Albert Rösti est sous tension. Le 9 juin, la Suisse votera la nouvelle loi sur l'électricité. Il s'agit entre autres de rendre le solaire obligatoire pour les nouvelles constructions, de faciliter les autorisations pour les projets hydroélectriques et de créer une réserve hivernale.
«Nous avons besoin de plus d'électricité, beaucoup plus d'électricité!», a déclaré Albert Rösti lors du lancement de la campagne de votation. Il se bat pour la loi, à l'élaboration de laquelle il était encore fortement impliqué en tant que conseiller national. Mais que signifie «beaucoup plus»? Blick montre exactement ce qui attend la Suisse et comment elle se positionne actuellement en matière d'énergie renouvelable.
Sur la loi sur l'électricité
D'où vient l'électricité qui sort de la prise?
Deux tiers des 56 térawattheures d'électricité que nous consommons chaque année proviennent de l'énergie hydraulique. Les trois quarts sont produits en Suisse, dans des centrales avec des lacs d'accumulation ainsi que dans des centrales au fil de l'eau sur les fleuves. La majeure partie de l'énergie renouvelable restante est fournie par des panneaux solaires.
À quel point l'électricité suisse est-elle verte?
Il n'y a pas que l'électricité suisse qui sort de nos prises. Si l'on ne considère que l'électricité produite en Suisse, l'énergie hydraulique représente un peu plus de 50% du mix de production. Les centrales nucléaires fournissent plus d'un tiers de l'électricité. 9% de l'électricité provient d'autres sources d'énergie renouvelables, principalement l'énergie solaire.
Celle-ci est en plein essor. L'année dernière, la production d'énergie solaire a augmenté de 36% par rapport à 2022. Cette année, la part de l'énergie solaire devrait franchir pour la première fois la barre des 10%.
Comment nous situons-nous par rapport à l'étranger?
Malgré le boom du solaire, la Suisse est à la traîne en comparaion à la plupart des autres pays européens en matière de transition énergétique. Dans l'UE, la part des énergies renouvelables a doublé au cours des dix dernières années, avec un développement particulier de l'énergie éolienne et solaire.
La France, en revanche, est un pays d'électricité nucléaire, tandis que l'Italie mise surtout sur le gaz naturel. En Autriche, plus de 80% de l'électricité produite est verte — mais si l'on tient compte de l'électricité importée, la part des énergies renouvelables dans la consommation d'électricité correspond à un bon tiers.
Quel chemin politique souhaite-t-on emprunter?
La loi sur l'électricité qui sera soumise aux urnes le 9 juin prochain fixe différents objectifs de développement. D'ici 2035, les énergies renouvelables (à l'exception de l'énergie hydraulique) devront fournir 35 térawattheures d'électricité, principalement grâce aux panneaux solaires installés sur les toits et les façades. C'est presque six fois plus d'énergie que ce que les panneaux électriques, les éoliennes et autres installations fournissent aujourd'hui. D'ici 2050, ce chiffre devrait atteindre 45 TWh. Pour atteindre cet objectif, la construction de nouvelles installations solaires doit être massivement accélérée.
La loi accorde en outre une attention particulière à la production d'électricité durant le semestre d'hiver. Durant les mois froids, l'électricité suisse ne suffit généralement pas à couvrir les besoins. Plus la part des énergies renouvelables est importante, plus le déficit hivernal est grand, car le photovoltaïque connaît justement d'importantes variations saisonnières. Pour réduire la dépendance vis-à-vis de l'étranger, la production d'électricité en hiver doit être augmentée de 6 TWh d'ici 2040. Avec autant d'électricité en plus, on aurait pu se passer d'exportations la plupart du temps au cours des hivers précédents. Mais la consommation d'électricité augmente.
Qui consomme le plus d'électricité?
Un bon tiers de la consommation d'électricité est imputable aux ménages. Entre 2000 et 2020, la consommation des ménages a augmenté en moyenne de 1% par an. La raison? la croissance démographique. Ces dernières années, la consommation d'électricité s'est stabilisée, ce qui s'explique par l'efficacité énergétique croissante des lave-linge, fours, téléviseurs et autres appareils. La consommation par habitant a baissé.
Dans les années à venir, la demande en électricité devrait continuer à baisser. D'ici 2035, l'objectif fixé par la loi sur l'électricité est de réduire la consommation par habitant de 13% par rapport à l'an 2000. D'ici 2050, ce chiffre devrait encore être de 5%.
Les CFF sont d'ailleurs les plus gros consommateurs d'électricité en Suisse: près de 9% de l'électricité est destinée aux transports publics, dont une grande partie est nécessaire à l'exploitation du réseau ferroviaire. La majorité de l'énergie nécessaire provient des centrales hydroélectriques exploitées par les CFF.
Quelle sera l'ampleur de nos besoins futurs en électricité?
Des pompes à chaleur à la place des chauffages au mazout, des voitures électriques à la place des voitures à essence: comme la Suisse veut s'affranchir des énergies fossiles, les besoins en électricité augmenteront massivement au cours des prochaines années et décennies. À cela s'ajoute la fin de l'énergie nucléaire: un tiers de la production d'électricité locale disparaîtra et devra être remplacé. Cela entraînera une augmentation des importations jusqu'à ce que les énergies renouvelables soient suffisamment développées pour combler le manque.
D'ici 2050, la Suisse devrait avoir besoin de 25 à 40% d'électricité en plus, selon les scénarios, comme le montre une étude. 80 à 90 térawattheures devraient être nécessaires d'ici là. Cela représente environ 20 TWh de plus qu'aujourd'hui.
Même si le développement des énergies renouvelables se poursuit comme prévu et que l'on essaie d'économiser de l'électricité, la politique énergétique suisse devra faire face à d'énormes défis au cours des prochaines décennies.