La route de l'Axen, creusée dans la roche, qui longe la rive est du lac d'Uri de Brunnen à Flüelen, est l'une des routes les plus dangereuses de Suisse. Depuis son ouverture en 1865, cet axe de transit transalpin est le théâtre d'accidents de la route et de catastrophes naturelles.
Au cours des dernières décennies, la Confédération a investi des millions de francs dans des tunnels et des galeries, des améliorations de la chaussée et des systèmes d'alarme. Pourtant, il n'existe pratiquement aucune mesure de sécurité, notamment au Wolfensprung («saut de loup»), où un SUV a percuté dimanche une mince barrière avant de chuter de 50 mètres dans le lac.
Une violente bataille judiciaire
Les autorités sont conscientes du danger. Mais comme le rapporte la «NZZ,» une violente dispute fait rage depuis de nombreuses années sur la manière de rendre plus sûr cet endroit névralgique du réseau des routes nationales.
En 1970 déjà, il y a plus d'un demi-siècle, la Confédération a chargé les cantons de Schwytz et d'Uri d'aménager une nouvelle Axenstrasse. Un projet concret est sur la table depuis 2014: deux nouveaux tunnels doivent être construits près de Sisikon et de Morschach. Le lieu de l'accident au Wolfsprung sera à l'avenir contourné par la montagne.
Le hic: voilà huit ans que le projet est entre les mains... des tribunaux. Dans l'intervalle, les travaux n'ont jamais vraiment démarré, bien que les parlements cantonaux de Schwyz et d'Uri aient approuvé le projet. Les Schwytzois ont également clairement rejeté une initiative qui demandait une votation populaire cantonale sur l'Axenstrasse.
Attendre la décision du tribunal
La raison pour laquelle la sécurisation de l'Axenstrasse est un tel imbroglio: plusieurs organisations environnementales ont déposé une opposition contre le tronçon.
L'Initiative des Alpes ainsi que les sections uranaise et schwytzoise de l'Association Transport et environnement (ATE) se plaignent parce que le Département de l'environnement, des transports et de l'énergie (Detec) a autorisé la construction du nouveau tronçon à proprement parler, mais pas les mesures d'accompagnement sur l'Axenstrasse existante.
Les plaignants craignent une augmentation du trafic sur cet axe nord-sud, ce qui saperait la protection des Alpes ancrée dans la Constitution.
Le département de la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga a accepté de revoir les mesures du projet. Cela ne suffit pas aux organisations environnementales. Un recours contre la décision d'approbation des plans est en suspens auprès du Tribunal administratif fédéral depuis juin 2020. Depuis, les parties concernées attendent la décision du tribunal.
«C'est la faute de la justice»
Du côté des organisations environnementales, on pointe du doigt la justice, accusée de faire traîner le dossier et donc de maintenir l'Axenstrasse dans sa version dangereuse. «Ce ne sont pas les organisations environnementales qui sont responsables des retards de la nouvelle Axenstrasse, mais les tribunaux», se défend Alf Arnold, de l'ATE Uri, dans la «NZZ».
Les premiers travaux ont tout de même commencé, pour un pont de secours temporaire dans la zone particulièrement menacée de Gumpisch. Des rochers y glissent souvent, ce qui déclenche la fermeture automatique de la route au moyen de feux de signalisation.
L'ensemble de l'Axenstrasse ne sera pas plus sûr avant neuf ans au plus tôt. Il faudra attendre au moins 2031 pour que le saut de loup et d'autres endroits dangereux disparaissent. À condition qu'il y ait bien des travaux...
Alors que l'on pensait autrefois que le nouveau tronçon serait mis en service en 2024, on espère désormais que les travaux commenceront en 2023, comme l'a déclaré l'ingénieur cantonal schwytzois Daniel Kassubek à Blick. Mais cela paraît bien illusoire.