Une seule déclaration d'impôt par couple? Cela devrait bientôt être de l'histoire ancienne. Le Conseil fédéral veut que chaque contribuable dépose sa propre déclaration d'impôt, qu'il soit marié ou célibataire. Au début de l'année, la ministre des Finances du Parti Libéral Radical (PLR) Karin Keller-Sutter a présenté sa proposition de changement de système. Total des coûts: un milliard de francs en moins pour la Confédération et les cantons.
La Commission de l'économie du Conseil national s'est également prononcée en faveur de cette proposition lors du vote global, de justesse par 13 voix contre 12. La Chambre haute se prononcera sur la réforme lors de la session d'automne.
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Mais la situation risque de se détériorer. L'Union démocratique du centre (UDC) et Le Centre rejettent le projet et leurs groupes parlementaires pèsent 98 voix dans la balance. Avec 102 voix, l'avance de l'alliance PLR, Parti socialiste (PS), Vert-e-s et Parti vert libéral (PVL) est très mince. Cela fait des années qu'elle travaille au changement de système. Mais maintenant que l'objectif est à portée de main, l'alliance menace de s'effondrer. Le manque à gagner fiscal d'un milliard de francs reste le point qui fait grincer des dents. Et il pourrait être décisif.
La gauche dans la tourmente
Le manque à gagner prévu met la gauche dans l'embarras. Elle n'a pas réussi à faire passer sa revendication d'une compensation totale au sein de la commission. Elle n'a pas non plus réussi à lier l'accord à une augmentation des fonds pour le financement des crèches. La question se pose donc: le PS et les Vert-e-s vont-ils faire des concessions financières?
En commission, ils ont en tout cas approuvé le projet à reculons. «Nous ne voulons pas faire échouer la réforme dès maintenant, mais nous ne pouvons pas la soutenir jusqu'au bout sous cette forme», explique la conseillère nationale zurichoise socialiste Céline Widmer à Blick. Un milliard, c'est tout simplement trop. «La réforme est certes attendue depuis longtemps, mais à ce prix-là, il ne sera pas possible de trouver une majorité au sein de notre groupe parlementaire», déclare également la conseillère nationale saint-galloise verte Franziska Ryser.
Pour que le changement de système réussisse, l'alliance doit resserrer les rangs. Les dissidents ne sont pas tolérés. «Nous tendons la main à un compromis susceptible de réunir une majorité», soulignent Céline Widmer et Franziska Ryser. C'est pourquoi le PS et les Vert-e-s ont aussi soutenu une proposition de la conseillère nationale bernoise vert'libérale Kathrin Bertschy. Celle-ci voulait taxer un peu plus les personnes à hauts revenus afin de limiter les pertes fiscales à 500 millions. Le PLR n'a toutefois pas suivi, la proposition a été rejetée.
«Je ne veux pas que la réforme échoue», décalre Céline Widmer. Selon elle, c'est maintenant au PLR de faire le pas décisif. «Sans compromis, la chute est programmée.»
Le PS doit faire un choix
Une chute que la conseillère nationale saint-galloise PLR Susanne Vincenz-Stauffacher souhaite éviter. «Ce projet est un jalon pour la société, les familles et les femmes», assure-t-elle. Elle considère le projet du Conseil fédéral comme un compromis équilibré. Susanne Vincenz-Stauffacher est convaincue que les pertes fiscales seront minimisées à long terme, car davantage de femmes entreront dans la vie active.
Selon elle, le PS doit désormais oser franchir le pas. «La commission a trouvé le plus grand dénominateur commun et le PS doit maintenant annoncer la couleur pour savoir ce qui est le plus important pour lui: la lutte des classes ou l'égalité.»
La conseillère nationale vert'libérale Kathrin Bertschy se montre en revanche confiante dans le fait que le PLR et le PS parviendront tout de même à un accord. «Les avantages de cette réforme pour le marché du travail et l'égalité dépassent de loin la pomme de discorde concernant les pertes fiscales», lance-t-elle. Avec l'imposition individuelle, l'incitation à travailler augmente pour les deuxièmes revenus, donc surtout pour les femmes.
Pour les quatre femmes, il reste l'espoir que l'alliance trouve encore la faille. Reste à savoir si elle y parviendra dès la session d'automne. Si les radicaux et la gauche montrent leurs muscles, le projet pourrait être rejeté lors du vote global. Cela équivaudrait à une décision de non-entrée en matière.