Une première à 30 ans
Clint Capela: «Je me réjouis de découvrir le rôle de père»

A 30 ans, Clint Capela s’apprête à devenir père pour la première fois. Entre rumeurs de transfert et réflexions sur l’avenir, le basketteur genevois nous a reçus à Atlanta.
Publié: 11.03.2025 à 08:04 heures
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Dernière mise à jour: 11.03.2025 à 10:40 heures
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«Après ma carrière, je m'imagine bien retourner au Texas, d'où vient ma femme», explique le basketteur.
Photo: NBAE via Getty Images
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Grégory BeaudJournaliste Blick

«Si mon agent appelle, cela veut dire que j’ai été transféré. Je devrais donc faire mes valises et rejoindre une autre équipe dès demain.» Lors de notre visite début février, Clint Capela était dans une période d’incertitude. Il pouvait en effet être transféré à n’importe quel moment jusqu’au 7 février à 15 heures. Passé cette date butoir, il était assuré de terminer la saison avec les Atlanta Hawks. C’est dans ce contexte potentiellement tendu qu’il nous a reçus. Mais pas pour lui. «Ce n’est pas quelque chose qui me stresse plus que tant, précise le Genevois. Avec les années, j’ai appris à relativiser. J’étais surtout stressé d’être encore à Atlanta au moment de cette interview (rires).»

Le téléphone dans la main, le pivot des Atlanta Hawks trouve tout de même du temps pour passer une soirée en notre compagnie. Lorsque Clint Capela entre dans la salle du restaurant True Food Kitchen d’Atlanta, les regards se tournent assez logiquement vers lui. Est-ce parce qu’il est le pivot des Atlanta Hawks ou parce qu’il mesure 2m08 et doit baisser la tête pour entrer? «J’ai arrêté de me poser cette question», rigole-t-il. Sélectionné il y a désormais dix ans par une équipe de NBA, le basketteur genevois vit sa vie à l’américaine. «J’aime la mentalité des gens ici, poursuit-il. Je me sens bien et on te laisse généralement tranquille.»

Sa présence dans ce restaurant résolument axé sur les plats sains et de saison peut surprendre. Non pas pour la carte très à la mode, mais pour le standing. En effet, là où on pourrait l’imaginer à la meilleure table d’Atlanta ou dans un restaurant bling-bling, Clint Capela préfère ce lieu charmant, mais en rien tape-à-l’œil. «Quand tu commences en NBA, il y a énormément de tentations autour de toi, c’est sûr. C’est sûrement mon côté suisse et prévoyant (rires). Je me sens bien dans un endroit comme celui-ci.» Son seul excès ce soir-là? Un second plat. «J’ai une excuse, rigole-t-il. J’ai fait deux entraînements dans la journée. Ça creuse.»

«Après ma carrière, je m'imagine bien retourner au Texas, d'où vient ma femme», explique le basketteur.
Photo: NBAE via Getty Images

S’il est toujours actif et devrait jouer quelques années encore, c’est tout naturellement qu’il est déjà en train de penser à la suite. Bien qu’il soit encore jeune, le pivot de 30 ans sait que sa carrière pourrait s’arrêter rapidement, lui qui en est à sa dixième saison dans la ligue. «La carrière moyenne d’un joueur est de quatre ans, remarque-t-il. En un sens, ce n’est pas normal que je sois encore là. Ce sont énormément de sacrifices et de travail.» Son contrat avec les Atlanta Hawks se termine d’ailleurs à la fin de la saison actuelle. Mais il ne s’inquiète pas. Son expérience devrait lui permettre de parapher une nouvelle entente ailleurs.

Accouchement imminent

En ce moment, sa préoccupation principale est d’être à l’écoute de sa femme enceinte. «Le terme est dans un mois, se réjouit-il. Cet enfant va changer notre vie.» L’enfant? Le couple a-t-il décidé ne pas connaître le sexe du bébé? «Non, non. Il s’agira d’un petit garçon.» Les yeux du futur papa s’illuminent. «Comme il va grandir ici, ce sera un petit Américain qui possédera également la nationalité suisse. Je vais faire en sorte de lui parler en français et qu’il apprenne à connaître ses origines.»

Clint Capela vient d’obtenir le passeport américain. «Je remplissais tous les critères et, pour la suite de ma vie, cela avait du sens.» A 30 ans, «CC15» pense forcément à son avenir et à l’après-carrière. Il sait que le moment où les projecteurs vont s’éteindre se rapproche. «Et cela ne me fait pas peur, ni ne m’inquiète, précise-t-il. Quand tu es jeune, c’est forcément agréable. Mais avec les années, je pense avoir appris à apprécier les moments où je passe inaperçu.» Même si, en sortant du restaurant, plusieurs paires d’yeux se sont retournées à son passage. Mais il ne les a pas remarquées. Question d’habitude.

Il tente aussi de vivre incognito dans son quartier, où il a accepté de nous recevoir. Sa maison se situe à Sandy Springs, une banlieue charmante à une trentaine de minutes du centre. On pourrait s’attendre à un lotissement protégé ou au minimum à un portail afin de préserver son intimité. Il n’en est rien puisque le logement a pignon sur rue. «Mes voisins ne savent même pas que je vis ici, rigole-t-il. C’est ce que j’apprécie dans ce coin de la ville. Ce sont des avocats et des médecins et tout est très calme. Quand je promène mon chien, on ne vient pas me parler, même si cela ne me dérangerait pas forcément.»

C’est d’ailleurs l’une des raisons qui devraient le pousser à rester de l’autre côté de l’Atlantique au terme de sa carrière de joueur professionnel. Mais plus à l’ouest, car Clint Capela a de nombreuses attaches au Texas. C’est là qu’il a vécu durant six années lorsqu’il jouait pour les Houston Rockets. «Et ma femme vient de là-bas également, précise-t-il. Pas de la ville même, mais à une heure de voiture. Cela fait près de dix ans que nous nous connaissons et elle m’a suivi à Atlanta. C’est logique que nous retournions y vivre.»

Assis au bord de la piscine, il rigole: «Et là-bas, ce serait même possible d’en profiter en février. Le climat me convient mieux.» D’ailleurs, il propose de rentrer sitôt les photos effectuées. La maison est moderne et les plafonds terriblement élevés. Même pour un basketteur qui peut avoir tendance à distordre la réalité. «C’est vrai que lorsque l’on ne prend que moi en photo, cela peut avoir tendance à rendre tout un petit peu plus petit», sourit-il au moment de monter à l’étage dans la pièce dédiée à ses baskets.

Les millions ne l’ont pas changé

Durant sa carrière, Clint Capela a amassé beaucoup d’argent. Mais les millions ne l’ont pas changé, même s’il est plus loquace que lors de notre première rencontre il y a une quinzaine d’années. «J’étais un jeune garçon timide. Mais j’ai changé. Au début de ma carrière, je pense que je n’étais pas aussi accessible que maintenant. On nous met beaucoup en garde contre les personnes qui gravitent autour de nous après avoir signé de gros contrats. J’étais devenu plus méfiant.»

Ce qui lui a permis de ne pas se disperser. «Le danger est bien réel, précise-t-il. Tout le monde trouve une bonne raison de t’appeler pour financer un projet plus ou moins sérieux (rires). J’ai pu compter sur ma famille et également sur ma femme. Nous sommes ensemble depuis mes 21 ans et c’est quelqu’un de très humble qui a les pieds sur terre. Cela m’a beaucoup aidé de pouvoir compter sur elle.»

Le Genevois pense n’avoir pas eu trop besoin d’aide extérieure pour ne pas tomber dans différents pièges liés à son statut de jeune homme riche. Cette saison, il touche encore 22 millions de dollars. Il s’agit de son plus haut salaire depuis le début de sa carrière. Ses gains accumulés entre 2015 et 2025 dépassent les 130 millions de dollars.

S’il est américain dans sa manière de vivre, Clint Capela est davantage suisse au moment de ses investissements. «Très tôt dans ma carrière, je me suis entouré des bonnes personnes. C’était très important de ne pas faire n’importe quoi. J’avais une occasion de vivre du basketball mais aussi de soutenir mes proches. En ce sens, je sais que c’est une chance. Mais au-delà de l’argent, je me concentre juste sur le bonheur d’être en vie et d’avoir une famille en bonne santé.»

Clint Capela a reçu le Prix Sekou Smith récompensant le joueur le plus intègre et le plus professionnel de son équipe. Ce prix a été créé en hommage à un journaliste décédé en 2021.
Photo: NBAE via Getty Images

Dans la bouche du deuxième basketteur suisse de NBA, le mot chance n’est pas associé à l’irrationnel, mais à une volonté ferme d’y arriver. «Pourquoi j’ai réussi? Je ne me suis jamais reposé sur mes lauriers et j’ai continué à travailler encore et encore.» Et cela a fonctionné. «A 19 ans, lorsque je deviens pro, un nouveau coach a décidé de me donner un rôle plus important. Qui sait ce qui serait arrivé si son prédécesseur était resté?» Une question à laquelle il ne cherche pas de réponse. «C’est pour ça que l’on peut parler d’opportunité à saisir, mais aussi de chance.»

Ce milieu du basket qui lui a tout donné, il se voit bien continuer d’y évoluer après sa carrière. «Mais pas comme entraîneur, précise-t-il. Après avoir été un sportif professionnel, j’ai l’impression d’apprendre une nouvelle vie. Celle d’homme accompli et, bientôt, de père de famille. Je commence à me construire davantage en tant que personne et plus uniquement comme un athlète.»

Sur la table, son téléphone s’est allumé. «C’est mon agent, je dois le rappeler.» Il reviendra quinze minutes plus tard, mais n’a pas été transféré. «Il reste quelques heures jusqu’à la date limite, précise-t-il. Mais il est probable que je reste ici. Ainsi je pourrai encore profiter un peu de ma vie à Atlanta en attendant de déménager cet été. C’est mieux comme ça, car je préfère que notre enfant soit né plutôt que de déménager alors que ma femme est en fin de grossesse.»

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