Martin Pfister a décidé in extremis de sauter le pas, épargnant ainsi à son parti l'embarras d'un ticket unique.
Alors que Markus Ritter a invité les médias à Saint-Gall pour leur faire part de sa candidature, Martin Pfister s'est contenté d'un maigre communiqué annonçant qu'une conférence de presse serait organisée dans les prochains jours. «Dans l'intervalle, Martin Pfister ne répondra à aucune autre demande des médias», précise la missive.
Markus Ritter enchaîne les interviews
Il en va tout autrement pour Markus Ritter. En effet, le Saint-Gallois enchaîne les interviews. Et on sent bien qu'il ne le fait pas toujours de gaité de cœur. Lors de sa conférence de presse, il a certes souligné l'importance de la répartition hommes-femmes au sein du Conseil fédéral. Mais les femmes du Centre ne semblent pas emballées à l'idée de diriger le Département de la défense, de la protection de la population et des sports (DDPS).
Markus Ritter a déclaré que c'était un département «difficile pour elles.» Une remarque qui lui a valu une pluie de critiques de la gauche et des femmes du Centre, comme le rapporte «20 minuten».
Le français approximatif du candidat au Conseil fédéral a également suscité des critiques en Suisse romande. Markus Ritter a reconnu auprès de «20 Minuten» que son niveau de français à l'oral n'était pas aussi bon que sa compréhension. Mais il l'assure: il souhaite devenir conseiller fédéral et non interprète. «Pour des négociations exigeantes, je pense qu'un traducteur sera de toute façon important et nécessaire.» Il explique néanmoins s'être remis au français afin d'améliorer son niveau.
Les citadins, des fainéants?
Dans une autre interview, parue mercredi dans le «Tages-Anzeiger«, Markus Ritter s'est fendue d'une déclaration sur la charge de travail, ce qui a aussi suscité bon nombre de critiques. «Il manque des candidatures issues de zones urbaines. Il manque des personnes prêtes à assumer cette charge de travail.»
Il souligne que l’équilibre entre vie professionnelle et personnelle est vécu différemment en milieu rural. Pour autant, il ne veut pas dire que les citadins sont paresseux: «Ce serait totalement faux! Ils travaillent aussi beaucoup. Mais peut-être ont-ils une perception différente. Peut-être considèrent-ils que 45 ou 50 heures de travail suffisent.»
Le Saint-Gallois estime que l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée est vécu différemment à la campagne. Mais pense-t-il pour autant que les citadins sont parreseux? «Ce serait totalement faux de dire ça! Ils en font aussi beaucoup, mais ils ont peut-être une compréhension un peu différente», se défend-il. Et de conclure: «Peut-être pensent-ils que 45 heures ou 50 heures de travail suffisent.»
Markus Ritter assure qu'il compte lui-même même travailler jusqu'à 80 heures par semaines s'il est élu au Conseil fédéral. Des déclarations qui ne devraient pas être bien accueillies par les citadins du Parlement, mais qui ne devraient guère déranger les parlementaires des régions plus rurales. Faut-il y voir un calcul du Saint-Gallois?
«Pfister et son parti ont raté leur départ»
L'analyste politique Mark Balsiger a lui aussi été frappé par les propos de Markus Ritter lors de ses différentes interviews. Mais il ne pense pas que cela puisse lui nuire. «Ses déclarations ne se prêtent pas au scandale, d'autant plus qu'il les a tout de suite relativisées.» Le Saint-Gallois se présente comme quelqu'un de «direct et engageant». «Mais c'est aussi un homme politique qui ne pèse pas suffisamment chaque mot.»
Markus Ritter a bien préparé sa candidature, estime Mark Balsiger. Il dispose d'un excellent réseau au Palais fédéral en tant que président de l'Union suisse des paysans et conseiller national de longue date. En revanche, l'assise de Martin Pfister est surtout cantonale. Le conseiller d'Etat zougois est donc obligé de créer des contacts au sein de l'Assemblé fédérale s'il entend atteindre son but.
Mais Mark Balsiger est catégorique: «Martin Pfister et son parti ont raté leur départ.» L'expert estime que le retard pris jusqu'à présent sera difficile à rattraper, le délai jusqu'à l'élection étant relativement court. Martin Pfister se présentera pour la première fois devant la presse jeudi à 10 heures, à Baar, dans le canton de Zoug.