Le chiffre est dramatique: 37%! C'est l'écart de pension entre les hommes et les femmes retraités sur l'ensemble des trois piliers. Si la différence pour l'AVS n'est que de 3%, il y a un énorme fossé entre les genres concernant les caisses de pension. Les femmes y reçoivent en moyenne une rente inférieure de 63% à celle des hommes.
C'est ce que montre un rapport de l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS) à l'attention de la commission sociale du Conseil national, qui se penche actuellement sur la réforme de la prévoyance professionnelle (LPP). «L'écart entre les rentes totales s'explique principalement par les grandes différences entre les prestations de la prévoyance professionnelle», peut-on y lire. La situation ne s'est guère améliorée ces dernières années. Les hommes qui ont pris une nouvelle retraite en 2018 ont reçu environ 2800 francs par mois de la caisse de pension, alors que les femmes n'ont reçu que 1600 francs.
Les femmes ont des salaires plus bas
Cet écart s'explique par plusieurs raisons: Les femmes sont plus souvent employées dans des secteurs à bas salaires et à temps partiel. En tant que mères, beaucoup réduisent leur temps de travail, interrompent leur activité professionnelle ou se retirent complètement de la vie professionnelle. Cela a des conséquences négatives sur leur deuxième pilier. «La situation est dramatique: près d'un tiers des nouvelles retraitées n'ont pas de rente de caisse de pension», déclare la coprésidente du PS Mattea Meyer.
Les politiciens sont d'accord sur l'objectif, au-delà des frontières des partis: ils veulent combler - ou du moins réduire - l'écart entre les rentes des deux genres. Pour ce faire, le Conseil fédéral veut réduire de moitié la déduction dite «de coordination», à 12'445 francs. Avec une déduction plus faible, la masse salariale assurée dans le régime obligatoire LPP augmente. Ainsi, davantage de cotisations salariales sont versées à la prévoyance. Les salaires particulièrement bas ou les personnes travaillant à temps partiel ont ainsi plus de chances d'obtenir une rente de caisse de pension.
Supprimer la déduction de coordination?
Mais cela ne suffit pas à la conseillère nationale du Parti vert'libéral Melanie Mettler. Elle demande la suppression de la déduction de coordination. «Cela permettrait de résoudre plusieurs problèmes en même temps», affirme-t-elle avec conviction. Non seulement les bas salaires pourraient ainsi se constituer une meilleure retraite, mais aussi les personnes ayant plusieurs emplois. Car si la déduction de coordination est appliquée par chaque employeur, la masse salariale assurée diminue drastiquement.
C'est ce que montre un exemple de l'OFAS à partir d'un salaire annuel de 60'000 francs. Si on le reçoit d'un seul employeur, la rente de vieillesse s'élève à environ 12'000 francs. Si la masse salariale se répartit sur deux revenus de 40'000 et 20'000 francs, la rente tombe à environ 5200 francs. Et si quelqu'un a trois emplois à temps partiel à 20'000 francs chacun, il n'y a pas de rente du tout. «Le système actuel est axé sur le ménage traditionnel à un seul revenu. Cela ne correspond plus à la réalité sociale», déplore Melanie Mettler.
Le soutien à cette idée vient également des libéraux radicaux: «Nous avons promis de faire quelque chose pour les bas revenus et les personnes travaillant à temps partiel. Dans ce contexte, la suppression de la déduction de coordination est la meilleure solution», déclare la conseillère nationale PLR Regine Sauter.
L'UDC mise sur le modèle Asip
Une autre solution est sur la table avec une déduction en pourcentage sur les revenus respectifs. Le conseiller national UDC Thomas de Courten veut fixer la déduction de coordination à 60% du revenu, limitée à 21'300 francs au maximum. Il mise pour cela sur le modèle de l'association des caisses de pension Asip, ce qui détériorerait toutefois la situation des rentes par rapport au modèle du Conseil fédéral.
Le conseiller national du Centre Benjamin Roduit propose quant à lui une déduction de 40%. Les revenus jusqu'à 40'000 francs environ s'en sortiraient mieux que dans la proposition du Conseil fédéral. Les revenus supérieurs seraient moins bien lotis.
La gauche veut un compromis entre les partenaires sociaux
La gauche s'en tient fondamentalement au modèle du Conseil fédéral, afin de ne pas mettre en péril le compromis des partenaires sociaux, obtenu de haute lutte par les employeurs et les syndicats. «Une suppression complète de la déduction de coordination entraînerait des coûts beaucoup trop élevés, explique la conseillère nationale PS Mattea Meyer. Cela coûterait environ 1500 francs par an en raison de cotisations plus élevées - et ce pour toutes les personnes actives, indépendamment de leur salaire.»
Selon elle, cela représente une charge trop importante pour les personnes à bas revenus et les personnes travaillant à temps partiel. Elle mise en outre sur le supplément de rente de 100 à 200 francs proposé par le Conseil fédéral: «Celui-ci apporte une amélioration financée de manière solidaire.»
Bonifications pour tâches d'assistance
Le PS veut également améliorer les rentes des femmes d'une autre manière. «Le problème fondamental du deuxième pilier est que le travail d'assistance et de soins non rémunéré n'est pas reconnu comme formateur de rente», explique Mattea Meyer. Avec le projet actuel, le supplément de rente n'est accordé qu'aux personnes qui ont cotisé pendant quinze ans à la caisse de pension.
«Une fois de plus, les femmes qui travaillent à temps partiel et qui ont de bas salaires et ne sont donc pas assurées ne reçoivent rien», critique Mattea Meyer. C'est pourquoi son parti soutient la demande que les bonifications pour tâches d'assistance - c'est-à-dire pour les personnes qui s’occupent par exemple d’un proche en situation de handicap - soient prises en compte dans ces quinze années de cotisation nécessaires pour le 2e pilier: «Ainsi, les personnes concernées bénéficieront également du supplément de rente.»
La commission du Conseil national se penchera à nouveau sur le projet vendredi. Il s'agit en quelque sorte d'une première lecture avec des décisions provisoires. En fonction de l'issue, les politiciennes et politiciens voudront à nouveau se pencher sur ce sujet complexe. Les décisions définitives ne devraient être prises qu'après la prochaine pause estivale.
(Adaptation par Lliana Doudot)