Le groupe Rieter, spécialisé dans les machines textiles, montre à quel point la situation est préoccupante. Cette entreprise traditionnelle de Winterthour, dans le canton de Zurich, a dû annoncer des suppressions d'emplois pour la deuxième fois cette année. En été, le directeur général du groupe, Thomas Oetterli, avait déjà annoncé la suppression de 300 postes administratifs. Quelques mois plus tard, la société a annoncé vendredi la suppression de 400 à 600 autres postes, cette fois principalement dans la production.
L'entrée de Thomas Oetterli chez Rieter ne s'est pas déroulée comme il l'aurait imaginé. Auparavant, il était CEO du fabricant d'ascenseurs Schindler, mais a dû quitter ce poste de manière abrupte. Après un court passage chez l'analyste financier immobilier controversé Norbert Ketterer, qui parraine le FC Zurich avec Nokera, il est arrivé chez Rieter en mars. Cette restructuration a été menée en étroite collaboration avec le conseil d'administration, dirigé par le principal actionnaire Peter Spuhler, qui détient 33% du groupe industriel.
Rieter traverse actuellement une période de ralentissement rarement observée. Fondée en 1795, l'entreprise génère la majeure partie de son chiffre d'affaires grâce à la fabrication de machines à filer, principalement dans le cadre de grands projets pour des fabricants de textiles. Cette activité est particulièrement sensible aux cycles économiques.
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Entrée des commandes réduite de moitié
Les chiffres publiés vendredi reflètent la gravité de la situation. Le chiffre d'affaires des neuf premiers mois de l'année s'est élevé à 1093 millions de francs suisses, tandis que les nouvelles commandes n'ont atteint que 452 millions de francs pour la même période. Il est évident que les chiffres d'affaires seront nettement inférieurs dans les trimestres à venir, entraînant une chute des bénéfices, selon Matthias Geissbühler, économiste chez Raiffeisen.
Rieter n'est pas la seule entreprise, liée à Peter Spuhler, à traverser des difficultés. La situation est encore plus difficile pour le fabricant d'acier Swiss Steel, qui est aux prises avec de graves problèmes en raison de la forte valeur du franc suisse et de la hausse des prix de l'énergie.
Le ralentissement des commandes touche l'ensemble du secteur, y compris des entreprises comme Bossard, un fournisseur industriel de Suisse centrale, qui a perdu en bourse en raison de mauvais chiffres d'affaires et de perspectives mitigées. Comet, basée dans le district de la Singine dans le canton de Fribourg, a également été durement touchée, tout comme Meier Tobler, à Zurich.
La force du franc suisse est problématique
La situation est également difficile pour Lonza, un poids lourd bâlois de la chimie et de la pharmacie, qui a vu son cours en bourse chuter en raison de chiffres trimestriels médiocres et d'un avertissement sur les bénéfices (Ndlr: la communication, par une société, du fait qu'elle ne sera pas en mesure d'atteindre les bénéfices prévus initialement). La force du franc suisse constitue un fardeau supplémentaire pour les entreprises suisses fortement orientées vers l'exportation.
La conjoncture économique mondiale s'affaiblit et le secteur industriel est particulièrement touché. Les indicateurs avancés, tels que l'indice des directeurs d'achat de l'industrie, laissent présager une récession. Les entreprises industrielles suisses font face à des vents contraires importants.
L'effet du Covid-19 s'amenuise
De nombreuses entreprises avaient bénéficié temporairement d'une forte demande suite à la pandémie de Covid-19, mais la situation a depuis évolué. Les nouvelles commandes ont fortement diminué depuis le deuxième trimestre de cette année, et aucune amélioration significative n'est en vue à court terme.
Il est probable que le chiffre d'affaires stagne au cours des prochains trimestres, ce qui pourrait entraîner une révision à la baisse des estimations de bénéfices pour 2024. Les entreprises industrielles font face à des défis considérables, et de nombreux dirigeants d'entreprises prévoient une baisse des cours boursiers en raison de la diminution des nouvelles commandes.