La polémique enfle. Ce mercredi en fin de matinée, Fabien Fivaz, conseiller national Vert neuchâtelois, ouvrait le bal sur Twitter: «*Regrettable*, c’est le mot choisi par le Centre patronal pour décrire les congés que peuvent prendre les parents d’un enfant gravement malade depuis le 1er janvier (en réalité depuis le 1er juillet, a-t-il par la suite corrigé, ndlr.), dans le cadre de la nouvelle législation fédérale sur les proches aidants… Je suis sans voix». Il a depuis été retweeté par deux autres parlementaires fédérales de gauche: la Verte vaudoise Léonore Porchet et la Genevoise Stefanie Prezioso, d’Ensemble à Gauche, «sidérée». «Au Centre patronal, on pense comme des bureaucrates, en dehors de toute situation réelle et humaine», surenchérit Yannis Papadaniel, membre du comité d'Espace proches à lausanne.
Ces quatre font référence à la dernière publication de l'organisation de défense des employeurs parue un peu plus tôt. Son pitch: «Les difficultés que les travailleurs peuvent rencontrer dans leur vie privée amènent le législateur à prévoir de nouveaux congés, amorce Sophie Paschoud, autrice du texte. Cette évolution est regrettable, tant sous l’angle du partenariat social que de la responsabilité individuelle». En clair, le Parlement se mêle de ce qui ne le regarde pas lorsqu’il légifère et donne davantage de congés aux employées et employés. Congé maternité, congé paternité, congés pour les proches aidants: «Une évolution problématique», juge la juriste de l’organisation. Pour elle, trop, c’est trop. Et ne lui parlez pas du congé parental, voulu par la gauche.
«J’hallucinais»
«Quand j’ai lu cette lettre hebdomadaire, j’hallucinais complètement, raconte Fabien Fivaz. Le choix des mots me choque: comment peut-on trouver «regrettable» le fait que des parents d’un enfant gravement malade puissent se répartir 14 semaines de congé sur 18 mois, qui plus est payés à 80% par l’assurance perte de gain?! C’est une avancée des droits sociaux importante pour des gens dans une situation difficile. Tout le monde n’a pas la chance d’avoir un employeur compréhensif.»
Avant l’entrée en vigueur de cette loi, les parents devaient — selon leur situation professionnelle — s’arranger avec les grands-parents ou les voisins pour emmener leur progéniture à l’hôpital ou réduire leur temps de travail, rappelle en substance le Chaux-de-Fonnier. «Une personne dont l’enfant est gravement malade a envie de pouvoir en être proche», souligne-t-il.
Un précédent en avril 2020
Contacté par Blick, le Centre patronal «remet l'église au milieu du village». «Nous ne regrettons évidemment pas que des parents puissent avoir congé pour s'occuper d'un enfant gravement malade, rectifie Patrick Mock, responsable de la politique marché du travail. Ce raccourci est un peu facile. Ce que nous regrettons, c'est l'accumulation de ces congés inscrits dans de nouvelles lois qui renchérissent le coût du travail, posent des problèmes aux employeurs et nuisent à la compétitivité économique de la Suisse.» Pour lui, ces dispositions devraient être négociées entre les syndicats et les patrons, qui pourraient ainsi obtenir des compensations. «Là, c'est unilatéral et les employeurs sont obligés de passer à la caisse. A l'avenir, il faudra arrêter d'en rajouter.»
Le Centre patronal est l’une des cibles préférées de Fabien Fivaz, qui a déposé en mars une initiative parlementaire demandant un droit à la réduction du temps de travail pour les parents. En avril 2020, il avait taclé — déjà sur Twitter — l’entité parce qu’elle invitait la population, en plein semi-confinement, à «éviter de s’habituer» à ce retour à un air dépollué et à une vie moins consumériste, comme le rapportait «Le Temps». La «romance» avait fait du bruit jusqu'en France: à tel point que le très sérieux «Monde diplomatique», mensuel de gauche, s'était moqué du Centre patronal dans ses colonnes. Fabien Fivaz sait désormais avec qui il ne partira pas en vacances en criant «vive les congés payés».