Démission du chef de l'armée
La taupe que traque Viola Amherd viendrait... de son propre département

La ministre de la Défense Viola Amherd traque la taupe à l'origine de l'annonce, mardi 25 février, des démissions du chef de l'armée Thomas Süssli et du chef du SRC Christian Dussey. La ministre a accusé d'autres départements. Mal lui en a pris.
Publié: 06:23 heures
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Dernière mise à jour: 06:30 heures
Le chef du Service de renseignement Christian Dussey (à gauche) et le chef de l'armée Thomas Süssli (2e à droite) ont annoncé leur démission mardi 25 février.
Photo: keystone-sda.ch
Joschka Schaffner

Les démissions du chef de l'Armée Thomas Süssli et du chef du service de renseignement Christian Dussey ont été annoncées mardi 25 février sur la plateforme interne destinée aux conseillers fédéraux et à leurs proches. A peine une heure après, toute la presse était au courant! Cette révélation a mis la ministre de la Défense Viola Amherd, hors d'elle. Cette dernière a déclaré dans la foulée que l'information n'aurait jamais été divulguée si une taupe ne l'avait pas transmise à des journalistes de la «NZZ» et de la SRF.

La conseillère fédérale a ainsi suggéré que la fuite pourrait être le fait d'un membre de l'entourage d'un autre conseiller fédéral. Le porte-parole du Conseil fédéral Andrea Arcidiacono a lui expliqué mercredi en conférence de presse que Viola Amherd avait prié ses collègues du Conseil fédéral de faire la lumière sur ces fuites, lors de leur traditionnelle séance hebdomadaire. «Nous avons parlé de mesures pour que cela ne se reproduise pas», a ensuite déclaré la ministre de la Défense, visiblement très agacée.

Une conseillère d'Etat accuse

Le Département de la défense, de la protection et des sports (DDPS) a lui déposé plainte à la suite de cette indiscrétion, afin que la taupe puisse être identifiée. En coulisses, un nom s'est rapidement mis à circuler: celui de la présidente de la Confédération et ministre des Finances Finances Karin Keller-Sutter. Mardi, la conseillère aux Etats centriste Andrea Gmür, une proche de Viola Amherd, avait déjà porté publiquement une «accusation» identique. 

Seulement voilà, selon des sources bien informées, les fuites dans la presse ne constituent de loin pas le seul caillou dans la chaussure de Viola Amherd. La vraie question est de savoir comment le Conseil fédéral a pu être informé si tard de ces deux démissions annoncées à l'interne en janvier. 

De sources proches de l'armée confirment à Blick que des dizaines d'officiers ont été informés dès lundi de ces démissions par le biais d'appels téléphoniques ou de mails. La rédaction de Blick a également eu vent des premières rumeurs de démissions lundi soir, par l'entremise d'un officier de carrière à la retraite.

Au sein même du DDPS

L'information circulait donc avant tout au sein même du département de Viola Amherd. Selon des sources proches de l'armée, la nouvelle a pris naissance au sein du Service de renseignement, habituellement très discret. 

Pour Viola Amherd, c'est donc une double gifle: non seulement elle n'a pas réussi à faire taire le personnel de son département, mais elle a en plus prétendu mercredi que Christian Dussey et Thomas Süssli n'avaient appris la démission de l'autre que par les médias, ce qui semble difficile à croire.

La taupe tant traquée par la cheffe du DDPS proviendrait donc... de sa propre maison. Interrogé par Blick, le DDPS n'a pas souhaité s'exprimer.

Coup de pression de KKS?

Il n’est pas surprenant que les soupçons du DDPS se soient d’abord tournés vers le Département fédéral des finances (DFF) de Karin Keller-Sutter. La ministre des Finances et Viola Amherd sont loin d’être sur la même longueur d’onde concernant l’armée. Fervente partisane du frein à l’endettement, l’actuelle présidente de la Confédération a plusieurs fois combattu les propositions d’augmentation du budget militaire.

Au Conseil fédéral comme au Parlement, elle a pu compter sur le soutien de son parti, le Parti libéral-radical (PLR), mais aussi de l’Union démocratique du centre (UDC), qui rejette la stratégie de coopération internationale défendue par Viola Amherd. Les opposants de la ministre de la Défense estiment que le DDPS ne saurait que faire de moyens supplémentaires, malgré ses avertissements répétés sur les risques liés au manque de capacités de l’armée. Les stratégies maintes fois exposées par Thomas Süssli et Viola Amherd au Parlement, elles, continuent d’être ignorées.

Thomas Süssli dans le dur

Il faut dire que Thomas Süssli n'a cessé d'apporter – certes involontairement – de l'eau au moulin des critiques. Que ce soit avec les nombreux problèmes liés à l'acquisition. Ou en janvier 2024, lorsque de nombreux médias ont révélé qu'un trou d'un milliard de francs était soudainement apparu. Le futur ex-chef de l'armée avait alors évoqué un «manque de liquidités» et s'était fait taper sur les doigts peu de temps après par la Commission parlementaire compétente.

Les départs de Thomas Süssli et de Christian Dussey sont-ils pour autant liés à la querelle entre le DDPS et le DFF? Oui, et pas qu'un peu, si l'on en croit de nombreuses voix au Palais fédéral. La vague de licenciements semble être le dernier coup d'éclat d'un conflit qui couvait depuis longtemps. Et elle a été accompagnée – comme bien d'autres choses auparavant – par des insuffisances criantes au sein du département de Viola Amherd.

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