Les personnages de «Sex and the City» estimaient la quête de l'amour suffisamment compliquée pour y consacrer 94 épisodes complets. Ça fait beaucoup. Et encore, les intrépides new-yorkaises des 90's n'avaient jamais scrollé sur Tinder, jamais entendu le terme ghosting ni subi les affres du catfishing ou du love bombing. Aurait-on eu droit au double d'épisodes si la série avait été tournée en 2025?
Peut-être bien, puisque la recherche d'une relation stable est aujourd'hui complexifiée par une abondance d'outils, une infinitude de profils qui patientent au bout de nos doigts. Sandy Kaufmann, coach en amour, connaît bien ce phénomène. Installée à Zurich, elle vient de publier «S'ouvrir à l'amour» aux éditions françaises Eyrolles, dans le but d'aider les célibataires malheureux à forger des relations épanouissantes... même à l'ère de Bumble.
Un ras-le-bol des apps de rencontre
«Les gens n'en peuvent plus des rencontres sur les applications, constate-t-elle. Il faut dire que les médias exhibent une image souvent négative de ces outils, qui impliquent effectivement toute une série de difficultés bien spécifiques, comme la nécessité de faire un tri dans les profils qu'on découvre, le risque accru d'être confronté au rejet, le peu d'attention que certaines personnes portent aux discussions en ligne...».
Malgré tout, la coach estime que ces plateformes représentent des outils incontournables: selon l'OFS, elles ont permis près de 30% des rencontres amoureuses stables (ayant duré au minimum 5 ans) en 2023. Mais il ne suffit évidemment pas de les installer sur son téléphone pour vivre un fulgurant coup de foudre virtuel. Voici 3 stratégies importantes que notre intervenante détaille auprès de toutes et tous ses «coachés».
Avoir la bonne approche sur les applications
Le risque d'être «ghosté» sur Tinder existera malheureusement toujours. Or, Sandy Kaufmann conseille d'adopter un état d'esprit légèrement détaché, afin de minimiser les déceptions: «Il faut clarifier au maximum ce qu'on cherche, les valeurs qu'on souhaite retrouver chez l'autre et le temps qu'on est prêt à passer sur les applications, tout en restant très réaliste quant aux biais inévitables qu'impliquent ces plateformes: par exemple, il sera forcément nécessaire de faire un tri, on sera probablement confronté à un manque d'attention de la part de certains individus... Je reçois d'ailleurs beaucoup de personnes qui se rendent compte qu'elles-mêmes ont ghosté des gens par simple inattention, sans le faire exprès».
Cela permet, entre autres, de diminuer les enjeux et, par conséquent, la souffrance. Pour la coach en amour, une application ne permet jamais une véritable rencontre: «Celle-ci n'a lieu qu'au moment de se retrouver face à la personne, estime-t-elle. Il faut absolument voir ces outils virtuels comme de simples annuaires et non pas comme de vraies rencontres. L'effort le plus important est celui qu'on fournit en dehors de notre smartphone.»
Prendre conscience de ses insécurités
Sur Tinder ou «en vrai», notre attitude concernant les relations amoureuses est d'une importance capitale. «La rencontre en elle-même sont susceptibles de réveiller nos insécurités les plus inconscientes, insiste la coach. À chaque étape, on peut redécouvrir des peurs ou des angoisses, liées à ce qui a pu nous blesser émotionnellement dans le passé.» Ces peurs sont souvent caractérisées par une insécurité émotionnelle, le sentiment de ne jamais réussir à construire une relation, la répétition du même schéma, une dépendance affective ou encore une tendance à être attiré par des personnes indisponibles.
Et lorsque ces anciennes douleurs remontent à la surface, elles se permettent d'influencer notre comportement de manière insidieuse et contre-productive: «On se demande alors pourquoi on n'arrive pas à être nous-même avec la personne, pourquoi on a constamment peur... Ce sont des automatismes de survie! Par exemple, une personne terrorisée à l'idée que l'autre ne l'apprécie pas ou la trompe, que la relation se brise ou ne dure pas, risque d'auto-saboter ses premiers rendez-vous en laissant son anxiété prendre le dessus».
En d'autres termes, elle risque de marcher sur des œufs sans oser révéler sa véritable personnalité. Ou, à l'inverse, de tout mettre en œuvre pour «convaincre» l'autre, qui risque alors de faire simplement marche arrière. «Cela vient de ce qu'on a appris de l'amour durant l'enfance, de nos blessures passées, et influence à la fois notre comportement et nos choix de partenaires», conclut la coach.
Calmer son système nerveux
Mais suffit-il vraiment de prendre conscience de ces insécurités pour se libérer de leur emprise? S'il s'agit d'une étape essentielle, Sandy Kaufmann estime que cela ne suffit pas: «Nos modèles d'attachement sont inscrits dans notre système nerveux, rappelle-t-elle. Beaucoup de personnes commencent un travail psychologique pour comprendre leurs blessures passées, mais cela signifie qu'elles tentent de régler 'avec la tête' un problème qui est logé dans le corps.»
Pour cela, il convient de calmer le système nerveux, antre de toutes ces peurs stockées, pour atteindre un état physiologique de sécurité. Comment le reconnaître? «On l'a déjà tous ressenti un jour, avec certains groupes d'amis ou avec notre famille proche, explique la coach. C'est cet état d'aisance et de confort qui nous permet de créer du lien, de réellement s'ouvrir à l'autre, sans se sentir obligé de porter un masque.»
Peut-être en faites-vous l'expérience avec vos plus anciens amis d'enfance ou avec vos frères et sœurs. C'est le moment où on ne se pose plus aucune question avant d'ouvrir la bouche: on est simplement présent. Et c'est là qu'on brille le plus fort. «Il faut un certain niveau de sécurité pour oser s'ouvrir, et cela nécessite aussi d'apaiser le corps», poursuit notre intervenante, qui conseille plusieurs exercices. On peut notamment pratiquer le «soupir physiologique», consistant à inhaler une fois par le nez, puis une seconde fois pour remplir les poumons à fond, avant d'expirer lentement par la bouche.
«Beaucoup de personnes confondent la peur et l'amour, conclut Sandy Kaufmann. Mais lorsqu'on se focalise sur la crainte de perdre l'autre, c'est l'angoisse qui prend le dessus. L'amour requiert un minimum de sécurité avec et en soi-même. Ce n'est qu'alors qu'on peut commencer à grandir avec l'autre.»