Sergio Ermotti a gagné 14,4 millions de francs l'année dernière – pour neuf mois à la tête d'UBS. Ajoutez à cela les 140 millions versés à l'ensemble de la direction du groupe de la seule grande banque restante du pays, soit 33 millions de plus qu'en 2022.
Ces rémunérations exorbitantes suscitent de vives réactions dans le monde politique. Même Thierry Burkart s'en est violemment pris à Sergio Ermotti et Cie: «Les excès présomptueux de certains top-managers en matière de bonus détruisent la confiance de la population dans l'économie dans son ensemble», a écrit le président du PLR, sur X.
En 2023, l'action UBS a connu une hausse fulgurante
L'augmentation des salaires n'est toutefois qu'une partie de la manne financière dont ont bénéficié les responsables de l'UBS au cours des derniers mois. Le fait que l'action UBS ait augmenté de plus de 50% en bourse en l'espace d'un an a été au moins aussi important pour l'accumulation de la fortune des top managers.
Selon le rapport de gestion publié cette semaine, les 16 membres de la direction du groupe et les douze membres du conseil d'administration de l'UBS détenaient 15,3 millions d'actions de leur employeur fin 2023. Cela correspondait à une valeur fiscale de 399 millions de francs à la date de référence.
Des bénéfices grâce au soutien de l'Etat
Si le cours de l'action UBS était resté stable en 2023, les 15,3 millions de titres n'auraient eu «que» 263 millions de francs de valeur. Le rallye des cours qui a touché les titres de l'UBS dans les mois qui ont suivi le rachat de Credit Suisse a donc permis aux banquiers les plus haut placés de réaliser un bénéfice comptable de 136 millions de francs.
Bien mérité, diront certains – quand on a du succès, on doit être récompensé. Le problème de ce point de vue? Les gigantesques bénéfices comptables dont ont profité les dirigeants de l'UBS auraient été impensables sans l'intégration de Credit Suisse – mais celle-ci n'a pu être réalisée que grâce au soutien de l'Etat.
Pour rendre la reprise possible, la Confédération – avec à sa tête la ministre des Finances Karin Keller-Sutter – a pris des risques à hauteur de 109 milliards de francs. La Banque nationale a apporté 100 milliards supplémentaires pour des aides en liquidités non garanties.
«Madame Keller-Sutter a fait un grand cadeau à l'UBS»
Au final, l'UBS a repris Credit Suisse pour trois milliards de francs, alors que l'entreprise valait encore 35 milliards peu de temps auparavant. Le très respecté banquier Josef Ackermann avait alors déclaré dans une interview pour Blick: «Madame Keller-Sutter a fait un grand cadeau à l'UBS.»
La grande banque se défend de cette lecture des événements, la Confédération également. Tous deux soulignent les risques et la responsabilité que l'UBS a assumé en les reprenant.
C'est un argument compréhensible. Mais une chose est sûre: au moins pour les dirigeants de l'UBS, le rachat de Credit Suisse a été plus que profitable.