C'est le cas en hockey sur glace - mon domaine de prédilection -, mais ça l'est également en football. Le retour des fans permet aux matches de ressembler à ce dont nous avions l'habitude avant cette pandémie qui a changé tant de choses dans nos vies. Cela peut paraître stupide, mais le brouhaha consécutif à un but en prolongation du Lausanne HC avait de quoi filer des frissons, plus tôt dans la saison. Après une année à entendre ces grandes arènes sonner désespérément creux, le moindre bruit en provenance des tribunes était accueilli avec un plaisir certain.
Problème? Ce regain de vie semble, qu'on le veuille ou non, inévitablement lié au retour dans les tribunes de spectateurs pas forcément bien intentionnés. Comme si l'ambiance et les débordements étaient liés, pour certains. En quelques semaines, différents groupes de fans se sont distingués dans le monde du hockey sur glace. Il y a eu l'histoire de l'incursion dans la patinoire par une poignée d'encagoulé genevois à Fribourg vendredi. Le lendemain, ce sont les Fribourgeois qui se sont illustrés en provoquant un esclandre à Porrentruy.
Le football n'est évidemment pas en reste.
Dimanche, la quiétude des terrasses lausannoises a été gâchée par le cortège de voitures de police, avec force sirène évidemment. La raison? Un match entre le Lausanne-Sport et Grasshopper. Rien d'autre? Non, rien d'autre, justement. Et c'est bien là le coeur du problème. Avant la pandémie, les débordements étaient devenus monnaie courante. Pour rester sur l'exemple lausannois, il était impossible d'approcher de la gare un jour de match sous peine de se heurter à une barrière de forces de l'ordre lourdement équipées, les fameux «Robocops». Le cortège des supporters mobilisait les policiers. Des dizaines de milliers de francs payés par le contribuable engloutis pour cadrer une poignée - car il est important de ne pas généraliser - d'ingérables.
Reflet de la société?
Avions-nous oublié à quel point ces groupuscules étaient nocifs avec la pandémie ou est-ce que les 18 mois de frustration ressurgissent tout à coup? S'il faut faire attention à ne pas tomber dans la psychologie de comptoir, il paraît tout de même bien compliqué de dissocier les frustrations de notre société actuelle à celle d'une part de sa population. Et si ces tensions n'étaient, finalement que l'expression des stigmates causés par cette pandémie?
Toujours est-il qu'il est très urgent de réagir. Avant que cette sale habitude ne se réinstalle.
Non, il n'est pas normal qu'une gare devienne une zone bouclée aux usagers des transports en commun. Il n'est pas non plus normal que les spectateurs cordiaux se voient interdits de boire une bière après le match pour fraterniser avec les supporters adverses, comme ce fut le cas samedi à Porrentruy. Vendredi, en marge des événements survenus à Fribourg, Genève-Servette a été prompt à condamner ces actes. C'est une bonne chose. Le club des Vernets et Gottéron vont oeuvrer main dans la main pour tenter d'identifier les intrus.
Eviter les sanctions collectives
Mais c'est en amont que le travail doit avoir lieu. Ce retour au «monde d'avant» doit surtout être une chance de gommer ce qui n'allait pas. Et les clubs ne peuvent pas être les seuls à travailler. Le pouvoir politique doit également agir et ne pas accepter que les centres-villes se transforment le dimanche en un cours de récré pour supporters insupportables. Faudra-t-il arriver à une interdiction pure et simple des visiteurs dans les stades et patinoires? Il faut tout faire pour éviter qu'une fois encore une majorité soit punie pour quelques-uns.
Cette voie - l'absence de punition collective - est d'ailleurs le chemin qu'a choisi l'Allemagne pour tenter d'endiguer les violences hors des stades. Chez nos voisins du nord, point de parcages fermés ou de mesures extrêmes, mais chaque déplacement est encadré grâce à une bonne coordination entre les clubs, les pouvoirs politiques, la police et les supporters. Sans surprise, cette voie du dialogue fonctionne mieux qu'en Suisse. Et si l'on se posait les bonnes questions ici aussi?
Au fait, entasser des fans dans des «bétaillères» sur rails sans le moindre encadrement n'est pas une réponse à cette problématique. Sacrifier des wagons pour seule mesure non plus. Pourtant, on a la furieuse impression qu'il s'agit de l'unique réponse donnée pour le moment. On doit faire beaucoup mieux.