Ce sont les partis et le Parlement qui ont mis le Conseil fédéral sous pression au début de l’invasion russe. Aujourd’hui, le pays a clairement pris position: il soutient désormais la plupart des sanctions contre Moscou. Il y a deux semaines, la présidente du Conseil national, Irène Kälin, s’est même rendue à Kiev. À l'exception de l’UDC, les politiques suisses sont aujourd'hui largement d'accord pour dire que la neutralité ne doit pas servir d’alibi pour se tenir à l’écart de cette affaire d’envergure.
Incompréhensions dans les tribunes
La scène qui s’est déroulée mardi dernier dans la salle du Conseil national en est d’autant plus étonnante. En effet, Sahiba Gafarova, présidente de l’Assemblée nationale azerbaïdjanaise, était invitée au Palais fédéral, ce qui en a réjoui plus d’un. «Cette année, la Suisse et l’Azerbaïdjan fêtent le trentième anniversaire de leurs relations diplomatiques. C’est un honneur de vous recevoir, Madame Gafarova, ainsi que votre délégation, ici, à Berne», a déclaré Irène Kälin. Après ces quelques mots de bienvenue, les conseillers nationaux présents se sont levés pour une standing ovation.
L'Azerbaïdjan accusé de crimes de guerre
Des applaudissements pour l’Azerbaïdjan? Il y a moins de deux ans, cet État au régime autoritaire menait une campagne contre les Arméniens du Haut-Karabakh. Une propagande qui a eu des conséquences désastreuses: des milliers de gens sont morts et les experts parlent même de crimes de guerre.
«Je n’étais pas dans la salle à ce moment-là. Mais ce qui est sûr, c'est que je ne me serais certainement pas levé», déclare le conseiller national soleurois du Centre Stefan Müller-Altermatt.
Selon lui, il était tout à fait nécessaire qu’Irène Kälin se rende à Kiev et que la Suisse condamne l'invasion menée par la Russie. «Mais le Parlement ne devrait pas non plus balayer d’un revers de main la guerre menée par l’Azerbaïdjan contre la population du Haut-Karabakh», précise le politicien, avant d’ajouter: «Des villes ont été ravagées par les bombes. Les représentants d’un régime qui commet de tels actes n’ont strictement rien à faire à Berne ou alors ils devraient être condamnés aussi sévèrement que la Russie.»
Maintenir le dialogue
De son côté, Irène Kälin rappelle que l’invitation avait déjà été lancée en 2019, lorsque Jean-René Fournier (PDC/VS), alors président du Conseil des États, s’était rendu à Bakou. «La visite a été repoussée à cause de la pandémie. Elle a donc eu lieu pendant mon mandat», précise-t-elle.
Pour la politicienne, il vaut mieux entretenir le dialogue et aborder les points critiques lors d’un entretien direct plutôt que de refuser une visite. «Malgré tous les reproches justifiés, il faut garder en tête que depuis la fin de la guerre, il y a matière à se réjouir puisque les deux pays communiquent à nouveau.»
Pour les représentants de Bakou, la journée a été une réussite. La présidente de l’Assemblée nationale azerbaïdjanaise a également rencontré le président du Conseil des États, Thomas Hefti (PLR/ZH), et même le conseiller fédéral Alain Berset (PS/FR).
(Adaptation par Valentina San Martin)