«MVSSOLINI DVCE». Impossible de rater l’inscription en traversant le Ponte Duca d’Aosta. L’imposant monolithe de marbre casse l’horizon et veille sur l’Olimpico. Le stade romain où l’équipe de Suisse jouera sa place pour la Coupe du monde 2022 au Qatar, vendredi soir contre l’Italie (20h45).
En cette veille de match, la pluie a enfin cessé de tomber sur la ville éternelle. Une trêve météorologique bruyamment saluée par les oiseaux. Les pins parasols s’étirent vers le ciel gris pour se sécher. C’est le calme avant la tempête sur le Foro Italico. Cet immense parc dédié aux sports a longtemps porté le nom de son fondateur: Benito Mussolini, père du fascisme.
L’héritage historique est omniprésent. Une fois passé l’obélisque de l’entrée, on longe deux grands bâtiments ocre: l’Université de Rome et le siège du Comité olympique italien (CONI). Ce palais en forme de «H» est l’ancienne Académie fasciste masculine d’éducation physique.
«C’est un endroit très étrange, le témoin d’une époque et d’une idéologie révolues», nous avait prévenu Ilyas Azouzi. Doctorant à l’Université UCL de Londres, le fellow à l’Institut Suisse de Rome prépare une thèse sur la politique architecturale et urbanistique de l’Italie fasciste. «On entre dans une autre dimension au Foro Italico.» Les explications du chercheur lausannois apportent un contexte bienvenu.
«Benito Mussolini est arrivé au pouvoir avec l’idée de relever l’Italie, d’en refaire une nation de premier plan. L’Empire romain a été la première puissance du monde occidental et, pour lui, le temps était revenu de construire sur cet héritage. L’éducation physique a été l’un des principaux outils utilisés pour régénérer le pays, pour créer une civilisation active et guerrière.» La création de stades, dédiés au sport, est l’épicentre de cette stratégie.
«Aujourd’hui, la question du fasciste italien et de sa mémoire est houleuse, avertit Ilyas Azouzi. Dans de nombreux pays, les traces des régimes autoritaires ont été éradiquées. C’est par exemple le cas en Allemagne où les références au IIIe Reich sont rares. L’Italie se revendique de son grand héritage culturel. Les historiens y ont travaillé pour dissocier la production architecturale et artistique du contexte totalitaire. Très peu d’inscriptions ont été enlevées. C’est une manière d’accepter la part d’ombre du passé.»
«C’est un endroit très étrange, le témoin d’une époque et d’une idéologie révolues», nous avait prévenu Ilyas Azouzi. Doctorant à l’Université UCL de Londres, le fellow à l’Institut Suisse de Rome prépare une thèse sur la politique architecturale et urbanistique de l’Italie fasciste. «On entre dans une autre dimension au Foro Italico.» Les explications du chercheur lausannois apportent un contexte bienvenu.
«Benito Mussolini est arrivé au pouvoir avec l’idée de relever l’Italie, d’en refaire une nation de premier plan. L’Empire romain a été la première puissance du monde occidental et, pour lui, le temps était revenu de construire sur cet héritage. L’éducation physique a été l’un des principaux outils utilisés pour régénérer le pays, pour créer une civilisation active et guerrière.» La création de stades, dédiés au sport, est l’épicentre de cette stratégie.
«Aujourd’hui, la question du fasciste italien et de sa mémoire est houleuse, avertit Ilyas Azouzi. Dans de nombreux pays, les traces des régimes autoritaires ont été éradiquées. C’est par exemple le cas en Allemagne où les références au IIIe Reich sont rares. L’Italie se revendique de son grand héritage culturel. Les historiens y ont travaillé pour dissocier la production architecturale et artistique du contexte totalitaire. Très peu d’inscriptions ont été enlevées. C’est une manière d’accepter la part d’ombre du passé.»
Sous nos pas, un sol recouvert de mosaïques. Des scènes de sports et de chasse défilent en noir et blanc. Les slogans fascistes aussi. L’inscription «Duce», référence au «chef» Benito Mussolini, y revient régulièrement.
D’étranges statues de marbres
Une immense soucoupe volante est plantée là. La rouille et la pollution rongent le toit blanc du Stadio Olimpico, sans parvenir à entamer sa majestuosité. Le ballet de machines et des tracteurs rythme l’après-midi. Les intempéries ont mis à mal le précieux terrain. Les jardiniers se sont lancés dans une course contre la montre pour le peaufiner avant le grand soir.
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Sur la droite, d’immenses statues blanches nous tournent le dos avec dédain. Un haut-parleur crache des tubes de pop italienne. «Far l’amore è come ballare, sotto un cielo spettacolare» («faire l'amour, c'est comme danser sous un ciel spectaculaire», en français), chante le duo Takagi & Ketra. Ça promet.
En s’approchant, le «Stade des marbres» apparaît en contrebas des gradins. Des quinquas vêtus d’habits fluo souffrent le martyre, encouragés par les injonctions de leur coach privé et les basses de la musique. Sur la piste en tartan, des classes d’élèves romains se tirent la bourre. Des scènes d’amusement qui tranchent avec le lourd contexte historique.
Plus de 50’000 spectateurs
Sur les hauteurs, les géants silencieux veillent sur ces sportifs plus ou moins affûtés. Tout le contraire des statues au regard dur et aux muscles carrés. La soixantaine de marbres a été offerte par les régions d’Italie pour incarner les «virtus» romaines, ces valeurs de virilité et de courage. Les héritages de l’Empire antique sont légion dans ce lieu hors du temps. Vertigineux.
Il le sera encore davantage à la tombée de la nuit ce vendredi, quand plus de 50’000 spectateurs italiens et suisses débarqueront dans ce site au nord de la ville. Habituellement, l’endroit est gardé en alternance par les «tifosi» de la Lazio et de la Roma, les deux clubs de la capitale italienne. Ils ont prêté leur stade Olimpico pour cette «finalissima». Un décor fascinant pour une rencontre qui pourrait rester dans l’histoire du football suisse.