Le 9 juin, la politique de la santé fera l'objet d'une épreuve de force: deux initiatives populaires seront soumises au vote. L'initiative du PS sur l'allègement des primes et l'initiative du Centre sur le frein aux coûts.
Cette dernière provoque des querelles entre les camarades. Au Parlement, le groupe socialiste s'était encore abstenu à une large majorité, mais le conseil du parti recommande désormais le oui. «Après une discussion approfondie, la décision a été prise de justesse», comme l'explique la coprésidente du PS Mattea Meyer à Blick.
Ce résultat ne convient pas à un groupe composé des conseillères nationales socialistes Barbara Gysi et Sarah Wyss ainsi que du nouveau conseiller national Islam Alijaj. Ils recommandent au noyau du PS de voter non. La décision sera prise ce samedi lors du congrès du parti qui a lieu à Genève.
A lire sur les initiatives
Une économie de 6 milliards
L'initiative pour un frein aux coûts exige que les coûts de la santé évoluent de manière égale à l'économie globale et aux salaires. Si ce n'est pas le cas, la Confédération et les cantons doivent prendre des mesures pour freiner la hausse des coûts et stopper l'explosion des primes.
Rien que pour l'assurance de base, il serait possible d'économiser 6 milliards de francs par an sans aucune perte de qualité, fait valoir le Centre. Par exemple en baissant le prix des médicaments, en augmentant le nombre d'interventions ambulatoires plutôt qu'hospitalières ou en introduisant un dossier électronique du patient.
«Contre le gaspillage et l'affairisme»
Du point de vue de la direction du parti socialiste, l'initiative souhaite que les coûts payés par les assurés n'augmentent pas plus que l'évolution des salaires, peut-on lire dans les documents du congrès. Il s'agit également d'une exigence du PS pour protéger le pouvoir d'achat de la population en général.
«Nous mettons l'accent sur un financement solidaire des primes d'assurance maladie, explique la coprésidente Mattea Meyer à Blick. Néanmoins, il est également nécessaire d'agir pour lutter contre le gaspillage et l'affairisme dans le domaine de la santé.»
Des considérations tactiques
Mais des réflexions tactiques jouent un rôle central. Si le PS devait être le seul parti, à côté du Centre, à décider de voter oui, il aurait nettement plus d'influence dans le débat sur la mise en œuvre. Il pourrait insister davantage sur ses propres idées, par exemple dans le domaine de la prévention ou contre la «pseudo-concurrence» au sein des caisses maladie.
De plus, le parti souhaiterait s'assurer que les groupes pharmaceutiques ne continuent pas à encaisser des prix de médicaments beaucoup trop élevés en Suisse. «Un mot d'ordre en faveur du oui permet de montrer ce que le PS propose en matière de coûts», argumente la direction du Parti socialiste.
Ainsi, en échange d'un oui à l'initiative sur le frein aux coûts, la direction du PS pourrait espérer un soutien du Centre pour l'initiative de gauche sur l'allègement des primes. Il n'y a toutefois pas d'accord officiel et le Centre devrait clairement décider de voter non lors de son assemblée des délégués qui aura également lieu samedi.
Barbara Gysi met en garde
La conseillère nationale PS Barbara Gysi se battra en tout cas avec véhémence pour un non à l'initiative du Centre. Le PS s'est toujours clairement opposé aux freins aux coûts et aux automatismes dans différents domaines, écrit-elle dans sa proposition.
Elle utilise le frein à l'endettement dans le budget fédéral comme exemple négatif: celui-ci est une source d'irritation depuis le début. «Il montre comment la pression est mise en place et que les plans de démantèlement et d'économie ne sont certainement pas mis en œuvre là où nous le ferions», critique Barbara Gysi. Le PS tente en vain depuis des années d'aménager le frein à l'endettement de manière plus supportable et d'obtenir une plus grande marge de manœuvre en matière de politique financière.
L'initiative se focalise unilatéralement sur le développement économique et occulte les évolutions démographiques et médico-techniques, met en garde la politicienne. «Cela recèle de grands dangers et conduit à des exercices d'économie unilatéraux au mauvais endroit.» Barbara Gysi craint par exemple des franchises et des participations aux coûts plus élevées pour les patients, des restrictions dans le catalogue des prestations ou des mesures d'économie pour le personnel.
L'épreuve de force à Genève
C'est à Genève que sera décidé le camp gagnant. La base du PS est en tout cas toujours prête à surprendre et à bousculer les recommandations de la direction du parti. Ainsi, en 2018, la base a imposé aux dirigeants du PS le référendum contre les détectives sociaux. L'année précédente, elle a refusé de rayer du programme du parti l'abolition de l'armée ou le dépassement du capitalisme.
Ni Barbara Gysi ni Mattea Meyer ne se risquent à pronostiquer de quel côté penchera le balancier. «A mon avis, tout est ouvert», déclare Barbara Gysi. Et Mattea Meyer: «Ce sera certainement passionnant.»