«Nous ne savons pas comment payer ces 9000 francs. Même notre protection juridique n’a pas pu nous aider», soupire Mike Z.*, 33 ans. Il tient la main d’Alba J.*, 27 ans. Le jeune couple bernois se lance des regards désespérés. Devant eux, une facture salée à la suite d’une opération.
Alba J. souffre d’endométriose – une des pathologies abdominales les plus fréquentes de l'utérus. Selon Tina Bernardi, spécialiste en gynécologie, environ une femme sur dix en est atteinte. La maladie est souvent mal diagnostiquée, de manière tardive, voire pas du tout. Le parcours d’Alba J. illustre ces difficultés: «Depuis l’âge de 12 ans, j’ai de fortes douleurs abdominales pendant les règles, mais parfois aussi au-delà.» Ses douleurs sont à peine supportables: «C’est comme si quelqu’un vous plantait un couteau dans le ventre. Et le pire, c’est que les analgésiques sont inefficaces contre cela.»
«Le mot endométriose n’a jamais été prononcé»
La Bernoise a consulté à plusieurs reprises: «Mais on m’a cataloguée comme douillette et on ne m’a pas prise au sérieux.» Les médecins lui ont répété qu’il s’agissait de douleurs menstruelles normales. Le diagnostic d’endométriose n’a jamais été posé.
En 2021, l’ancienne employée de commerce de détail apprend l’existence de la maladie en faisant ses propres recherches sur Internet. Elle décide d’en parler avec sa gynécologue. En juin 2021, elle subit une laparoscopie. L’opération est le seul moyen pour confirmer un diagnostic d’endométriose. Résultat: Alba J. souffre bel et bien de la maladie. Mais le chemin de croix ne se termine pas là.
«En 2018, nous avons changé de caisse-maladie. Assura, notre nouvelle caisse-maladie, ne veut pas prendre en charge une partie des frais d’hospitalisation», explique Mike Z., le partenaire d’Alba. Lors du changement de contrat, ils ont pris une assurance complémentaire hospitalisation semi-privée. Or, ce sont précisément ces prestations qu’Assura ne veut pas rembourser.
Questionnaire rempli «de manière non conforme»
Du point de vue d’Assura, Alba J. n’a pas rempli le questionnaire de manière conforme à la vérité lors du changement de caisse. «En 2018, Madame J. avait déjà suivi un traitement médical pour des douleurs abdominales», explique un porte-parole de la caisse-maladie à Blick. Elle aurait dû l’indiquer sur le questionnaire d’admission à l’assurance complémentaire, même si les douleurs n’avaient pas fait l’objet d’un diagnostic médical.
«Je n’y ai pas pensé quand j’ai rempli le questionnaire, car on m’avait toujours dit qu’il s’agissait de douleurs menstruelles habituelles, s’indigne Alba J. J’aurais été contente de savoir de quoi je souffrais quand j’ai changé de caisse maladie. Depuis que j’ai eu mes premières règles, j’ai dû vivre avec la certitude que ces douleurs infernales étaient normales et que j’étais simplement très sensible.»
La caisse-maladie ne veut pas entrer en matière
Résultat: le couple ne recevra pas de soutien de la part de leur caisse-maladie pour payer la facture de plus de 9000 francs. Selon l’expert juridique André Kuhn, Assura est probablement dans son droit. La personne devant consulter un médecin pour des douleurs abdominales doit le signaler en cas de changement de caisse: «De plus, ces douleurs étaient toujours présentes après le traitement. Pour cette raison, l’objection de la nouvelle caisse maladie est compréhensible. Alba J. aurait dû savoir qu’il fallait signaler à la nouvelle caisse maladie les fortes douleurs persistantes après traitement.» Un diagnostic n’est pas nécessaire à cet effet.
En clair, le simple fait de soupçonner d’avoir l’endométriose suffit pour que l’assurance complémentaire émette une réserve si cette maladie finit par être diagnostiquée. De manière générale, André Kuhn conseille «de conclure les assurances complémentaires le plus tôt possible».
La ruine les menace-t-elle?
Cette leçon arrive trop tard pour le couple bernois. Ils sont désespérés. «Nous ne sommes plus partis en vacances depuis 2019 et je fais beaucoup d’heures supplémentaires pour pouvoir compenser le fait qu’elle ne peut plus travailler qu’à 60% pour des raisons de santé», explique Mike Z. «Et que se passera-t-il si je dois me faire opérer à nouveau? J’ai vraiment peur que ma maladie nous mène à la ruine», s’inquiète sa compagne.
Sollicitée par Blick, Assura confirme exclure définitivement toute possibilité de prise en charge des coûts survenus par l’opération. En lieu et place, elle conseille au couple de conclure un accord de paiement échelonné avec l’hôpital.
*Les noms ont été modifiés