Cet article a été publié en janvier 2019, pour commémorer le 10e anniversaire de la chute de Daniel Albrecht sur la Streif. Blick n'existant pas en Suisse romande à cette époque, nous avons décidé de le traduire aujourd'hui, 15 ans après l'accident qui a largement endommagé la carrière du skieur valaisan.
Le Canadien Ken Read était l'un des descendeurs les plus intrépides de son époque. Il a remporté sa plus grande victoire en 1980 sur la Streif de Kitzbühel. Un casse-cou et un homme à femmes dont les autographes étaient très recherchés, notamment au pied de la Streif. En cette journée de janvier 2019, à 63 ans, il est à nouveau en Autriche. Mais cette fois dans le rôle inverse, celui d'un fan.
La raison en est sa rencontre avec Daniel Albrecht. Ken Read l'aperçoit en attendant le téléphérique du Hahnenkamm et est ravi. «Daniel, je veux faire une photo avec toi. Ta chute ici, sur la Streif, m'a beaucoup touché à l'époque. Je suis si heureux de te revoir maintenant en si bonne santé.»
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Le Valaisan rit, salue le Canadien grisonnant et dit: «Tu sais, cet endroit a changé ma vie, et pourtant j'associe beaucoup de sentiments positifs à cette région. Et aujourd'hui, je veux enfin faire la paix avec la Streif aussi.»
Cela fait maintenant dix ans que cette piste impitoyable l'a rejeté. À l'entraînement, lors du saut d'arrivée, une terrible chute. Ce n'est que dix ans après que Daniel Albrecht se sent prêt à s'attaquer une nouvelle fois à cette piste. Un test dont il ne sait pas exactement ce qui l'attend, quelles émotions l'envahissent.
Souvenirs d'Eminem
Lorsqu'Albrecht se trouve dans le portillon de départ, il se souvient soudain de la musique qu'il écoutait avant sa grave chute du 22 janvier 2009. Étonnant, car en réalité, il n'a absolument aucun souvenir de cette journée. «J'ai écouté du rap – Eminem et 50 Cent. C'était ma préparation au départ cet hiver-là.»
Daniel Albrecht se lance d'un coup de baguette dans la descente la plus difficile du monde, qui exige une concentration totale dès les premiers mètres. Avant la fameuse Mausefalle, il s'élance et s'enthousiasme: «Wow, c'est vraiment génial ici. Si je n'avais pas chuté aussi lourdement, Didier Cuche n'aurait pas gagné cinq fois ici aussi facilement.» Le bon sentiment d'Albrecht fait place à un sentiment de malaise un peu plus tard dans le Steilhang. Ce n'est plus génial ici, seulement raide. «Je ne me sens pas à l'aise dans cette section, avoue-t-il. C'est beaucoup trop glacé pour moi.» Déjà à l'époque où il était actif, le Haut-Valaisan se sentait plus à l'aise lorsque la neige sur la piste avait une bonne adhérence.
Montrer la vidéo à sa fille
La Streif est également glacée sur la fameuse Hausbergkante. Albrecht fait une pause. Là où les coureurs traversent à gauche le samedi et se précipitent vers la pente d'arrivée, le Valaisan glisse tranquillement de la Hausberg, d'où l'on a déjà l'objectif en vue. Et le saut d'arrivée qui a fait basculer sa vie il y a dix ans. «Sans ce saut, je serais aujourd'hui millionnaire et je serais probablement encore en tête de la Coupe du monde», balance-t-il.
D'innombrables fois, il a analysé cette chute qui lui a causé un grave traumatisme crânien: «J'ai sans doute trop bien pris le virage à la sortie de la traverse à l'époque et j'ai foncé vers le saut d'arrivée à une vitesse bien plus élevée que lors de l'entraînement de la veille.» Il regarde en bas vers la ligne d'arrivée. «Parfois, j'aimerais me souvenir des pensées qui m'ont traversé l'esprit avant l'impact.»
Mais le Valaisan n'a pas perdu son sens de l'humour – chez Albrecht, il est parfois un peu noir. Dans la zone d'arrivée, il dit: «Peut-être que cette chute m'aidera à élever ma fille de trois ans. Si je constate un jour qu'elle fonce trop sauvagement et trop vite sur les pistes de ski, je lui montrerai la vidéo de mon envol.»
Daniel Albrecht lui-même ne peut s'empêcher de rire. Peut-être à cause de ce qu'il vient de dire, mais sans doute aussi parce qu'il est soulagé d'être arrivé sain et sauf à l'arrivée et d'avoir affronté une nouvelle fois cette Streif avec courage. Maintenant, il peut enfin faire la paix avec Kitzbühel.