Les réserves émises par l'Occident à l'égard du pays hôte de la Coupe du monde, le Qatar, sont nombreuses. Qu'en pense l'ambassadeur de Suisse dans l'Emirat? Les critiques sont légitimes, répond à Blick Edgar Dörig. «Il faut savoir les accepter.»
Selon le haut fonctionnaire, c'est la mission des médias d'aller regarder de très près la situation réelle au Qatar. Dans les faits, la liberté d'expression est limitée, l'homosexualité est interdite par la loi et la peine de mort est toujours en vigueur.
Mais, relève Edgar Dörig, il faut aussi reconnaître que le pays a fait des progrès ces dernières années. Et la Coupe du monde n'y est pas étrangères. «Les Qataris ont fait un effort», assure l'ambassadeur de Suisse. Un salaire minimum d'environ 270 francs par mois a été introduit, tandis que le fameux système de la kafala, qui n'impliquait aucun droit pour les travailleurs, a été aboli.
Des changements durables
Il n'est plus non plus permis de travailler sur les chantiers à midi durant les mois de forte chaleur. Pour Edgar Dörig, il s'agit de changements en profondeur qui vont rester après la plus médiatisée des compétitions. «Je pense que l'on a atteint un certain point de non-retour», anticipe-t-il.
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Le petit Etat ne cache pas qu'il utilise le sport pour améliorer son image. Environ 60 événements sont organisés chaque année au Qatar. Et le pays espère qu'un jour, des Jeux olympiques auront lieu dans le Golfe persique. C'est même un objectif.
En vue de la Coupe du monde, près de 200 milliards ont été investis dans les infrastructures. La population et l'économie locale vont pouvoir profiter à long terme d'un métro et d'autoroutes modernes à plusieurs voies.
Mais y a-t-il vraiment une culture sportive, au Qatar? «Il faut remettre les choses dans leur contexte: il ne faut pas s'attendre à voir ici un club de tradition comme le FC Saint-Gall, fondé en 1879», avertit Edgar Dörig. Après tout, le Qatar n'est indépendant que depuis une cinquantaine d'années.
Le Qatar fermera-t-il un oeil?
Il y a tout de même des piscines, des parcs et l'Aspire Academy, l'une des pépinières de formation les plus modernes au monde. En février, l'Emir en personne participe à la journée nationale du sport. «Ce sont surtout les jeunes hommes qui sont férus de football», souligne l'ambassadeur suisse au Qatar.
Edgar Dörig pense que le pays où il travaille est prêt pour la Coupe du monde. «Sur le plan matériel, tout va fonctionner: stades, infrastructures, organisation, sécurité... Ce qui sera passionnant, c'est de voir comment le pays va gérer les questions soft».
A ce titre, le cas de la bière est intéressant, selon l'ambassadeur de Suisse: la restriction décidée peu avant le tournoi a engendré des débats houleux dans la péninsule arabique. Edgar Dörig pense que l'Etat agira avec discernement. «Les lois locales s'appliqueront, mais il est probable que le Qatar fermera l'un ou l'autre oeil», anticipe-t-il.