Une chose n'a pas changé: Lorsque Xherdan Shaqiri entre en scène, elle lui appartient. Depuis ses débuts en équipe nationale il y a plus de 14 ans, le 3 mars 2010, le gaucher fait parler son talent avec le maillot de la Nati et les fans l'adorent. Cela a encore été le cas samedi dernier à Saint-Gall: le Kybunpark n'a jamais été aussi bruyant que lors de son entrée en jeu contre l'Autriche (1-1) au coeur de la deuxième période.
Xherdan Shaqiri a donc pu jouer 23 minutes lors de la répétition générale de l'Euro. Et ce, alors que quatre jours auparavant, contre l'Estonie, il avait été présent sur le terrain du début à la fin du match. «Avec Xherdan, nous devons gérer. Il ne peut pas jouer deux fois 90 minutes en l'espace de quatre jours», explique Murat Yakin. Or, à l'Euro, la Nati disputera ses trois matches de groupe en l'espace de neuf jours.
Un footballeur pas comme les autres
La convocation de l'attaquant de 32 ans n'a jamais fait de doute. Il faut pourtant regarder les choses en face: aucun autre Suisse jouant en MLS, qui plus est avec un si faible temps de jeu depuis le début de l'année (726 minutes sur 1260 possibles) et une efficacité minimale (deux buts sur penalty, une passe décisive) n'aurait été appelé pour l'Euro.
Mais Shaqiri n'est pas un footballeur comme les autres. Il est, derrière Granit Xhaka, le deuxième joueur à avoir joué le plus de matches sous le maillot de la Nati (123), il se classe quatrième dans la liste des meilleurs buteurs - et il y a surtout son bilan en phase finale: Depuis 2014, il a marqué à chaque Coupe du monde et à chaque Euro, ce que seul Cristiano Ronaldo peut se vanter d'avoir fait.
C'est sûr: la Nati aura besoin en Allemagne des éclairs de génie de Shaq, à l'image de son retourné à l'Euro 2016 contre la Pologne ou de son doublé lors du match de poule à l'Euro 2021 contre la Turquie. Alors comment gérer le gaucher, qui peut être génial même lorsqu'il n'est pas en forme?
Il est peu efficace comme remplaçant
C'est à noter: les statistiques de Xherdan Shaqiri en tant que joker avec la Nati sont - pour le dire gentiment - perfectibles. Quinze fois, il est entré en jeu, marquant deux buts. Sinon? 63 buts et passes décisives lorsqu'il est titulaire...
Pour Alex Frei, tout est une question de communication. Le meilleur buteur de la Nati l'a dit à Blick: «Ses capacités sont indiscutables, mais sa forme physique laisse sceptique - est-elle suffisante pour un Euro? En raison de sa carrière sous le maillot de la Nati, Shaq mérite qu'on soit clair avec lui: tu joues 40, 50 ou 60 minutes. Mais aller au tournoi, le laisser s'entraîner et lui parler seulement après le deuxième match de groupe - ce serait l'assurance d'un certain cirque...».
Les trois matches de groupe avec Shaqiri dans le onze de départ - un tel scénario semble exclu. Mais lors du deuxième match contre l'Écosse, qui défend en bloc, il ne devrait pas être possible de se passer de lui, faute d'alternatives. Si Shaqiri joue d'entrée, il a aussi besoin de la confiance de ses coéquipiers, selon Alex Frei: «Je n'étais pas non plus le joueur le plus rapide, mais avec mes buts, j'ai réussi à faire gagner l'une ou l'autre prime à mes collègues. Ils ont fermé les yeux sur mes lacunes. Beni Huggel devenait fou lors des entraînements avec le FC Bâle lorsque je ne me donnais qu'à 50%. Ma réponse était alors: 'Aujourd'hui c'est l'entraînement. Le match est demain.»
Un joker de luxe?
Tant que ses performances en match officiel sont bonnes, le rôle particulier de «Shaq» sera accepté. Mais, poursuit Alex Frei, «vers la fin de ma carrière en équipe nationale, marquer des buts n'était plus aussi facile pour moi. J'ai alors ressenti certaines critiques, visant le fait que je ne courais plus autant...»
Markus Babbel est du même avis qu'Alex Frei. L'expert en football de Blick compare Shaqiri à l'Allemand Thomas Müller: «Les deux sont des joueurs très méritants. Mais ils n'ont pas été convoqués comme des mascottes, mais parce que les entraîneurs estiment qu'ils peuvent faire la différence sur le plan sportif. Si leur rôle a été discuté en amont, j'attends de Müller et Shaqiri qu'ils l'acceptent. Qu'ils prennent les jeunes par la main, qu'ils leur fassent comprendre ce que cela signifie de jouer pour son pays à l'Euro. Ainsi, ils peuvent aussi devenir une sorte de bras droit de l'entraîneur».
Xherdan Shaqiri n'est-il plus qu'un joker pour la Nati? De nombreux éléments le laissent penser. Y compris les propos de Pierluigi Tami après l'arrivée des Suisses au camp de base à Stuttgart. Interrogé sur la situation de Shaqiri, le directeur des équipes nationales a déclaré: «26 joueurs sont ici. Et ceux qui ne jouent pas dès le début seront mécontents. Mais maintenant, chacun doit accepter son rôle. Nous sommes à un Euro, les intérêts individuels n'ont pas leur place». Le message adressé à Shaqiri ne peut pas être plus clair!