Accompagnement psychologique insuffisant
Les cantons peinent à aider les réfugiés mineurs tombés dans la drogue

Les cantons sont dépassés par l'hébergement et l'encadrement des demandeurs d'asile mineurs. Pour oublier leurs soucis, certains jeunes se droguent et causent des problèmes. Un procureur au tribunal des mineurs raconte.
Publié: 28.07.2024 à 20:05 heures
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De plus en plus d'enfants demandent à être protégés par la Suisse. Plus de 3000 mineurs non accompagnés ont déposé une demande d'asile l'année dernière.
Photo: Keystone
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Sophie Reinhardt

Il y a une semaine, un Afghan de 16 ans a attaqué sans scrupule la Migros de Kollbrunn (ZH). Une vidéo montre comment l'adolescent donne des coups de pied et de poing dans la caisse, tandis qu'il est retenu par la vendeuse. Peu après, il a été arrêté et entre-temps transféré dans un établissement fermé.

Les recherches de Blick ont montré que l'Afghan est admis en Suisse à titre provisoire. Il est arrivé dans le pays en tant que jeune requérant d'asile sans famille, mais avec de l'espoir dans ses bagages.

Le nombre de ces demandeurs d'asile mineurs non accompagnés a fortement augmenté au cours des deux dernières années. Une demande d'asile sur dix émane désormais d'un mineur qui a pris la fuite seul ou qui a perdu ses compagnons dans sa fuite. L'année dernière, 3271 mineurs non accompagnés ont déposé une demande d'asile dans notre pays. C'est un nouveau record. Dix ans auparavant, ils étaient 350.

Les cantons, mais aussi la justice, ont fort à faire pour encadrer les requérants d'asile mineurs de manière adaptée aux enfants. Ils ont besoin d'éducation, d'intégration et d'aide pour lutter contre la solitude et le mal du pays. Cependant, les nombreuses demandes d'asile font que les cantons, qui sont responsables de l'encadrement, ne remplissent pas toujours cette tâche.

Soulager la peur avec des drogues

Tout récemment, une enquête de la Conférence des directrices et directeurs cantonaux des affaires sociales a montré que la situation était tendue. Six cantons ont indiqué que chez eux, la situation était difficilement gérable, comme l'ont récemment rapporté les journaux de CH Media. Onze cantons ont indiqué que la situation était difficile et tendue. Seuls six d'entre eux ont transmis que tout allait bien pour l'hébergement des requérants d'asile mineurs.

L'augmentation du nombre de demandes d'asile s'accompagne d'une augmentation du nombre de jeunes demandeurs d'asile qui deviennent criminels. Il n'existe toutefois pas de chiffres à l'échelle nationale. Mais le tribunal des mineurs de Bâle-Campagne confirme qu'il a été très demandé l'année dernière et ce printemps, comme le dit Lukas Baumgartner. Selon le directeur adjoint de l'autorité, ce sont surtout les jeunes requérants d'asile originaires des pays du Maghreb qui se sont fait remarquer par leur comportement criminel. Il y a eu des semaines où jusqu'à neuf jeunes ont été placés en détention.

Dans presque tous les cas, il s'agissait d'effractions dans des maisons ou des voitures pour acheter des stupéfiants avec l'argent volé. Un grand nombre de ces garçons a avoué essayer de refouler des expériences traumatisantes avec des médicaments et des drogues. «Certains ont raconté les expériences qu'ils ont vécues pendant leur fuite et ont évoqué la peur de la mort sur les bateaux de fortune en Méditerranée, ou encore des viols.»

«Lorsqu'ils sont sous ces médicaments obtenus illégalement, les jeunes, par ailleurs bien éduqués et d'attitude d'habitude décente, perdent alors presque toutes leurs inhibitions», explique le directeur adjoint du tribunal bâlois. Or, il n'existe que très peu de lieux où l'addiction de ces jeunes hommes – qui ne parlent souvent pas la langue du pays – pourrait être traitée de manière adéquate, poursuit Lukas Baumgartner.

Il manque des psychologues

Selon l'organisation d'aide aux réfugiés, le domaine de l'asile n'a pas assez de soutien psychologique et psychiatrique. L'explication viendrait notamment du manque de médecins spécialistes. «Cela concerne particulièrement les personnes vulnérables comme les mineurs non accompagnés», explique le porte-parole Lionel Walter.

Entre-temps, la situation s'est à nouveau à peu près calmée, selon le procureur des mineurs de Bâle-Campagne. Il est certain que cela est aussi lié au fait que le Secrétariat d'Etat aux migrations est plus attentif lors de la vérification de l'âge. «Avant, on nous présentait aussi beaucoup d'enfants et de jeunes délinquants que je considérais plutôt comme ayant la vingtaine.»

Une minorité pose problème

Près de 70% des enfants et adolescents non accompagnés qui ont déposé une demande d'asile dans notre pays en 2023 sont originaires d'Afghanistan. Une raison importante de ce chiffre élevé est que l'Afghanistan faisait partie des pays où les conditions de vie des enfants étaient les plus difficiles, fait savoir l'Organisation d'aide aux réfugiés à la demande de Blick.

«Le travail des enfants et le recrutement forcé sont très répandus, et de nombreux enfants n'ont pas accès à l'éducation. Il y a une augmentation massive des mariages forcés et du trafic d'organes.» Depuis la prise de pouvoir des talibans, la situation de l'ensemble de la population s'est drastiquement détériorée.

L'avocat des mineurs Lukas Baumgartner souligne que seule une petite partie des mineurs non accompagnés commet des délits. Selon lui, ce sont justement les réfugiés mineurs d'Afghanistan qui se comportent généralement de manière très exemplaire. «Ils savent souvent qu'ils ne pourront bien soutenir leur famille au pays que s'ils se construisent une bonne vie ici.» Et comme beaucoup d'Afghans sont conscients que la situation dans leur pays ne s'améliorera pas de sitôt, la plupart d'entre eux sont catégoriques: ils veulent rester en Suisse.

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