À quelle hauteur se serait situé cet exploit dans l'histoire plus que centenaire du football suisse? Les fans de la Nati étaient en train de se poser la question ce dimanche à Francfort, lorsque Niclas Füllkrug a surgi dans les arrêts de jeu pour tromper Yann Sommer et redonner à l'Allemagne la première place de ce groupe A. Quelle frustration pour la Nati, qui s'y voyait déjà! Au final, Suisses et Allemands se séparent sur ce 1-1 qui offre la première place à la Mannschaft et la deuxième à la Nati.
L'essentiel est donc là: la qualification pour les 8es est désormais assurée à 100%, en tant que deuxième du groupe et sans trembler un seul instant. Qui aurait prédit, voilà encore quelques mois, alors que la Suisse avait toutes les peines du monde à s'extraire d'un groupe de qualifications comprenant Israël, la Roumanie, la Biélorussie, Andorre et le Kosovo, et que l'élan de cette équipe semblait brisé, que cette Nati enchanterait à ce point ses supporters?
Elle disputera donc son 8e de finale samedi à 18h à Berlin, face à l'Italie, l'Albanie ou la Croatie. Trois adversaires bien différents, qu'il faudra analyser en détail et bien préparer. Mais d'abord, il faudra se remettre des émotions très fortes vécues ce dimanche à Francfort.
Un carton pour Silvan Widmer
Le match? Une performance courageuse, ponctuée par une énorme frustration. Pour aborder cette rencontre si importante, Murat Yakin avait décidé de prendre un risque, mais qu'il avait annoncé et assumé en conférence de presse, en alignant ses trois joueurs sous la menace d'un carton jaune, à savoir Silvan Widmer, Remo Freuler et Ricardo Rodriguez.
Le sélectionneur a cru jusqu'à la 81e avoir été récompensé de ce qui n'était pas un coup de poker, lui qui n'aime pas ce jeu, mais tout de même une mise risquée, puisqu'aucun de ces trois hommes n'avait été averti ce dimanche… jusqu'au carton jaune reçu par Silvan Widmer à dix minutes de la fin. Le coach aura donc 25 joueurs à disposition sur 26, sauf épidémie de gastro, pour le huitième de finale de samedi prochain, ce qui fera une énorme différence par rapport au désastre survenu au Qatar face au Portugal.
Bonne nouvelle: Breel Embolo a tenu 65 minutes à haute intensité
Autre décision forte, courageuse et réfléchie, celle de faire débuter Breel Embolo et de laisser Xherdan Shaqiri sur le banc. L'avant-centre, titulaire pour la première fois avec la Nati depuis ses ennuis de santé, a non seulement pu aider la Suisse sur ce match, mais aussi gagner du rythme en vue du huitième de finale, ce qui est une excellente nouvelle. Les 65 minutes qu'il a passées sur le terrain seront une aide précieuse pour lui en vue de samedi prochain, c'est une certitude. Murat Yakin sait désormais qu'il peut compter sur lui dès le début et, même s'il n'est pas à créditer d'un grand match, Breel Embolo a tout de même fait le boulot, disputant plus d'une heure à haute intensité. Et sans rechuter.
Yann Sommer sauvé par la VAR à la 17e
En ce qui concerne le match à proprement parler, la Nati a bien débuté la partie, mais Yann Sommer pourra remercier longtemps Jamal Musiala d'être arrivé un peu en retard face à Michel Aebischer et d'avoir laissé traîner le pied sur le Fribourgeois, car le gardien de la Nati a fait bien mauvaise figure sur la frappe de Robert Andrich qui a suivi à la 17e.
Comment un gardien de niveau international peut-il encaisser un tel but? C'est ce qu'ont dû se demander les spectateurs neutres et les supporters allemands, lesquels comprennent mal que Gregor Kobel, le meilleur gardien de Bundesliga, ne soit pas titulaire en équipe de Suisse.
Ce but encaissé sur cette frappe anodine ne fera rien pour remonter la cote de Yann Sommer et le portier de la Nati a eu énormément de chance que la VAR appelle Daniele Orsato à aller consulter son petit écran sur le côté du terrain. Après avoir hésité un peu et s'être repassé la scène plusieurs fois, l'Italien a décidé que le but devait être annulé. Un grand ouf pour la Nati et un immense ouf pour Yann Sommer.
Dan Ndoye inscrit son premier but avec la Suisse
L'avertissement était cependant bel et bien là, mais la Mannschaft allait se faire congeler quelques minutes plus tard, à la 28e précisément, par Dan Ndoye, lequel a surgi à la réception d'un centre tendu de Remo Freuler. Le Vaudois, qui avait annoncé durant la semaine vouloir améliorer son efficacité devant le but, a choisi pile le bon moment et cette réussite, la toute première pour lui sous le maillot de la Nati, a seulement fait exulter ses proches, mais aussi tout un pays.
L'attaquant vaudois a failli doubler la mise dans la foulée!
Quelle sensation folle a dû ressentir ce gamin de 23 ans, en progression constante et aligné encore une fois à une position différente par Murat Yakin, lequel aime décidément les surprises. Testé comme piston gauche en mars et en juin, l'ailier de Bologne a débuté l'Euro en tant que milieu offensif droit et, ce dimanche, du fait de la titularisation de Fabian Rieder, il a évolué milieu offensif gauche!
Pas de quoi le perturber visiblement, d'autant qu'il s'est créé une immense occasion, en rupture et grâce à sa vitesse, dans la foulée de cette ouverture du score, mais son tir, du gauche, a été légèrement trop croisé (31e). Alerte maximale sur le but de Manuel Neuer!
Toni Rüdiger pas loin d'égaliser à la 41e
L'Allemagne ne voulait pas, ne pouvait pas, en rester là et, malgré les encouragements et le bruit que faisaient les supporters suisses, largement plus de 20'000 ce dimanche dans le stade de Francfort, la Mannschaft a élevé son niveau d'intensité et Toni Rüdiger aurait dû faire beaucoup mieux de la tête à la 41e, lui qui était idéalement placé pour égaliser. La Suisse, sans trop subir, tenait bon et menait donc au score à la pause.
Murat Yakin décidait logiquement de ne rien changer à l'attaque de la deuxième période, tant son équipe était bien dans le match. Certes, l'Allemagne a eu la possession du ballon avant la pause (65%) et a plus tiré au but (7-2) que la Nati, mais ces chiffres ne reflétaient en rien la réalité de la rencontre.
Non pas que la Suisse ait été flamboyante, non, mais elle était solide et déterminée, dans la foulée de ses matches de préparation de mars au Danemark (0-0) et en Irlande (victoire 1-0), lesquels ont servi à mettre en place cette défense à trois centraux qui a fait merveille ce dimanche à Francfort.
La Mannschaft élève le niveau en début de deuxième période
L'Allemagne a, de manière très logique, augmenté son niveau d'intensité en début de deuxième période, et Yann Sommer a alors eu l'occasion de montrer une partie de ses qualités, notamment sur une frappe de Jamal Musiala, bien boxée par le portier suisse (50e). Toni Kroos a ensuite tiré largement à côté (55e), mais la Suisse se mettait à reculer de manière assez significative. David Raum a encore pu tirer, au-dessus, à la 63e, et la Mannschaft s'installait dès lors résolument dans le camp suisse.
Murat Yakin change toute sa ligne offensive à la 65e
Conscient du danger, Murat Yakin décidait d'amener du sang frais en sortant Breel Embolo (logiquement fatigué) pour le remplacer par Kwadwo Duah dans le même registre, mais aussi Fabian Rieder et Dan Ndoye, ses deux milieux offensifs, pour laisser place à Zeki Amdouni et Ruben Vargas. Le sélectionneur a donc remplacé l'intégralité de sa ligne offensive en cette 65e minute, afin de pouvoir amener des jambes neuves et pouvoir jouer les contres à fond.
Coïncidence ou non, la Nati souffrait dès lors beaucoup moins, en tout durant les premières minutes après ce triple changement, et Julian Nagelsmann, constatant l'impuissance offensive de son équipe, a décidé de sortir son duo magique Florian Wirtz et Jamal Musiala à la 76e! Si flamboyants depuis le début de la compétition, les deux hommes n'ont jamais trouvé la solution pour perturber l'arrière-garde suisse, où Fabian Schär, Manuel Akanji et Ricardo Rodriguez ont accompli ce dimanche un travail remarquable, pour ne pas dire plus.
Ils ont cependant craqué à la 92e face à Niclas Füllkrug, toujours aussi redoutable de la tête, et qui a pu placer son coup de boule au bon endroit pour tromper Yann Sommer. Rageant et frustrant! La Nati avait en effet marqué le 2-0 par Ruben Vargas un peu plus tôt, une réussite annulée pour hors-jeu, et une frappe monumentale de Granit Xhaka, élu «homme du match» a été déviée en corner par Manuel Neuer peu après...
Place désormais à ce huitième de finale, l'objectif minimal! Que ce soit face à la Croatie, l'Italie ou l'Albanie, une chose est sûre: le coup sera jouable. Pas facile, bien sûr. Mais jouable.