Non, vous n'êtes pas dans la suite de luxe d'un grand hôtel distingué, mais à bord d'un bateau. Pas n'importe lequel, certes: il s'agit du yacht Greenline 48 Fly. Autour de vous, beaucoup de bois et de cuir dans des tons chauds caractérisent l'intérieur confortable et vous donnent immédiatement une sensation de bien-être. Cette impression est renforcée par un salon stylé, une cuisine avec bar et barbecue, ainsi que toutes les commodités dont vous pourriez avoir besoin, jusqu'au refroidisseur de vin.
La cabine principale, qui s'étend sur toute la largeur du bateau, séduit par son très grand lit, son concept d'éclairage discret, ses armoires hautes et sa salle de bain privée. Grâce aux cabines d'invités spacieuses – également équipées de salles de bains séparées – et aux larges espaces de rangement pour effets personnels, le yacht à moteur hybride d'une longueur totale de 15,44 mètres s'adresse non seulement aux couples, mais aussi aux familles plus nombreuses. Autre point fort: depuis le grand salon inondé de lumière, avec visibilité panoramique à 360 degrés, la vue sur l'étendue du lac est imprenable.
L'idylle et le luxe ont un prix. Pour un yacht dans le style du Greenline, il faut rapidement débourser 900'000 francs – voire nettement plus. En comparaison avec une villa de vacances avec vue sur un lac suisse, cette somme semble presque modeste. Dans notre pays, de plus en plus de personnes semblent découvrir les avantages d'une maison flottante. Et ils ne veulent pas jeter l'ancre devant Monaco ou Saint-Tropez, mais plutôt dans les eaux proches de chez eux.
La raison en est simple: «Il s'agit souvent d'hommes et de femmes d'affaires disposant d'un budget-temps limité», explique Yves Bosshart, directeur du prestataire de services nautiques Pro Nautik, basé à Romanshorn, en Thurgovie. Les propriétaires veulent utiliser leurs yachts régulièrement, passer les week-ends sur le lac avec leur famille – et apprécient donc un court temps de trajet. «Souvent, les enfants ont déjà passé l'après-midi à bord avant que le dernier membre de la famille ne les rejoigne le soir et qu'ils naviguent ensuite ensemble sur le lac», explique l'entrepreneur. Les acheteurs sont généralement des individus fortunés, fans de sports nautiques, ou des particuliers qui souhaitent passer un moment agréable et tranquille sur l'eau. Le prestige généralement associé à la possession d'un yacht est bien moins important que l'utilisation régulière du bateau. «Celui qui ne cherche que l'attention opte plutôt pour un bateau en mer», explique Yves Bosshart.
Le marché des bateaux à moteurs est en plein boom
La tendance est bien réelle: le nombre de bateaux à moteur sur les eaux helvétiques a nettement augmenté ces dernières années. La pandémie de Covid-19 a notamment contribué au véritable boom dont profite la branche depuis quelques années – et qui ne montre aucun signe de déclin. Alors qu'en 2014, après la récente harmonisation des chiffres sur l'ensemble des cantons, 61'573 bateaux étaient autorisés à naviguer sur les lacs suisses selon l'Office fédéral de la statistique, ce chiffre est passé depuis à 64'845, ce qui correspond à une augmentation de plus de 5%.
La croissance est principalement limitée par le manque de places dans les ports ou sur les bouées. Celles-ci sont une denrée rare – pas seulement depuis la crise sanitaire – et il n'est pas impossible de devoir attendre plusieurs années pour obtenir l'une des places d'amarrage recherchées. Les experts en sont convaincus: la hausse aurait été nettement plus importante sans cette limitation. La croissance marquée du nombre de bateaux à moteur s'est donc principalement faite au détriment des voiliers, dont le nombre a diminué de plus de 3000 embarcations.
Mais il faut déjà prendre son mal en patience bien avant de s'inquiéter de trouver un emplacement pour son bateau: selon le fabricant et la taille de l'appareil, plusieurs années s'écoulent entre l'achat et la livraison. Cela est dû d'une part au boom déclenché par la pandémie, et d'autre part aux difficultés de livraison à l'international qui ont encore allongé les délais.
Ceux qui ne veulent pas attendre se tournent donc vers le marché de l'occasion. En conséquence, les prix y ont grimpé en flèche, ce qui a parfois conduit à l'apparition d'offres surfaites sur le marché. «Tous les yachts ne valent pas le prix qu'on leur prête aujourd'hui», avertit Yves Bosshart.
Le luxe comme argument de vente
Les longs délais d'attente, pouvant s'étendre jusqu'à trois ans pour un nouveau yacht, sont également un sujet de préoccupation pour Renato Hammer, chef d'un chantier naval près de Locarno. Dans ce contexte, il a constaté un intérêt accru pour l'achat, surtout dans le segment haut de gamme. «Le luxe est un argument de vente important. Les gens recherchent le confort», dit-il. Parmi sa clientèle, on compte beaucoup de Suisses allemands d'un certain âge, dont certains sont déjà propriétaires de leur maison dans le canton italophone réputé pour son ensoleillement exceptionnel. Ces retraités veulent passer leurs week-ends au Tessin – en particulier par beau temps – sur le lac Majeur.
Un Absolute Navetta 52 d'une longueur de près de 16 mètres, proposé par Renato Hammer pour 1,45 million d'euros, leur offre le luxe recherché. «Au Tessin, on ne trouve de pareils yachts ailleurs que sur le lac Majeur, les autres plans d'eau étant trop petits pour cela», explique le constructeur nautique. A l'avenir, il devrait y en avoir encore un peu plus. En 2025, 280 nouvelles places d'amarrage très convoitées seront disponibles à San Nazzaro, sur les rives du «Lago Maggiore». Une aubaine pour le chantier naval de Renato Hammer, qui ne peut toutefois espérer obtenir que cinq à dix nouvelles places au vu de la forte demande.
C'est un yacht encore plus grand que le Navetta 52 que Cornelius Kistler a lancé sur les eaux locales il y a tout juste deux ans. Avec ses 20 mètres de long et ses quelque 5 mètres de large – le tout pour un prix d'un peu plus de 2 millions de francs – le Sunseeker Manhatten 60 dépasse la plupart des autres bateaux de plaisance du pays. Pour le déplacer en Suisse centrale, un transport lourd avec un itinéraire spécial a été nécessaire. Désormais, le yacht jette l'ancre sur le lac des Quatre-Cantons, en raison des grandes places de bateaux et des chantiers navals modernes qui agrémente le plan d'eau. «Au final, lors de l'achat d'un yacht pour les lacs helvétiques, beaucoup de choses dépendent du lieu d'amarrage – et bien sûr aussi de ses propres exigences et de sa fortune», explique le courtier en yachts et fondateur de Breezeyachting.swiss.
Les exemplaires comme le Sunseeker Manhatten 60 sont donc rares en Suisse. La grande majorité des yachts ont une longueur d'environ 40 pieds, c'est-à-dire 15 mètres. «Pour ces bateaux, il existe en Suisse, sur pratiquement tous les lacs, suffisamment de chantiers navals qui peuvent s'occuper de leur entretien», explique Cornelius Kistler. La condition préalable est toutefois qu'une place d'amarrage soit disponible. C'est pourquoi lui et de nombreux autres prestataires de services nautiques essaient de trouver une place d'amarrage en même temps que la vente d'un bateau.
Flexibilité et liberté
Un yacht comme le Sunseeker est une maison de vacances flottante, à une différence près: on n'est pas lié à un emplacement fixe, du moins temporairement. «On peut en fait jeter l'ancre où l'on veut, tout en ayant toujours la plus belle vue sur le lac», s'enthousiasme Cornelius Kistler. Même des séjours prolongés sur le bateau sont possibles sans problème, bien qu'une résidence fixe sur une embarcation ne soit pas autorisée dans notre pays. Le courtier en bateaux est convaincu que le prestige joue en effet un rôle chez certains clients et clientes. Mais le plaisir de naviguer, la passion pour les bateaux et la liberté qui en découle sont plus décisifs selon lui.
Celui qui veut être le plus flexible possible devrait donc en tenir compte lors de l'achat d'un yacht. «Plus les bateaux sont grands, moins il y a de places d'amarrage pour les invités», relève Yves Bosshart de Pro Nautik. Si quelqu'un veut utiliser son yacht principalement comme maison de vacances flottante ou l'achète comme île de baignade pour pratiquer des sports nautiques, il peut prévoir plus grand. Dans le cas contraire, il vaut mieux se limiter un peu, sinon l'entrée dans de nombreux petits ports est impossible.
C'est notamment le cas du lac de Constance, qui est connu des propriétaires de yachts comme un véritable lac de camping. Grâce au grand nombre de places d'accueil, il est possible de se rendre vers les destinations les plus diverses, et un circuit d'un embarcadère à l'autre apporte la variété souhaitée à la croisière. Toutefois, des normes plus strictes en matière de gaz d'échappement s'appliquent également à ces eaux. Des investissements supplémentaires dans les yachts peuvent donc être nécessaires pour obtenir une autorisation de navigation sur le lac de Constance. Les circuits sont donc plus simples sur le lac des Quatre-Cantons ou le lac Majeur, tandis que les embarcadères du lac Léman sont plutôt conçus pour les petits bateaux.
Chaque lac a sa propre culture
«Sur le lac de Zurich aussi, les excursions de port en port sont très appréciées. De toute façon, chaque lac dispose en fait de sa propre culture de la navigation», remarque Björn Hensler, propriétaire et directeur du chantier naval Hensa à Altendorf, sur l'Obersee (le plus grand des deux lacs composant le lac de Constance). Sur le lac des Quatre-Cantons, par exemple, certains yachts fonctionnent également en hiver, afin de pouvoir rejoindre les pistes de ski de la région.
Ailleurs, ils sont plutôt utilisés le week-end comme lieu de retraite pour la famille ou, depuis la pandémie, comme boat-office flottant. Et bien sûr, les fêtes arrosées entre amis sur l'eau sont également très appréciées – avec une restriction importante: le capitaine du bateau, au moins, ne doit pas consommer d'alcool en excès, car il doit pouvoir maîtriser le bateau à tout moment en cas d'urgence. «Quelle que soit la manière dont les bateaux sont utilisés au final: ce qui est décisif, c'est qu'ils soient effectivement utilisés», affirme Björn Hensler avec conviction.
Et pour cause, les frais annexes d'un yacht ne doivent pas être sous-estimés. Rien que pour l'entretien du bateau, les travaux de maintenance réguliers, l'hivernage à terre dans un chantier naval ou la location d'une place d'amarrage, il faut compter rapidement 5 à 8% de la valeur d'achat. S'y ajoutent, selon le mode d'utilisation, les frais de carburant.
Mais ces dépenses sont vite oubliées lorsque l'on sort sur le lac, haut perché sur le flybridge, par une agréable brise, et que l'on peut admirer le coucher de soleil se refléter sur les eaux cristallines du lac.