L'initiative pour la démocratie risque de s'essouffler dans sa dernière ligne droite. La faute aux arnaques aux signatures, soutient le comité initiant. Pour rappel, des entreprises commerciales auraient falsifié des milliers de signatures pour des initiatives populaires, révélait début septembre une enquête du «Tages-Anzeiger».
«Le mois dernier, nous avons récolté deux fois moins de signatures en comparaison avec la même période de l'année précédente», explique Arbër Bullakaj, coprésident d'Aktion Vierviertel. L'association a lancé en mai 2023 une initiative qui veut permettre au quart de la population suisse non naturalisée d'obtenir la nationalité, après avoir séjourné cinq ans dans le pays.
Fin juillet, le comité tirait déjà la sonnette d'alarme: il lui manquait environ 30'000 signatures. Et le temps presse, car le délai de collecte expire en novembre.
Les passants coupent court à la discussion
Après un mois d'août prometteur, les choses se gâtent aujourd'hui. La fraude électorale présumée a ébranlé la confiance des électeurs. «Nous aurions dépassé notre objectif depuis longtemps si cela n'était pas arrivé», estime Arbër Bullakaj.
D'autres initiatives populaires sont aussi affectées par la situation. «Les deux premières semaines de septembre ont été terribles», raconte Elias Vogt, président de l'association Paysage Libre Suisse, qui se bat contre les éoliennes à travers deux initiatives. De nombreux passants auraient coupé court aux discussions dès le début, sans signer les initiatives: «Nous avons récolté environ 2000 signatures de moins que la norme.» Mais Paysage Libre Suisse refuse de rester les bras croisés: sur les hoodies, les stands, les affiches et les remorques, les logos de la cause sont désormais bien visibles. «Ainsi, les gens savent clairement qui est derrière l'initiative», explique Elias Vogt.
Du côté des grands partis, l'inquiétude est plus mesurée. «Nous observons plus de méfiance dans la rue», déclare Rahel Estermann, secrétaire générale des Vert-e-s. Le parti collecte actuellement des fonds pour son initiative solaire. Mais la situation est loin d'être aussi grave que pour le comité Aktion Vierviertel ou les opposants aux éoliennes. «Tout se passe bien. L'intérêt de la population pour cette cause est toujours aussi important», affirme Rahel Estermann.
Les grands partis inspirent plus confiance
La Verte a son idée sur la raison pour laquelle les choses se passent mieux pour son parti: «Chez nous, les collecteurs et collectrices de signatures sont généralement reconnaissables comme membres de notre parti. Les gens savent que nous ne payons pas pour les signatures». La population ne soupçonne pas non plus que des entreprises douteuses soient impliquées dans la récolte des signatures. C'est en revanche plus difficile pour les initiatives indépendantes des partis.
L'Union démocratique du centre (UDC) se fait encore moins de souci. Son initiative sur la protection des frontières est sur la bonne voie. «Comme nous avons une base très motivée, la collecte ne pose aucun problème», explique la porte-parole Andrea Sommer.
Quasiment plus de bénévoles
Pour Arbër Bullakaj, les difficultés auxquelles font face les comités indépendants des partis illustrent la problématique du budget: «Les collecteurs de signatures bénévoles, comme nous, n'existent presque plus». Souvent, on se mobilise par le biais d'annonces et d'appels aux membres. C'est pourquoi l'initiative pour la démocratie souffre davantage du scepticisme de la population.
Elias Vogt abonde dans son sens, et d'ajouter: «Les groupes d'intérêts qui ont travaillé jusqu'à présent avec des signatures payées en souffrent encore beaucoup plus». Mais ils ne voudraient probablement pas l'admettre. Il explique être en contact régulier avec la Chancellerie fédérale. Une table ronde doit avoir lieu fin octobre avec les partis, les associations, les comités, les organisations de collecte et les autorités.
Pour réussir à déposer l'initiative pour la démocratie, Arbër Bullakaj et son comité devraient obtenir les signatures manquantes d'ici là.