Au bout du fil, la voix de Marc Rosset est calme. Comme s'il ne voulait pas trop prendre position. A la question de savoir s'il comprend la décision de Roger Federer de déclarer forfait pour le huitième de finale de Roland-Garros, la réponse fuse. Un seul mot claque: «Oui.» Il faut le relancer. Lui-même organisateur du tournoi de Genève, n'aurait-il pas été agacé si le Bâlois avait fait un pareil «coup» sur les bords du Léman? «Je suis persuadé que Guy Forget (ndlr: directeur du tournoi parisien) est un peu déçu et c'est normal. Mais c'est un ancien joueur et vous pouvez poser la question à tous les anciens joueurs. La charge physique encaissée par Federer depuis le début du tournoi est importante. Le grand public ne s'en rend peut-être pas compte et cela peut lui paraître bizarre. Mais pas pour les gens qui ont joué à ce niveau.»
La franchise avant tout
Pour Marc Rosset, Roger Federer aurait pu faire en sorte que cette polémique n'existe pas. «Je vais vous expliquer, enchaîne-t-il. Il aurait pu se réveiller ce lundi matin et aller chez le médecin en prétextant un mal à l'épaule car il a trop servi samedi soir. Après deux manipulations, il aurait dit 'aïe, aïe, aïe' et le forfait médical aurait été prononcé. Le docteur n'aurait pas eu d'autre choix, de toute façon.»
Mais le Bâlois a choisi une autre voie. Celle de la franchise, pour Marc Rosset. «Aujourd'hui, s'il y a une polémique, c'est juste parce que Rodg' a été honnête, appuie-t-il. Et je veux vraiment souligner ce point. Le mec aurait pu faire passer ça pour une blessure, mais il ne l'a pas fait. Il a toujours dit que les tournois de Genève et de Roland-Garros étaient des préparations pour la saison sur gazon.»
Le Rhénan a tout de même atteint les huitièmes de finale à la Porte d'Auteuil, ce qui est à garder comme quelque chose de positif. «Si l'on regarde sa progression entre Genève et Roland-Garros, c'est assez impressionnant, analyse Marc Rosset. Face à Andujar à Genève, c'était pas terrible. Mais j'ai vu des entraînements en fin de semaine avec Gaël Monfils et son niveau était déjà bien meilleur.
«J'ai moi-même eu une carrière de merde»
Plutôt que de parler d'échec avec ce huitième de finale, le Genevois veut que les observateurs «mettent les choses en perspective». «Oui, pour Roger Federer, cela peut paraître nul, puisqu'il a gagné 20 tournois du Grand Chelem. Mais il y a des joueurs qui font toute une carrière sans jamais atteindre une fois ce stade du tournoi. Donc si c'est nul de faire huitième de finaliste, il y a des milliers joueurs sur le circuit qui sont nuls. Moi-même j'ai eu une carrière de merde avec mes cinq huitièmes de finale.»
Sur les courts parisiens, Marc Rosset a même été rassuré par ce qu'il a vu dans le jeu de l'ancien No 1 mondial. «À Genève, c'était comme un acteur qui faisait ses premiers pas sur scène, il y avait une certaine appréhension. N'oubliez pas qu'il n'a pas joué depuis 15 mois et est en train de revenir de deux opérations au genou. Encore une fois, je souhaiterais que tout ceci soit remis dans le contexte. Il a bientôt 40 ans et adore le tennis. Il veut jouer le plus longtemps possible. Et dans le même temps, il sait que s'il se blesse à nouveau, c'est terminé. Toutes ses décisions sont prises dans cette optique. Je suis admiratif du match qu'il a livré face à Köpfer. C'était une vraie bataille qui s'est terminée à 1h du mat' et dans le froid. Bref, pour toutes ces raisons, il n'y a pas matière à polémiquer, non?»
Clair, net et précis, en effet.