«Je ne peux plus vivre avec ce fardeau»
Une retraitée victime d'une escroquerie se bat contre Swisscom

Il y a six ans, Ruth Altun a été victime d'une escroquerie bien rôdée. Depuis, Swisscom lui réclame de l'argent et elle se bat avec des créances impayées d'un bureau de recouvrement.
Publié: 04.07.2022 à 08:10 heures
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Dernière mise à jour: 04.07.2022 à 09:54 heures
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Ruth Altun (64 ans) a été victime d'une escroquerie audacieuse.
Photo: Stefan Bohrer
Sven Ziegler

Ruth Altun, 64 ans, secoue la tête avec incrédulité. Elle fixe la pile de papiers devant elle. Des factures, des rappels, des lettres de l'office des poursuites et d'un bureau de recouvrement s'empilent dans son appartement bâlois. «Chaque jour, je reçois de plus en plus de courrier, mais je n'y peux rien», désespère Ruth Altun.

Il faut dire que la Bâloise a été victime d'une escroquerie audacieuse. Les documents judiciaires et les lettres qui se sont accumulés chez elle depuis 2016 en sont le résultat. A l'époque, la retraitée était en pleine séparation de son ex-mari. Elle cherchait alors du réconfort et du soutien sur Internet.

D'abord les paquets, ensuite la facture

Sur une plateforme de rencontre, elle fait la connaissance d'«Allen». Il se montre ouvert, lui donne des encouragements, lui fait entendre ce qu'elle veut entendre pour sortir de sa mauvaise passe. Les deux se contactent plusieurs fois via Skype. «J'étais complètement naïve, je me suis complètement donnée à lui», déplore Ruth Altun. La police lui expliquera plus tard que derrière «Allen» se cache en réalité une bande organisée au Ghana.

La retraitée envoie même à «Allen» une photo de sa carte d'identité, car ce dernier exige une preuve qu'elle existe vraiment. Cela va permettre aux escrocs d'utiliser son nom à mauvais escient. Ils commandent en son nom des appareils coûteux pour qu'elle les réexpédie directement au Ghana. La facture, elle, termine bien sa course au domicile de la Bâloise. «J'étais complètement stupide, je n'ai pas réfléchi», se désole Ruth Altun avec le recul. «Allen» lui aurait expliqué qu'il avait un besoin urgent de ces appareils et qu'il réglerait les factures. Elle le croit.

Plus tard, elle reçoit un courrier de Swisscom. Il s'agit des factures pour les appareils qui sont depuis longtemps en route vers le Ghana. Lorsqu'elle veut prendre contact avec «Allen» pour lui demander de régler les factures, celui-ci ne donne plus de nouvelles. Elle se rend alors compte que quelque chose cloche et porte plainte auprès de la police. Mais il est déjà trop tard.

«J'ai peur d'ouvrir la boîte aux lettres».

La femme de 64 ans doit désormais se rendre au tribunal, accusée d'escroquerie multiple. Elle est reconnue coupable en première instance, mais la cour d'appel annule ensuite entièrement le verdict de culpabilité. Les créances impayées sont renvoyées à la voie civile. Cela signifie que Ruth Altun est acquittée sur le plan pénal, mais le tribunal ne considère pas pour autant que les créances sont injustifiées. Swisscom maintient ses exigences. Elle doit tout de même payer près de 9000 francs. Swisscom confie toutefois les créances au bureau de recouvrement EOS.

«Depuis, je reçois du courrier environ deux fois par semaine. J'ai peur d'ouvrir la boîte aux lettres», explique la retraitée. Elle ne peut et ne veut pas payer les 9000 francs de créances impayées. «Je ne sais pas ce que Swisscom imagine. Je perçois des prestations complémentaires, je vis avec le minimum. Même si je le voulais, je ne pourrais pas payer», assure-t-elle. Elle ne s'est pas rendue à une audience de conciliation avec le bureau de recouvrement devant le juge de paix. Elle a également refusé d'accepter des lettres recommandées.

Swisscom examine le cas

Swisscom affirme que le cas de Ruth Altun est «très complexe». Certes, la femme a été victime d'une escroquerie présumée. Mais comme elle est elle-même intervenue dans le processus en réexpédiant les paquets, il s'agit d'une participation active: «Si elle avait immédiatement pris contact avec Swisscom ou retourné la marchandise, le dommage aurait pu être évité».

Dans le cas de Mme Altun, Swisscom maintient en principe ses exigences. Mais pour l'instant, «aucune autre démarche» n'est entreprise et l'on «examinera dans les semaines à venir» si l'on s'en tient à réclamer effectivement l'argent. Le bureau EOS affirme être «toujours intéressé par une discussion afin de trouver une solution».

De son côté, Ruth Altun souhaite que son calvaire se termine le plus vite possible: «Ce n'est pas une vie pour moi. Je ne peux et ne veux plus vivre avec un tel fardeau. Je veux qu'on me laisse tranquille!»

(Adaptation par Thibault Gilgen)

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