Quand on parle de caisse-maladie, on pense souvent à l'augmentation des primes, aux grandes entreprises avec de nombreux employés et des salaires élevés pour la direction. Mais le secteur de la santé peut aussi être petit et efficace.
La caisse-maladie Lumneziana, dont le siège est à Lumnezia (GR), ne compte que 2571 assurés et deux collaborateurs. Elle est ainsi le plus petit assureur-maladie de Suisse autorisé par l'Office fédéral de la santé publique (OFSP). Le nombre d'assurés ne correspond même pas au nombre de collaborateurs du plus grand assureur-maladie du pays, qui compte plus de 2 millions d'assurés.
Fait croustillant: à quelques kilomètres de là, dans la commune voisine de Vals (GR), se trouve la caisse Sanavals, le troisième plus petit assureur-maladie, avec actuellement 3579 assurés. La région grisonne de Surselva, qui compte moins de 22'000 habitants, compte même une troisième caisse maladie locale, la Vita Surselva. Outre les Grisons, une telle concentration de caisses maladie régionales ne se trouve qu'en Valais. Par exemple, il y en a trois rien qu'à Martigny.
La stabilité prime sur la croissance
Blick a voulu savoir comment Lumneziana arrivait à joindre les deux bouts et comment elle voyait son avenir. Mais sa directrice, Matilda Arpagaus, n'a pas souhaité répondre à nos sollicitations. «Ni par écrit, ni par oral». La même demande auprès de Sanavals est restée sans réponse.
Pour Felix Schneuwly, expert en caisses maladie chez Comparis, ce n'est pas surprenant: «La libre circulation complète ancrée dans la loi sur l'assurance maladie – selon laquelle les caisses maladie sont tenues de proposer une couverture d'assurance à toute personne suisse sans réserve – peut créer des problèmes pour les plus petites d'entre-elles.» Celles-ci ne souhaite donc pas attirer l'attention, afin d'éviter une potentielle croissance. Car cela les obligerait à trop gonfler leur administration et leurs réserves. Le statu quo est donc souhaité.
Selon l'expert, «les petites caisses mentionnées ne semblent pas être sous pression financière». Il part du principe que ces dernières souhaitent conserver leur fort ancrage régional, qui assure également des emplois dans la région. Et une éventuelle fusion de ces petites caisses ne leur offrirait aucun avantage.
Des réserves suffisantes… qui ne suffisent pas toujours
En réalité, la Lumneziana, tout comme ses consœurs, repose sur des bases solides. Il ressort du rapport annuel 2023 que le nombre d'assurés dans l'AOS (assurance obligatoire des soins) était de 2570 à la fin de l'année, soit légèrement plus que l'année précédente (2534). Toutefois, l'AOS a enregistré un résultat négatif de -1,14 million de francs. Un chiffre impressionnant pour des recettes de primes de 8,43 millions de francs. La raison est à trouver dans une augmentation des prestations brutes de 11,1% à 11,16 millions de francs.
Mais il n'y a pas lieu de s'inquiéter: le taux de solvabilité de Lumneziana – c'est-à-dire le rapport entre les réserves disponibles et le montant minimum – s'élève à un confortable 122%. Les exigences légales sont donc remplies. Le tableau est similaire pour Sanavals: un résultat annuel négatif, un léger recul du nombre d'assurés et un taux de solvabilité de 182%.
Mais cela ne suffit pas toujours à garantir la survie. En 2018, la caisse-maladie Turbenthal, du village zurichois du même nom, a dû fermer sur ordre du Tribunal fédéral, bien qu'elle disposait de réserves suffisantes. Toutefois, d'autres éléments n'étaient pas conformes à la loi: il n'y avait ni traitement électronique des données ni système de contrôle interne.
Des primes avantageuses – ne le répétez pas !
Dans les rapports annuels de Lumneziana et de Sanavals, on peut lire que l'on envisage l'avenir «avec confiance». Et Felix Schneuwly abonde: «Elles s'en sortent sans le soutien des pouvoirs publics et si elles peuvent maintenir un nombre stable d'assurés, elles ont tout à fait le droit d'exister.»
La Lumneziana a néanmoins dû augmenter sa prime de 7,5% pour l'exercice 2024. Mais malgré cela, les trois petites caisses grisonnes proposent toujours l'offre la plus avantageuse dans leur région, selon le calculateur de primes Priminfo. Elles sont même parfois nettement inférieures aux offres comparables de grandes caisses maladie.
Il est en outre frappant de constater que Lumneziana et ses concurrents régionaux sont tous organisés en tant que fondations. Elles sont ainsi à l'abri de rachats. Dans le contexte de la consolidation du secteur de l'assurance maladie, c'est essentiel.
Le nombre d'assureurs a nettement diminué depuis l'entrée en vigueur de la loi fédérale sur l'assurance-maladie (LAMal) en 1996. Cette année-là, 145 caisses proposaient l'assurance obligatoire des soins. En 2024, selon l'OFSP, seuls 39 assureurs-maladie sont encore autorisés à pratiquer, dont huit comptant moins de 10'000 assurés. En revanche, ils sont moins confrontés à des problèmes que leurs grands concurrents.