La crise du secteur événementiel suisse (et mondial) a commencé en même temps que la pandémie de Covid-19. Dès que le virus a commencé à se répandre, tous les événements culturels et les grands rassemblements ont été annulés, et les professionnels du secteur se sont retrouvés démunis.
Depuis, malgré une petite amélioration, la situation reste encore critique. Le secteur calcule que pour l’exercice en cours 15’000 événements auront été annulés. C’est ce qu’avance une enquête menée par les associations professionnelles Expo Event, SVTB et Tectum, que le SonntagsBlick a pu se procurer. Avec un total de 2,52 milliards de francs suisses, le chiffre d’affaires fin de 2021 ne devrait pas beaucoup dépasser celui de l’année précédente.
À titre de comparaison, les organisateurs avaient généré 5,6 milliards de francs avant la crise sanitaire. L’espoir de rattraper au moins partiellement les pertes de la première année de pandémie à partir de l’automne est resté une chimère.
Même les événements qui ont pu avoir lieu ont souvent à peine couvert leurs coûts, selon Christoph Kamber, président d’Expo Event: «Notre industrie patine sur une glace très mince. En tant qu’organisateur, je sais que certains projets sont parfois de véritables opérations suicides en ce moment, c’est dire à quel point les calculs sont serrés».
L’autre facteur qui pèse sur le secteur est l’annulation à la dernière minute. «Cela met beaucoup de pression sur les ventes», souligne Christoph Kamber. «Nous parlons d’un taux d’annulation qui peut aller jusqu’à 40% par événement. Aucun organisateur ne peut soutenir cela sur le long terme.»
Le directeur d’Expo Event explique que beaucoup de spectateurs calquent leurs sorties sur le bulletin quotidien de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP). «Si le nombre d’infections augmente le matin, les clients annulent l’après-midi.»
Un public restreint par le Certificat Covid
Christoph Kamber assure soutenir l’obligation du certificat Covid et les appels à la vaccination du Conseil fédéral. «Malheureusement, la volonté de se faire vacciner est plus faible que prévu, et l’obligation de certificat restreint massivement notre clientèle.»
En conséquence, l’industrie a supprimé 1400 autres emplois en 2021. Depuis le début de la crise, environ 6000 emplois ont été perdus. Cet amenuisement continu risque également d’avoir des conséquences à plus long terme: de nombreux professionnels ont tourné le dos au secteur de l’événementiel pour toujours. Cela conduit parfois à des situations absurdes où, malgré une faible demande, il y a un manque de personnel pour travailler sur les événements à court terme.
Les fournisseurs et les traiteurs sont en première ligne de ceux qui souffrent de la situation critique du secteur. Les hôteliers, les aubergistes ou les artisans d’une région profitent également d’une grande foire commerciale ou d’un concert. En 2019, le chiffre d’affaires qui en résulte s’était élevé à plus de 22 milliards de francs suisses. D’ici la fin de l’année 2021, il devrait cumuler à un peu moins de dix milliards.
Au-delà du nombre de spectateurs et de réservations, les professionnels de l’événementiel craignent par-dessus tout d’être abandonnés par l’État. Le Conseil fédéral a exprimé son envie de sortie de crise: les aides liées au chômage partiel arriveront à terme à la fin de l’année, et le «parapluie de protection» rassemblant des mesures économiques d’aide aux secteurs culturel et événementiel devrait, lui, cesser en avril 2022.
«L’aide économique a sauvé beaucoup d’entre nous», reconnaît Christoph Kamber. Mais il craint les conséquences de l’arrêt de ce soutien si la situation sanitaire ne s’améliore pas.
L’aide pourrait ne pas se concrétiser
La semaine prochaine, la Commission économique du Conseil national se penchera sur ce «parapluie de protection». Les représentants de plusieurs partis font pression pour le prolonger. Reste à savoir s’ils pourront rassembler une majorité contre la volonté du Conseil fédéral.
Pour les organisateurs, la crise n’est pas terminée, estime la conseillère nationale verte Regula Rytz: «Il est évident pour tout le monde qu’un concert n’est pas rentable si les salles restent à moitié vides.» L’écologiste et ses camarades de campagne veulent demander à la Commission économique que le bouclier de protection soit maintenu jusqu’à la fin de 2022. Ils avancent que c’est déjà ce que fait le gouvernement pour d’autres secteurs.
«Dans le domaine du sport et de la culture, le Conseil fédéral veut étendre les aides», pointe la conseillère nationale bernoise. «Il n’y a aucune raison de ne pas faire de même pour aider financièrement les professionnels de l’événementiel.»
Regula Rytz appelle également à trouver une solution pour les forains, qui risquent à nouveau de passer des mois sans revenus l’hiver prochain.
Le retour à la normale est encore lointain pour les professionnels de l’événementiel. Alors que le pays débat du sens et de l’utilité de la vaccination, des centaines de petites entreprises craignent pour leur survie.
(Adaptation par Louise Maksimovic)