Tout le monde court, sauve, s'enfuit. Le Département de la défense (DDPS) se désagrège – c'est l'impression qu'il donne ces jours-ci. La ministre de la Défense Viola Amherd s'en va à la fin mars, le chef des Forces aériennes Peter Merz suit et voilà que le chef du Service de renseignement Christian Dussey et le chef de l'armée Thomas Süssli quittent à leur tour le navire.
Thomas Süssli, justement, a régulièrement fait la une des journaux. Car les mauvaises nouvelles n'arrêtaient pas de se succéder au Département de la défense: que ce soit la débâcle des drones, les nombreux projets d'armement hors de prix qui prennent du retard ou le nouveau modèle d'obligation de servir qui devait résoudre le manque de personnel dans l'armée, mais dont le Conseil fédéral ne veut rien savoir.
Il a abandonné la lutte
Trop, c'est trop: le chef de l'armée a fini par jeter l'éponge. Au Palais fédéral comme dans les milieux militaires, on est unanimes: Thomas Süssli en a assez et abandonne la lutte contre la Berne fédérale.
Désormais, le financement de l'armée reste incertain et une planification sur plusieurs années semble pour le moment impossible. Thomas Süssli ne s'est pas senti soutenu par le Conseil fédéral. Le Parlement n'a pas non plus réussi à se mettre d'accord sur une solution à long terme. Parallèlement, des fuites sur les nombreuses problématiques de l'armée ont régulièrement mis Thomas Süssli sous pression. Les critiques continuelles ont également pesé sur le chef de l'armée, même s'il n'a rien laissé transparaître.
Relations avec Amherd ternies
A cela s'ajoute sa relation avec sa supérieure, Viola Amherd, qui s'est sensiblement détériorée l'année dernière. En 2019, la conseillère fédérale en avait surpris plus d'un en élisant Thomas Süssli à la tête de l'armée. Elle avait propulsé une personne reconvertie professionnellement au plus haut poste de l'armée, n'en déplaise aux vieux vétérans. Le fait qu'elle ait réussi à imposer Thomas Süssli les a soudés.
Mais leur relation s'est détériorée il y a environ un an, lors des discussions sur un prétendu «manque de liquidités» de l'armée. Thomas Süssli a confirmé l'information, tandis que Viola Amherd a démenti. La gauche semblait ignorer ce que faisait la droite. Une véritable cacophonie! Mais surtout, la ministre de la Défense a publiquement laissé son chef d'armée sur le carreau. Une fois de plus, le fidèle soldat n'a rien laissé paraître. Mais la confiance qu'il avait en sa cheffe s'est probablement brisée.
Une source d'incertitude
Thomas Süssli, qui quitte ce défi de taille après six ans à la tête de l'armée, était conscient qu'avec le départ de Viola Amherd, il serait encore davantage sous pression. Puisqu'à chaque mauvaise nouvelle, à chaque nouveau problème qui émerge et à chaque nouveau projet qui prend du retard et devient plus cher, il porte une part de responsabilité. De plus, chaque changement de département apporte son lot d'incertitudes. Un nouveau conseiller fédéral fait un peu le ménage, en injectant volontiers du sang neuf dans son département.
Après une période d'initiation relativement courte, le nouveau ministre de la Défense pourra également nommer un chef d'armée qui ne travaillera pas seulement à sa guise, mais qui pourra également se mettre au travail sans être gêné par les dossiers antérieurs. Les défis ne manquent pas.