S'il fait chaud et que le sol est poussiéreux, il est le plus fort. S'il fait froid et que le sol est boueux, c'est aussi le plus fort. Mathias Flückiger est imbattable sur son vélo de montagne. Il a remporté les quatre dernières courses de la Coupe du monde, dont certaines avec un style exceptionnel. Il s'est alors dit: «Si je ne fais rien de faux à Tokyo ou si je n'ai pas de malchance, j'aurai l'or. La victoire olympique me revient normalement, je suis le meilleur.»
On pourrait qualifier cette déclaration de déconnectée de la réalité. Mais est-ce vraiment le cas au vu de ses récents triomphes? Une chose est sûre: les propos de Flückiger sont tout sauf typiquement suisses. «Je peux bien gérer la pression que cela crée. J'ai travaillé dur pendant plus de dix ans, j'ai été ridiculisé et les gens ont eu pitié de moi. Maintenant, je récolte les fruits de mon travail.»
Il voulait percer en hockey sur glace
Mathias Flückiger est peut-être le plus grand atout pour une médaille d'or suisse au Japon. Mais qui est cet homme de 32 ans originaire de Haute-Argovie, dans le canton de Berne? Il y en a plus d'un qui se pose la question. Nous rencontrons le Bernois sur un sentier au-dessus de la Corviglia à St-Moritz (GR). C'est l'un des derniers jours de repos qu'il lui reste avant son départ pour la capitale nippone. Mathias Flückiger aurait donc de bonnes raisons d'annuler cet entretien. Mais c'est hors de question pour lui. «Tout d'abord, je ne peux pas toujours m'entraîner. Et deuxièmement, je m'ennuie si je ne fais rien. J'avais la bougeotte quand j'étais enfant et je l'ai toujours. Je suis content que vous soyez là», nous accueille-t-il.
On remarque immédiatement que Mathias Flückiger est de bonne humeur, même loin de son vélo. Il parle de son enfance: «Je voulais devenir un joueur professionnel de hockey sur glace, mais mon père disait que c'était trop cher. J'aimais aussi faire le chemin jusqu'à l'école en vélo - il y avait une descente sympa - et, depuis ce jour-là, je n'ai fais que du vélo.» Mais très vite, au sein de son club de vélo, le petit Mathias devait toujours descendre de sa selle dans les courses de cross-country et de VTT. «J'étais tellement inférieur physiquement», se souvient-il.
Flückiger a souffert de la domination de Schurter
Très vite, certains lui ont conseillé d'abandonner le vélo - également parce que son apprentissage de mécanicien d'engins de chantier était très exigeant. Ces voix se sont tues en 2010 lorsque Mathias Flückiger est devenu champion suisse, européen et mondial des moins de 23 ans. Était-il un talent après tout?
Au cours des dix années suivantes, Mathias Flückiger a souvent bien couru, mais il est toujours resté dans l'ombre de la superstar Nino Schurter. «J'en ai souffert», admet le Bernois. Lorsqu'il s'est écrasé la tête la première dans une voiture mal garée pendant un entraînement, il a même pensé à prendre sa retraite. «J'ai subi une commotion cérébrale. Le point le plus bas de ma carrière. Mais j'ai réussi à me ressaisir», a déclaré Flückiger.
Et s'il échoue?
Et aujourd'hui? A Tokyo, Mathias Flückiger est le plus grand prétendant à l'or olympique aux côtés du génie du cyclisme néerlandais Mathieu van der Poel. «J'ai accumulé de l'énergie pendant dix ans - maintenant tout doit sortir», s'exclame-t-il. Mais que se passera-t-il s'il échoue à Tokyo? «Alors je réessayerai en 2024. Et comme 2026 est la Coupe du monde, autant continuer jusqu'en 2028», dit-il en riant. Flückiger aurait alors 39 ans. Mais qu'est-ce que cela signifie pour lui?