L'année dernière a été tumultueuse pour de nombreuses entreprises. Pour se frayer un chemin à travers les turbulences, ces dernières ont dû compter sur des directeurs et de managers stratégiques aux commandes. Et elles n'ont pas hésité à y mettre le prix. Le patron de l'UBS, Sergio Ermotti, a touché 14,4 millions de francs pour neuf mois de travail. Il entre ainsi dans la ligue supérieure des hauts salaires suisses.
Pour la deuxième fois consécutive, les entreprises ont prévu un budget attractif pour la rémunération de leurs collaborateurs aux plus hauts niveaux de direction. En 2023, les augmentations de salaire ont enregistré une hausse inédite depuis 2015 de 2,4% au niveau senior et d'environ 3% au niveau du management moyen et inférieur. La valeur de l'automne dernier était plus basse, mais les cadres ont encore reçu une augmentation de salaire de près de 1,9% sur les trois niveaux en moyenne.
Les techniciens et les représentants des professions commerciales sont gagnants
Ce sont les cadres ayant une formation technique ou commerciale qui en profitent le plus. Un employé qui occupe la direction commerciale générale peut percevoir 218'000 francs. Les directeurs techniques reçoivent en moyenne 236'000 francs, et avec de l'expérience, peuvent même atteindre 308'000 francs.
Les responsables de comptes clés, les gestionnaires de risques et les chefs d'équipe dans le domaine de la planification et du développement de l'entreprise peuvent également franchir la barre des 200'000 francs. Les cadres des secteurs de l'audit, de la vente, des finances et de la comptabilité ainsi que du droit ne se situent que très légèrement en dessous de la barre des 200'000.
La rémunération la plus basse est celle des chefs de laboratoire, d'entrepôt ou d'expédition. La valeur médiane des salaires se situe entre 125'000 et 130'000 francs par an. Ces données sont présentées dans l'«Etude sur les salaires des cadres Suisse 2024». L'enquête est un co-projet de la société de conseil en entreprise Kienbaum Consultants International et de la «Handelszeitung»: elle en est à sa 42e édition. L'étude complète est disponible ici.
Les données révèlent également que les personnes de haut rang ou qui dirigent leur propre entreprise reçoivent en moyenne le salaire le plus élevé. La valeur médiane de la rémunération d'une direction unique s'élève à 371'000 francs, alors qu'en haut de l'échelle, le montant grimpe à 519'000 francs. La situation est la même pour la présidence de la direction: la valeur médiane atteint 481'000 francs. Les cadres supérieurs touchent quant à eux jusqu'à 673'000 francs par an.
La rémunération effective de nombreux cadres dépend toutefois de la réussite commerciale, explique Timon Forrer, directeur et membre de la direction de Kienbaum: «L'année dernière, la plupart des branches ont distribué des éléments de salaire variables – soit des bonus – plutôt élevés. Ce sont surtout les cadres qui en ont profité.»
Les bonus font pencher la balance
La part variable va de 13'000 francs pour les cadres opérationnels, à 37'000 francs pour les cadres supérieurs et à 80'000 francs pour les seuls directeurs et membres de la direction.
Environ 93% des cadres supérieurs et 84% de tous les cadres reçoivent une rémunération variable annuelle. C'est la raison pour laquelle l'augmentation de salaire de cette année est proportionnellement plus élevée: «En cas de mauvaise année économique, les personnes bien rémunérées perdent nettement plus et, à l'inverse, elles profitent davantage des bons exercices commerciaux que la base des collaborateurs», précise Timon Forrer.
Le secteur qui a une fois de plus suscité des discussions autour des bonus élevés en 2023 est aussi celui qui verse les salaires les plus élevés de Suisse: le secteur bancaire. Il est suivi de près par le secteur des assurances. Le conseil et la branche pharmaceutique sont également en tête. Les médias, le commerce et les télécommunications se trouvent à l'autre bout de l'échelle salariale.
La voiture de fonction perd de son importance
Un aspect spécifique de l'étude est à noter: les différences entre les régions. Depuis des années, c'est à Zurich que les cadres gagnent le mieux leur vie, suivi de Bâle-Ville, de la Suisse centrale et de la région lémanique. C'est au Tessin que les cadres sont le moins bien payés.
Ces chiffres n'évoluent guère, alors qu'ils devraient s'harmoniser davantage selon Timon Forrer. D'une part, la disposition à la mobilité augmente avec le niveau de carrière. D'autre part, les réglementations sur le travail à domicile ne lient plus forcément les gens au lieu d'implantation de l'entreprise. Par conséquent, les salaires devraient s'aligner dans toute la Suisse, mais ce n'est pas le cas, admet Kienbaum. Toujours est-il que «de plus en plus d'entreprises renoncent aux fourchettes de rémunération régionales», ajoute le directeur Forrer.
Un changement attire toutefois l'attention. En Allemagne, les véhicules de société jouissent toujours d'une grande estime à tous les niveaux de management. Là-bas, les voitures de fonction deviennent rares. Près de 70% des directeurs uniques conduisent encore une voiture professionnelle, alors qu'ils sont un peu plus de la moitié dans l'ensemble du top management.
En revanche, la proportion tombe à moins de 20% chez les cadres moyens et inférieurs. Il y a toutefois quelques exceptions: alors que quatre directeurs des ventes sur cinq conduisent une voiture de société, ce n'est même pas le cas d'une femme sur dix parmi les directeurs informatiques.
En revanche, la mobilité durable gagne en importance. Les bornes de recharge électrique et les subventions pour les transports publics se répandent. Mais les cadres ne sont pas les seuls à en profiter: «On fait de moins en moins la différence entre les cadres et les collaborateurs en matière d'avantages, précise encore Timon Forrer. Cela correspond à l'esprit du temps, dans lequel les organisations aspirent à des hiérarchies horizontales.»