Face à la Suisse ce jeudi
Rigobert Song, le «Commandeur» du Cameroun

Une qualification au Mondial à la dernière seconde: la carrière de sélectionneur de Rigobert Song a commencé par un miracle, encore un pour la légende du football camerounais, qui met au Qatar son aura au service des Lions Indomptables, sa plus belle histoire d'amour.
Publié: 23.11.2022 à 21:45 heures
Le Cameron de Rigobert Song affronte la Suisse ce jeudi au Qatar.
Photo: keystone-sda.ch

Pour son deuxième match sur le banc, la magie a encore opéré en barrages pour rejoindre la Coupe du monde, avec un but de Karl Toko Ekambi pour vaincre l'Algérie (2-1 a.p.), qui venait pourtant tout juste de marquer. Grand «Manyan» (qui signifie «frère» en bassa, sa langue maternelle) avait encore sauvé la patrie.

«Rigo, c'est la statue du Commandeur», explique à l'AFP son adjoint français, Sébastien Migné. «Au Cameroun, c'est l'Immortel après ce qui lui est arrivé.»

Quand un AVC a manqué de terrasser cet immense défenseur en 2016, un pays entier s'est recueilli dans les prières et le sphinx s'est relevé. Aujourd'hui, à 46 ans, il est la figure de proue des campagnes pour la santé cardiovasculaire dans son pays.

Son image, tresses et pagnes colorés, s'affiche aussi pour toutes sortes de publicités dans les rues de Yaoundé ou de Douala. Bref, l'ancien joueur de Metz, Liverpool, West Ham, Lens ou Galatasaray est une institution.

Recordman avec les Lions Indomptables

Rigobert Song Bahanag détient, outre son grand nombre de surnoms, signe infaillible de popularité, de nombreux records du foot camerounais et même africain.

Recordman des sélections avec les Lions Indomptables (137), il est également le seul joueur à avoir disputé huit Coupes d'Afrique (il en a remporté deux, en 2000 et 2002) et personne sur le continent n'a joué autant de matches de CAN que lui: 36.

Défenseur puissant et agressif, il est aussi le seul joueur deux fois exclu en Coupe du monde avec Zinédine Zidane. Après avoir vu rouge contre le Brésil à 17 ans, en 1994, pour son deuxième match, il a écopé de deux jaunes contre le Chili en 1998.

Enfin il est le seul Africain avec ses coéquipiers Samuel Eto'o (devenu son président, à la tête de la Fédération camerounaise) et Jacques Songo'o à avoir participé quatre fois au rendez-vous mondial (1994, 1998, 2002 et 2010).

«Avoir disputé quatre Coupes du Monde me rend plus que fier», racontait-il au site de la FIFA en 2020. «Je connais de nombreux joueurs réputés qui donneraient tout pour en disputer une seule.»

Incarnation du «hemle», la «grinta» à la camerounaise, Song a puisé dans une enfance difficile sa rage de vaincre.

Il n'a pas connu son père, Paul Song, décédé quelques mois après sa naissance, le 1er juillet 1976 dans son village de Nkenglikok, et a été élevé par sa mère, Bernadette.

«Ce fut une période difficile, nous vivions nombreux dans une même chambre et pour payer mon loyer, je devais remplir un fût de 200 litres d'eau tous les matins», raconte-t-il au site camlions.com.

Il grandit à Essos à Yaoundé, la capitale. Déjà en minimes, il est capitaine de Brésil, une équipe de ce quartier, jouant sur le terrain du lycée bilingue franco-anglais.

Le foot va le sortir de la précarité, Rigobert sort major de la première promotion de la célèbre école de football des Brasseries du Cameroun, d'où sont aussi partis Eto'o, Geremi Njitap ou Pierre Womé.

«Sa qualité première est son courage»

Dès 15 ans, il signe en 2e division au Red Star Bangou, pour gagner un peu d'argent et aider sa mère, une expérience rude. «J'ai mangé la pierre», image Song.

Ce parcours l'endurcit. «Sa qualité première est son courage. Il est psychologiquement très fort», explique Joël Muller, qui a été son entraîneur à Metz et Lens.

A 16 ans, il rejoint le Tonnerre de Yaoundé, un des plus grands clubs du pays, et découvre la sélection, et la Coupe du monde 1994, à seulement 17 ans, «une immense fierté de représenter mon pays».

«J'aime le Cameroun. Lorsque je vois un symbole qui représente la nation, je tremble, pas de peur, mais de force», résume-t-il.

Pendant 17 ans il fait honneur au maillot national, qu'il sert désormais autrement, pour entrer plus encore dans la légende et essayer de rejoindre les héros de 1990, autour de Roger Milla, premiers quarts de finalistes africains.

(AFP)

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