Derby lausannois ce dimanche
Ludovic Magnin: «Les critiques, ça touche toujours»

Interview avec Ludovic Magnin avant le derby de Lausanne entre le LS et le SLO. L'entraîneur du club de la Tuilière revient sur les difficultés de son équipe et la négativité qui l'entoure.
Publié: 15.04.2023 à 06:01 heures
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Dernière mise à jour: 16.04.2023 à 11:47 heures
Le Lausanne-Sport de Ludovic Magnin occupe la deuxième place provisoire de Challenge League, à quatre points d'Yverdon.
Photo: Pascal Muller/freshfocus
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Ugo CurtyJournaliste Blick

A huit journées de la fin de la saison, le Lausanne-Sport est (presque) dans les temps de passage prévus pour son «opération remontée». Les Vaudois occupent la deuxième place, synonyme de promotion directe. Mais ils comptent quatre points de retard sur Yverdon, leur rival cantonal. Un classement insuffisant pour que les hommes de Ludovic Magnin, et «Ludo» lui-même, n'évitent les critiques.

Tout se jouera sur les derniers matches dans cette Challenge League à nouveau passionnante et indécise. Wil, Thoune et le Stade-Lausanne-Ouchy peuvent encore jouer les trouble-fêtes. Le SLO (5e) se déplace justement à la Tuilière pour le derby de Lausanne (16h30). L'occasion de rencontrer longuement Ludovic Magnin pour une interview dans le joyau du LS.

Il faut à peu près quatre heures pour rentrer de Bellinzone. Est-ce que le trajet vous a paru plus long vendredi dernier après votre défaite?
Non, ça a été aussi long qu’à l’aller. On n’a pas eu de bouchons: c’était déjà ça. Le dimanche d’avant, nous avions joué un match extraordinaire contre Yverdon, avec douze mille spectateurs dans le stade. C’était un grand moment. Cinq jours et un long voyage plus tard, on n’a pas réussi à gérer ces émotions vécues. Je crois qu’on a cadré un seul tir à Bellinzone.

Vous n’avez obtenu que deux points en quatre matches contre le néo-promu Bellinzone.
J’espère qu’on ne regrettera pas ces points à la fin de l’année. Cela fait partie des matches que tu dois gérer beaucoup mieux si tu veux passer une fin de saison plus tranquille. Donc voilà, on sera dans la mouise jusqu’au bout. Ça, on le savait au début, même si on espérait pouvoir faire la différence plus vite dans la saison. C’est à l’image des derniers exercices en Challenge League. Ça s’est joué au dernier match. Vous pouvez aller demander à Aarau.

En tant qu’entraîneur, ça doit quand même être frustrant parce qu’à chaque fois qu’on a l’impression que le LS a passé l’épaule, qu'il a sorti un grand match, il y a une rechute.
Oui, bien sûr. C’est quelque chose qui nous travaille dans le staff parce qu’on essaie de trouver des solutions pour réussir à passer l’épaule définitivement. Mais, encore une fois, à part quelques exceptions, mon équipe est composée de joueurs qui ont surtout l’expérience de la Challenge League. Des bons joueurs de Challenge League certes, mais j’ai un peu de peine à comprendre que les gens croient qu’on doit marcher sur cette ligue.

Vous trouvez que les reproches sont injustes?
Nous avons des bilans positifs contre les équipes du haut de classement. En 2023, on n’a perdu que deux matches. Il ne faut pas non plus tomber dans une trop grande négativité, même si c’est à l’image de notre société. La dernière fois que j’ai vérifié, nous étions à la deuxième place et provisoirement promu.

Mais en étant le Lausanne-Sport, c’est aussi normal que la pression soit plus grande et que le moindre faux-pas ait un autre retentissement, non?
Bien sûr, mais je suis aussi surpris de la morosité en Suisse romande. C’est peut-être aussi pour ça que ça fait presque 25 ans qu’ils n’ont pas gagné un titre. Quand un journal critique notre derby contre Yverdon, je ne vois pas le même foot qu’eux. Je trouve qu’on a fait une très, très, très, très, très grande première mi-temps. Vraiment. Après, je dois respecter les avis des autres, mais j’ai aussi vécu des expériences différentes en Suisse allemande et en Autriche.

Vraiment? A Zurich, Blick alémanique, et d’autres titres, peuvent être très durs.
Oui, j’ai aussi vécu ça quand j’étais à la tête du FCZ. J’ai le souvenir que c’était plus pondéré. J’ai toujours cru que Blick alémanique avait les plus grands couteaux. Mais, je suis très surpris de ce journalisme de boulevard en Suisse romande.

Vous trouvez que la presse romande a changé?
Quand j’étais joueur, les journalistes qui nous critiquaient venaient voir les entraînements. Ce n’est plus le cas aujourd’hui et ils se permettent de critiquer malgré tout. J’ai un gros problème avec ça. De nos jours, il n’y a plus cette relation au quotidien. C’est le même fossé qui se creuse avec les arbitres. Maintenant, il faut juste faire du buzz, peu importe comment l’équipe travaille.

Ce n’est pas la première fois que vous citez un article qui ne vous a pas plu. Vous lisez tout?
Non, mais j’ai beaucoup d’amis. Avec les smartphones et les réseaux, à chaque fois que l’équipe se fait déguiller, je reçois l’article. Les entraîneurs qui disent qu’ils ne lisent pas les critiques, je n’y crois pas. Ou alors, je ne sais pas où ils vivent.

Les critiques vous touchent?
Les critiques, ça touche toujours. Surtout, si tu n’es pas d’accord. Oui, tout n’est pas parfait. Je suis le premier à le dire. C’est aussi normal pour une grande équipe qui est tombée en deuxième division. En Liga espagnole, 11 entraîneurs ont été dégagés. Un record. On est des êtres humains et on a aussi le droit à l’erreur. Je n’aurais sûrement pas dû aligner Kukuruzovic deux fois en cinq jours. J’assume. Mais cette négativité est de plus en plus pesante à vivre.

Est-ce que les critiques sont plus nombreuses parce que la montée du LS est un dû?
Oui, pour ceux qui ne connaissent pas bien le football. Notre objectif, c’est la montée. Mais dans les moments où le bateau est dans la tempête, il faut rester positif. Il ne va pas forcément couler. Attendons la dernière journée pour faire le bilan. On oublie aussi, par exemple, que nous avons dû faire dix mois sans notre capitaine Kukuruzovic, qui était un point essentiel de notre plan. C’est un exemple parmi d’autres.

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Quelle serait la plus grosse critique que vous pourriez faire à votre équipe?
Actuellement, c’est d’avoir perdu des points contre les clubs du fond de classement. Mais ce que je retiens, c’est aussi que mes gars prennent des coups, ne lâchent rien. Depuis le premier jour, j’ai dit qu’on n’allait peut-être pas toujours faire du grand foot, mais qu’on mouillerait notre maillot.

Vous avez la sixième attaque de championnat, tout en ayant le meilleur buteur de la ligue. C’est quand même assez étonnant, comme statistique.
Oui, mais on a aussi la meilleure défense. Alors oui, on est dépendant de Brighton (Labeau). Je n’ai pas un deuxième attaquant qui marque 7 ou 8 buts. On va devoir jouer 8 matches et monter comme ça. J’accepte cette remarque et cette analyse parce que c’est fondé. Je peux vivre avec ce genre de raisonnement.

Vous allumez tous les matins un cierge pour que Brighton Labeau reste en bonne santé?
Même trois, quatre par jour (rires). J’ai déjà des plans B et C s’il devait arriver quelque chose. Mais, je touche du bois (ndlr: il frappe sur la table).

Qu’est-ce que l’arrivée d’un préparateur mental dans le staff, au début de l’année, a changé dans votre façon de travailler?
C’est une équipe de trois personnes. Ils connaissent bien le groupe désormais et ils ont un rôle à jouer dans notre bonne forme en 2023. C’est une petite pièce d’un puzzle que j’espère avoir terminé dans huit matches. Il ne nous enlève pas de pression, mais, au contraire, nous aide à la gérer, notamment pour les jeunes ou des joueurs qui n’ont pas l’habitude de devoir jouer le haut du classement. Le football a longtemps été fermé sur ces sujets. Joueur, j’étais très négatif par rapport à ces psychologues du sport. Cette personne m’a redonné confiance en leur travail.

Il y a le cas Aldin Turkes, qui n’est pas simple à gérer. Pour son retour, il avait marqué un doublé fou en Coupe contre Zurich. Depuis, tout est plus compliqué.
On a une relation particulière parce qu’on se connaît depuis des années. Je comprends tout à fait sa douleur et sa colère quand il ne joue pas. Après, c’est aussi un joueur professionnel. A Bellinzone, on a joué quarante minutes avec deux attaquants et je n’ai pas vu les chances de goal que j’espérais. Aldin revient d’une immense blessure. Les supporters se souviennent du joueur qu’il était il y a trois ans. Ça ne va pas l’aider si on lui rabâche sans cesse cela. Il avait mis ce doublé en Coupe. Peut-être qu’il mettra le goal de la victoire dimanche contre le SLO ou lors de la dernière journée. Je ne vais pas regarder le nombre de buts, mais leur importance.

Et pour l’avenir, vous avez déjà pris une décision?
Il n’y a pas seulement Aldin, d’autres joueurs sont en fin de contrat au terme de la saison. Naturellement, c’est encore difficile de planifier l’avenir. On est obligé de plancher sur deux options, une en Super League, l’autre en Challenge League. Forcément, un scénario nous plaît plus que l’autre. Sans sécurité, on ne peut pas non plus faire de promesses aux joueurs. Si certains, qui sont libres en juin, décident de signer ailleurs comme c’est leur droit, on ne va pas les empêcher. Si on en perd un ou deux, on ira en chercher d’autres.

Dernière question, Thoune est l’équipe en forme depuis février, avec un effectif pléthorique. Est-ce que c’est votre principal concurrent?
Thoune est une belle équipe, qui en forme, c’est vrai. Mais, nous avons toujours trois points d’avance sur eux. Non, actuellement, je pense surtout à Yverdon qui a quatre points d’avance en tête du classement. YS me fait penser au FC Zurich de la saison dernière. Tout le monde disait qu’ils allaient s’écrouler. Mais un club qui est dans le flow, qui prend du plaisir et qui n’a pas de pression, ils sont difficiles à freiner. Zurich a fini champion.

Challenge League 24/25
Équipe
J.
DB.
PT.
1
FC Thoune
FC Thoune
20
16
39
2
FC Aarau
FC Aarau
20
10
35
3
Etoile Carouge FC
Etoile Carouge FC
20
4
31
4
FC Wil
FC Wil
20
7
29
5
FC Vaduz
FC Vaduz
20
-2
29
6
FC Stade-Lausanne-Ouchy
FC Stade-Lausanne-Ouchy
20
7
26
7
Neuchatel Xamax FCS
Neuchatel Xamax FCS
20
-9
25
8
AC Bellinzone
AC Bellinzone
20
-4
21
9
FC Stade Nyonnais
FC Stade Nyonnais
20
-17
19
10
FC Schaffhouse
FC Schaffhouse
20
-12
16
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