Le plan de bataille du Parlement est clair: d'ici à 2030, les dépenses de l'armée doivent être augmentées pour atteindre au moins 1% du PIB. De 5,5 milliards de francs actuellement, le budget pour réarmer la Suisse doit donc atteindre plus de 7 milliards de francs par an.
Mais le Conseil fédéral freine des quatre fers. En raison d'une lutte entre la ministre de la Défense du Centre Viola Amherd et la ministre des Finances du PLR Karin Keller-Sutter au sujet de l'augmentation des dépenses de l'armée, l'objectif ne sera pas atteint avant 2035.
Au grand dam du conseiller aux Etats UDC Werner Salzmann, qui avait bel et bien pour objectif d'atteindre 1%: «Nous devons renouer avec la croissance, sinon l'armée perdra un volume d'investissement de 10 milliards de francs», dit-il. «Cet argent doit être disponible de toute urgence pour rétablir la capacité de défense de notre pays.»
Recherche de financements alternatifs
Werner Salzmann propose différentes possibilités de financement. Ainsi, les moyens supplémentaires pourraient être comptabilisés comme «dépenses extraordinaires» pour éloigner le risque d'un surendettement. Ou alors utiliser certaines réserves existantes.
Un tour de passe-passe du conseiller aux États UDC? «Certainement pas, la loi sur les finances prévoit de tels aménagements», se défend Werner Salzmann. Selon lui, la situation en matière de politique de sécurité a pris une tout autre direction avec la guerre en Ukraine: «Pendant des décennies, des économies ont été faites sur le dos de l'armée», déplore Werner Salzmann. «Maintenant, nous avons besoin de moyens supplémentaires le plus rapidement possible afin de pouvoir remplacer notre armement obsolète dans les années à venir et augmenter la réserve de munitions afin qu'elle réponde aux besoins de la guerre.»
La Suisse, à la traîne en matière d'armement
La Suisse est de plus en plus à la traîne sur le marché de l'armement, avertit Werner Salzmann. Les pays qui ont livré des biens d'armement à l'Ukraine doivent maintenant combler leurs pertes de matériel. «Si nous n'avançons pas dès maintenant dans les acquisitions, nous serons à la traîne pendant des années.»
Il cite également des domaines dans lesquels la modernisation de l'armée ne pourrait pas se faire sans accuser un certain retard, comme l'augmentation du stock de munitions ou le remplacement des véhicules de transport de troupes de type M113. L'argent manquerait également pour le maintien en état des chars de combat Leopard II.
En outre, Werner Salzmann estime que l'acquisition d'un nouveau système d'artillerie ou de missiles guidés pour la défense antichars est menacée. Il estime par ailleurs que le système de défense antiaérienne – comme les missiles de croisière et les drones à basse et moyenne distance – qui doit compléter le système Patriot pour protéger les infrastructures militaires et civiles – est en danger.
Le conseiller aux Etats UDC estime enfin qu'il est du devoir du Conseil fédéral de revoir la politique budgétaire de l'armée. Et il annonce: «Lors des débats sur le budget en décembre, je demanderai une augmentation correspondante du budget pour 2024.»
Augmenter le budget militaire fait bondir le PS
Evidemment, cette demande rencontre une certaine résistance. La conseillère nationale socialiste Franziska Roth s'oppose à l'augmentation budgétaire demandée par Werner Salzmann. «D'un point de vue militaire, nous ne sommes pas confrontés à une situation extraordinaire en Suisse», explique l'élue.
Selon elle, la plupart des risques en matière de politique de sécurité concernent le domaine civil. «C'est là que nous devons être équipés. Nous devrions également commencer par geler les fonds des oligarques et rechercher les nombreux espions russes dans notre pays. Il y a beaucoup plus d'urgence à ce niveau-là.» Au lieu d'être investis dans l'armement local, les fonds devraient être affectés à des programmes de déminage et à l'aide humanitaire en Ukraine, selon elle.
L'élue socialiste estime donc que le Conseil fédéral a raison de mettre la pédale douce. «Un armement aussi important que celui demandé par Werner Salzmann n'est en aucun cas nécessaire.» Selon elle, il n'y a aucune menace militaire un tant soit peu réaliste qui justifierait une telle augmentation du budget. Et de conclure: «L'intervention de Werner Salzmann est un coup de pouce à l'industrie de l'armement. Nous n'y participerons pas.»