Domaines skiables en crise
Le petit domaine du Pizol a trouvé une solution pour survivre

Manque de neige, prix élevés et de moins en moins de clients. De nombreux domaines skiables en Suisse sont confrontés à la même question: combien de temps pourront-ils encore tenir? La station du Pizol (SG) a adopté un plan de survie ambitieux.
Publié: 26.11.2023 à 11:46 heures
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Dernière mise à jour: 26.11.2023 à 12:15 heures
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Le président du conseil d'administration, Markus Oppliger, s'est battu au cours des trois dernières années pour assurer un avenir à son domaine skiable.
Photo: Linda Käsbohrer
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Lisa Aeschlimann

Markus Oppliger et ses collaborateurs ont dû se creuser les méninges. C'était en 2018, après trois mauvais hivers. Trois années sans neige, trois années de déficit sur le domaine du Pizol (SG).

Les remontées mécaniques avaient un besoin urgent de soutien, car même durant les bonnes années, la situation n'était pas bonne. «Lors d'un hiver moyen, nous avons perdu entre 500'000 et 800'000 francs par an», explique Markus Oppliger, ancien expert-comptable, aujourd'hui président du conseil d'administration des Pizolbahnen - la société qui possède les remontées mécaniques.

Les domaines skiables suisses en crise

La commune a apporté son aide pendant quelques années, mais elle était limitée. Et les signes avant-coureurs ne se sont pas améliorés. Sans une tombée de neige suffisante au Pizol avant Noël, le budget de la saison 2019 aurait présenté un trou encore plus béant qu'il ne l'était déjà. Une chose était claire: il n'y avait alors pas d'avenir sans enneigement artificiel.

Il fallait trouver une véritable solution, et rapidement.

La région du Pizol n'est pas la seule à avoir des problèmes: de nombreux domaines skiables suisses, principalement en moyenne montagne, sont en crise. Il y a d'une part le changement climatique, qui fait monter la limite des chutes de neige et qui oblige les domaines à investir dans des installations d'enneigement coûteuses. Et d'autre part, il y a les prix qui, ces dernières années, n'ont connu qu'une seule direction: la hausse. Selon une analyse de marché de 2017, une journée de ski coûtait en moyenne 170 francs aux Suisses. Une semaine de vacances de ski pour une famille de quatre personnes: 4760 francs.

De moins en moins de gens sur les skis

De plus en plus de personnes renoncent au sport national suisse. Alors que dans les années 90, les remontées mécaniques dépassaient régulièrement les 30 millions de journées-skieurs, ce chiffre n'était plus que de 22,3 millions l'année dernière. La situation ne s'améliore guère: les baby-boomers partent, les jeunes n'ont plus automatiquement grandi avec la neige. Cette saison, en raison de l'inflation, le principal marché étranger, l'Allemagne, risque également de s'effondrer.

Ce sont les petites et moyennes stations qui doivent désormais faire face à des problèmes existentiels de plus en plus évidents. Avec douze installations, Pizol est de taille moyenne, avec une hauteur de neige moyenne. Cela signifie des coûts fixes élevés et peu de garantie d'enneigement.

«Ils doivent changer d'orientation, réussir à être rentables en été ou demander des fonds publics», explique Jürg Stettler, expert en tourisme à la Haute école de Lucerne. La question «combien de temps encore ?» se pose au plus tard lorsque les installations ou les concessions doivent être renouvelées. Car cela coûte vraiment cher.

Un gros travail de persuasion

Le président du conseil d'administration des Pizolbahnen et son équipe ont donc commencé à faire des calculs et à élaborer des scénarios.

  • Le scénario 1: le gros coup, une télécabine directe jusqu'à la cabane du Pizol et son hôtel. Mais il n'avait aucune chance avec son devis de 150 millions de francs.
  • Scénario 2: réduire la taille de la station, fermer un téléphérique, soit uniquement l'été, soit uniquement l'hiver. Se dessine alors une impasse financière.
  • Scénario 3: continuer comme avant. Une mort lente mais inéluctable.
  • Le scénario 4: le seul qui était viable, un statu quo amélioré. «Tout reste comme avant, mais nous investissons dans une installation d'enneigement».

En 2020, le domaine a présenté le plan aux communes et expliqué immédiatement combien cela coûterait: 12,5 millions de francs. Cela permettrait de payer l'enneigement artificiel et d'assurer son fonctionnement à moyen terme. «La première réaction a été : «Allô ?!»

Pour Markus Oppliger et compagnie, il s'agissait de convaincre. Ils ont mené des dizaines d'entretiens «très intensifs», visité des associations, des conseils municipaux, des clubs de ski et des assemblées communales. «Nous étions comme des prédicateurs itinérants». Et de nombreuses nuits blanches... Mais le boss, habitué à faire des calculs, à prendre des risques et à vendre, a réussi à faire passer son plan.

Après quatre assemblées de citoyens et deux votations communales, la dernière commune, Fläsch (GR), a dit oui au projet de sauvetage en juin dernier. «Deux jours plus tard, nous commencions à creuser». Près de la cabane du Pizol, un lac d'accumulation est en train de voir le jour, avec une capacité d'eau équivalente à 500'000 baignoires. «Fin 2024, nous pourrons pour la première fois injecter ce volume d'eau dans le système».

Les domaines skiables doivent-ils être subventionnés ?

Que valent nos domaines skiables? La question se pose car les subventions n'ont cessé d'augmenter ces dernières années, explique Jürg Stettler: «La plupart des nouveaux projets de construction impliquent aujourd'hui des fonds publics». C'est même le cas dans les grands domaines: à Andermatt (UR), par exemple, l'extension du domaine skiable, qui a coûté 130 millions de francs, a été en grande partie financée par des contributions des pouvoirs publics. À Laax (GR), le canton soutient une nouvelle télécabine à hauteur de plusieurs millions.

L'expert voit cette évolution d'un œil sceptique. Il affirme que le tourisme a une importance économique et que certaines remontées mécaniques remplissent une mission de transport — ce qui légitime un cofinancement public. «La question est toutefois de savoir dans quelle mesure». Car le ski en soi est un loisir et un plaisir privé.

Pizol doit voler de ses propres ailes à l'avenir

«Nous ne représentons pas seulement des emplois, mais aussi une valeur essentielle en termes de qualité de vie. Si une piscine couverte ou un terrain de football sont financés par les pouvoirs publics — pourquoi pas nous», se demande Markus Oppliger?

L'objectif à long terme est de retomber sur ses pieds. Pour cela, on mise de plus en plus sur les activités estivales, dont le chiffre d'affaires a triplé ces dernières années. Avec de nouveaux sentiers de randonnée, de VTT et de découverte et peut-être même un jour un pont suspendu de 1000 mètres au-dessus du Valeistobel. Une vision d'avenir, «mais l'enneigement artificiel était aussi une vision d'avenir, il a quelques années», rappelle le chef de Pizol, une vision qui est aujourd'hui réalité.

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