Cadeau fiscal déguisé pour les armateurs?
Ce projet de taxe du Conseil fédéral fait tiquer la gauche et certains bourgeois

Imposer les compagnies maritimes sur leur capacité de transport plutôt que sur leurs bénéfices? C'est le projet de taxe au tonnage défendu par le gouvernement. Pour la gauche (et certains bourgeois), cette modification est injustifiée.
Publié: 13.12.2022 à 21:36 heures
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Dernière mise à jour: 13.12.2022 à 21:46 heures
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Fondateur de MSC, Gianluigi Aponte a vu sa fortune et celle de sa famille augmenter de 11 milliards en 2021. La pandémie de Covid-19 a fait exploser les bénéfices dans le secteur du fret. Sa flotte atteint les 700 navires.
Photo: AFP/Getty Images
Thomas Schlittler

Le futur s’annonce radieux pour la famille d’armateurs Aponte. Pas seulement parce que les propriétaires de la Mediterranean Shipping Company (MSC), dont le siège est à Genève, ont vu leur fortune augmenter de 11 milliards de francs cette année pour atteindre les 19 à 20 milliards. Mais aussi parce que le Parlement évoque l’idée d’un cadeau fiscal substantiel pour tous les propriétaires de bateaux basés en Suisse.

À l’avenir, les acteurs du secteur ne devraient plus payer leurs impôts sur la base de leurs bénéfices, mais sur la base des capacités de transport de leur flotte. Une aubaine pour la famille de Gianluigi Aponte, le fondateur de l’empire familial.

«Aucune raison compréhensible» pour cette modification

Cette modification de taxe en fonction du tonnage et non plus en fonction des bénéfices, est présentée par le Conseil fédéral comme un «instrument de promotion de la navigation maritime». Mais l’année dernière, une telle réglementation aurait tout simplement permis aux armateurs d’économiser des millions d’euros d’impôts. Contrairement à leurs bénéfices, leurs capacités de transport, elles, n’ont pas évolué.

Mi-novembre, la commission de l’économie du Conseil national s’est malgré tout prononcée en faveur de l’introduction de cette taxe au tonnage. La gauche, logiquement, s’est opposée à la mesure. Mais elle n’était pas seule! Certains membres du camp bourgeois, comme Jürg Grossen ont aussi fait part de leur désaccord.

Pour le président des Vert’libéraux, il n’y a «aucune raison compréhensible» pour que les compagnies maritimes ne soient plus imposées en fonction de leur bénéfice, mais en fonction de leur capacité de chargement. «Un tel régime d’exception est absolument arbitraire», dénonce le Bernois.

Un cadeau pour le PS et les Verts

D'après Jürg Grossen, le seul élément qui pourrait justifier la taxe au tonnage est celui de s’aligner sur l’Union européenne (UE). Cette dernière a déjà introduit un tel régime fiscal. «Mais ce n’est pas un bon argument. Je crains que les électeurs ne rejettent dans les urnes ce cadeau fiscal pour les riches armateurs.»

Le président des Vert’libéraux rappelle que la gauche a déjà empêché la suppression de l’impôt anticipé et du droit de timbre par un référendum. «Il en sera de même pour ce projet fiscal, qui a manifestement été commandé par l’économie», prédit le politicien.

Le Vert’libéral fait remarquer que ce serait un cadeau pour le PS et les Verts si le Parlement acceptait cette évolution fiscale: «Et cela en pleine année électorale!» Le futur du projet (et des bonnes affaires de la famille Aponte) devrait déjà s’esquisser la semaine prochaine, lorsque le Conseil national examinera la mise en place de cette taxe au tonnage.

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