On tape, on tape, on tape, et plutôt que de s’enfoncer, le clou est toujours plus grand. Il y a peut-être un problème de méthode (ou de marteau), non? Eh bien non, les autorités cantonales continuent de taper encore plus fort, en mode Progresso, en espérant que ce clou disparaisse enfin. Je ne sais pas lire l’avenir, mais ce film, je l’ai déjà vu: ça ne marchera pas. La situation va s’aggraver dans les stades et surtout autour. J’insiste sur ce point: l’immense majorité des problèmes de discipline et de troubles à l’ordre public se passent hors des stades suisses aujourd’hui. Et il faut trouver une solution, urgemment.
Je suis de ceux, très nombreux, qui pensent que le citoyen qui ne s’intéresse pas au football n’a pas à subir des nuisances toutes les deux semaines parce qu’il a le malheur d’habiter ou d’avoir son commerce sur le chemin d’un cortège de fans. Une fois par année, pour une finale de Coupe, ma foi, c’est l’événement, on rajoute des forces de police, la collectivité paie, c’est comme le carnaval, on peut vivre avec. Mais toutes les deux semaines, non. Les tags, les déprédations au mobilier, les pétards en pleine rue, les jets de bière dans le jardin: les personnes qui souhaitent simplement passer un samedi normal dans leur ville n’ont pas à en faire les frais. Et il va également sans dire (mais je le dis quand même, on ne sait jamais) que toute forme de violence, même verbale, est à éradiquer. Et surtout que les ultras ne comptent pas sur moi pour dire qu’elle n’existe pas dans leur mouvement.
Pour le reste, je vais être clair et j’assumerai ma position quel qu’en soit le prix. Je me sens légitime pour donner mon avis parce que je pense que personne ne voit autant de matches de football que moi à travers le pays (ou alors cette personne a un sérieux problème). Les quelques lignes qui vont suivre sont celles d’une personne qui considère que le mouvement ultra fait partie de la culture du football au même titre que le ballon, le gazon et le 4-2-3-1 avec double pivot au milieu de terrain. Je l’affirme: dans l’immense majorité des cas, les matches de football se déroulent de façon adéquate en Suisse et lorsque surviennent des débordements, inacceptables, ceux-ci sont immédiatement repérés, jugés et réprimés. Un ramasseur de balles reçoit un pétard trop près de l’oreille? Le coupable est identifié. Un cagoulé lance un engin pyrotechnique dans la foule? Jugé. Geste débile, sanction adéquate. Tout juste.
Répression aveugle
Ce qui est intolérable et contre-productif, de mon point de vue, de la part de nos autorités, est cette répression aveugle, fourre-tout. Ce modèle en cascade qui porte bien son nom vu qu’il ne fait que participer à cette escalade, justement en mettant tout dans le même sac et en tapant au hasard. Les autorités ont jugé qu’il y avait eu des débordements après Lausanne-Servette. Soit. Je fais confiance. Je n’étais pas au milieu, j’ai observé les scènes de loin en allant chercher ma voiture. Pour tout dire, je n’ai pas eu l’impression d’assister à un après-match entre Galatasaray et Fenerbahçe, euphémisme, mais je n'ai probablement pas tout vu et je pars du principe que la police a dit la vérité.
Et, pour ces affrontements, on ferme des tribunes entières à Lausanne et à Genève et, en bonus, le LS a communiqué une interdiction de déplacement des supporters de Lucerne pour le prochain match. Or, l’histoire très récente nous a montré que les Saint-Gallois n’avaient pas hésité à venir à plusieurs centaines à Lausanne, justement, en sachant très bien qu’ils ne pourraient pas assister à la rencontre. La liberté de déplacement existe en Suisse, encore heureux, et la police a, au final, eu plus de travail en gérant ces supporters plutôt qu’en les encadrant dans le cadre d’un match normalement organisé.
Les Lausannois, eux, étaient restés sages et ont constaté que les Saint-Gallois étaient venus devant leur stade... escortés par la police qui ne voulait plus d’eux au Flon! En voulant régler le problème, les autorités n’ont fait que l’accentuer et créer de la frustration, premier échelon de la colère. Cela s’appelle un autogoal et le prochain est déjà en préparation avec les Lucernois.
Diviser plutôt que régler le problème
En voulant régler le problème, ils ne font que diviser les gens, y compris à l'intérieur d'un même club, en témoigne encore le dernier sondage proposé par le Lausanne-Sport, qui demande à ses supporters des tribunes principales s'ils préfèrent assister à un match sans les «supporters debout» ou avec... Opposer plutôt que rassembler, voilà qui ne ressemble pas au LS, un club qui nous avait plutôt habitué à être constructif. Mais un club qui, sous la pression des autorités, se sent obligé de donner des gages de fermeté qui, là encore, ne serviront à rien à part braquer les ultras encore plus. Autogoal, encore.
Les sanctions collectives sont contre-productives, injustes et inutiles. Elles ne font qu’aggraver le sentiment de frustration et, à force de taper, on oublie de se parler. Tous les politiciens interrogés l’assurent et je les crois: ils aiment le football et rêvent d’assister à un match de manière pacifique.
Je leur offre donc une piste de réflexion: suivez l’exemple allemand, qui fonctionne à 99%, plutôt que le français, qui dysfonctionne à 100%. Créez des vrais groupes de travail, en impliquant les ultras. Vous verrez, ce ne sont pas des bêtes féroces assoiffées de sang. Ce sont des hommes qui gèrent des associations de plusieurs centaines de membres, qui font parfois des bonnes actions (si, si), et qui effectuent eux-mêmes un important travail d’autorégulation dans leurs rangs. Responsabilisez-les. Proposez-leur, vu que la pyrotechnie vous dérange tant, de proposer des shows maîtrisés, planifiés, annoncés. Ordonnez-leur de faire le ménage dans leurs rangs et de collaborer en cas de débordement. Écoutez-les, parlez-leur.
On se met à table!
Et vous, les ultras, faites un pas en direction de la société civile. Celle qui vous met tous dans le même sac parce qu’elle veut simplement ne pas avoir à se barricader le samedi par crainte de votre passage. Ne taguez pas la vitre de l’honnête commerçant. Ne cassez pas les bus, si c’est la solution trouvée pour venir à la Tuilière, ou si vous le faites, payez le 100% de la facture. Faites tous un pas l’un vers l’autre. Ne craquez pas des torches à tort et à travers, mais acceptez le compromis de la pyrotechnie maîtrisée, même s’il heurte votre sacro-sainte indépendance. La situation l’exige et si vous ne le comprenez pas, c’est que vous n’avez pas saisi ce qui se passe autour de vous.
Parce que si les autorités ne cherchent pas le dialogue et si vous ne l’acceptez pas, alors on continue l’escalade. Les forces étatiques continuent à taper à l’aveugle et la prochaine étape sera le huis clos total. C’est ce que vous voulez, tous, vraiment? Moi pas.
Alors, mesdames, messieurs, on se met à table et on parle.
Équipe | J. | DB. | PT. | ||
---|---|---|---|---|---|
1 | Servette FC | 27 | 9 | 48 | |
2 | FC Bâle | 27 | 27 | 46 | |
3 | FC Lucerne | 27 | 6 | 44 | |
4 | FC Lugano | 27 | 4 | 42 | |
5 | Young Boys | 27 | 8 | 40 | |
6 | FC St-Gall | 27 | 4 | 39 | |
7 | FC Zurich | 27 | -1 | 39 | |
8 | FC Lausanne-Sport | 27 | 6 | 37 | |
9 | FC Sion | 27 | -6 | 33 | |
10 | Yverdon Sport FC | 27 | -17 | 28 | |
11 | Grasshopper Club Zurich | 27 | -11 | 26 | |
12 | FC Winterthour | 27 | -29 | 20 |