Le cas de Louisa Brohm, mère de famille de 34 ans, a fortement intéressé les lecteurs de Blick des deux côtés de la Sarine. Vous avez été nombreux à lire le témoignage de cette Lucernoise dont les frais de garde de ses deux enfants ont explosé en raison de l'endettement de sa commune. Avec ses 30'000 habitants, Kriens est d'une taille comparable à Sion ou Fribourg.
Comme nous vous l'expliquions jeudi, la commune de Suisse centrale n'a vraiment pas brillé dans la gestion de ses deniers publics. Elle a aligné les exercices déficitaires, au point d'accumuler une montagne de dettes s'élevant actuellement à 200 millions de francs. Et comme les habitants n'ont pas voulu entendre parler d'une augmentation d'impôts, la ville doit désormais se serrer la ceinture et réduire les prestations. Les premiers habitants menacent de s'en aller sous des cieux moins endettés.
200'000 francs de dette par habitant!
Au fond, comment une ville peut-elle se retrouver en faillite? C'est la question que beaucoup de lectrices et lecteurs se sont posée. Nous avons sollicité les lumières de Christoph Schaltegger, 50 ans, économiste à l'Université de Lucerne. Celui-ci évoquait jeudi le cas de Leukerbad, station thermale du Haut-Valais que les Romands connaissent plutôt sous le nom de Loèche-les-Bains.
«Il s'agit bien de la seule commune jusqu'ici à avoir été déclarée insolvable», confirme le directeur de l'Institut de politique économique suisse. À la fin des années 1990, les finances communales ont plié sous le poids de l'endettement. Une situation provoquée par des investissement douteux et des participations financières à des projets d'infrastructure en faveur du tourisme locale. La dette totale envers les créanciers a culminé à 350 millions de francs, soit environ 200'000 francs par habitant!
Un fardeau tel qu'un assainissement durable était utopique. Les parties impliquées se sont mises d'accord sur un concept d'assainissement, validé en 2003. Et celui-ci a exigé des créanciers des concessions considérables. «C'est ce que prévoit le droit suisse dans sa procédure d'insolvabilité pour les communes, explique Christophe Schaltegger. Dans cette situation, on nomme un administrateur judiciaire. Celui-ci a pour mission de dégager le plus de fonds possible pour pouvoir rembourser les créanciers.»
Pas de sauvetage du canton
Cette loi existe encore aujourd'hui et ces règles seraient également appliquées à Kriens si la commune située au pied du Mont Pilatus venait à faire faillite. Quid du canton de Lucerne? Il n'est pas responsable des manquements financiers de la Ville, fût-elle la troisième du canton. Dans le cas de Loèche-les-Bains, cela a été confirmé par le Tribunal fédéral.
En 2003, les juges de Mon-Repos ont rejeté plusieurs plaintes adressées au canton du Valais. Certains créanciers réclamaient que l'État — le canton, donc — vienne à leur secours dans le cadre d'un «bail-out», a savoir une action de sauvetage. Les contribuables cantonaux n'ont pas à assumer les dettes créées par une commune devenue insolvable, a tranché la plus haute juridiction du pays.