Sa grand-mère, sa famille, son amour, ses objectifs
L'univers de Mujinga Kambundji, reine du sprint européen

Elle a marqué de son empreinte les championnats d'Europe d'athlétisme. La Bernoise a remporté l'or sur 200 m et l'argent sur 100 m à Munich. Plongez dans son monde.
Publié: 21.08.2022 à 15:46 heures
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Elle a battu tous les autres : Mujinga Kambundji est championne d'Europe du 200 m.
Photo: Anadolu Agency via Getty Images
Emanuel Gisi, Munich

A partir de quand peut-on qualifier quelqu’un de légende de son sport? Mujinga Kambundji (30 ans) est la plus grande athlète que la Suisse ait jamais connue. Un statut qu’elle a cimenté cet été. Nouveaux records suisses sur 100 m (10’89) et 200 m (22’05), des médailles d’or et argent aux championnats d’Europe, le titre mondial en salle, et deux qualifications pour la finale aux Mondiaux d’Eugene.

Sa famille

L’histoire a souvent été racontée, mais elle est toujours aussi belle. Les quatre sœurs Kaluanda, Mujinga, Muswama et Ditaji, ont conquis l’athlétisme suisse, accompagnées de leurs parents Ruth et Safuka.

Mais le clan Kambundji ne s’arrête pas là et comprend aussi Hanni Nafzger (88 ans). La bien aimée grand-mère assistait pour la première fois à un grand événement international, mais refuse le titre de porte-bonheur malgré les deux médailles. «Mujinga a tout fait seule. L’ambiance est magnifique à Munich. Il ne m’a manqué que l’hymne national sur le 100 m.»

La ferme de la grand-mère Hanni est pour Munjinga une oasis. «L'endroit où je vais quand j’ai besoin de calme. Loin de la ville, il y a toujours quelque chose de bon à manger, un endroit chaud près du poêle en hiver ou un endroit ensoleillé en été. C’est aussi là que la famille se réunit.»

Son amoureux

C’est à Mannheim, chez l’entraîneur Valerij Bauer, qu’ils se sont rencontrés et sont tombés amoureux. Depuis six ans, Mujinga Kambundji et Florian Clivaz sont en couple. Le Romand de 27 ans est aussi devenu son manager et l’un de ses entraîneurs de la sprinteuse.

«J’apprécie son avis, son expertise, explique Mujinga. En compétition, mon sang n’est pas dans mon cerveau, mais dans mes jambes. Impossible de me poser de questions compliquées. Il a le don de prendre en charge la partie analytique dans ces moments-là.»

A Munich, le duo entretient une relation très professionnelle. «Nous avons des chambres séparées à l’hôtel, explique Florian Clivaz. Je suis là pour elle quand elle a besoin de moi.»

«Nous faisons un peu comme lorsqu’un autre coach s’occupe de moi: on se voit au repas, puis on repart chacun de son côté, poursuit Mujinga. Il faut une certaine distance quand je suis en mode compétition.» Jusqu’à présent, cela se passe bien. Les deux ont bien réfléchi à la question en amont. «C’est un bon test, sourit Florian Clivaz. Si ça marche, alors tout marchera.»

Ses fans

En parlant d’amour, celui dont bénéficie Kambundji dans le monde de l’athlétisme est impressionnant. Les fans du monde entier semblent se réjouir sincèrement de son titre européen. Depuis un an ou deux, sa popularité semble avoir encore augmenté.

«Je l’ai déjà ressenti aux championnats du monde d’Eugene, explique la principale intéressée. Les télévisions allemande et française me voulaient à l’interview. J’ai pris conscience que je suis désormais attendue». Et d’ajouter en riant: «Bon, ça fait un moment que je suis là aussi!»

Son esprit sportif

Lorsqu’on parle à Mujinga Kambundji de la finale du 100 m de mardi, la Bernoise n’affiche aucune frustration. Pourtant, elle n’a été battue que de cinq millièmes par Gina Lückenkemper. Une concurrente qui ne lui arrive normalement pas à la cheville.

«Pour moi, il a toujours été clair qu’il fallait faire attention à elle. Surtout à Munich devant son public, relativise la Suissesse. Pour notre sport, c’est bien si les Allemands gagnent à domicile. Si les gens qui viennent au stade vibrent, ils reviendront. Tout le monde en profite.»

A tel point que Mujinga Kambundji s’est réjouie à l’arrivée du 100 m pour Gina Lückenkemper. «Ah, cool», a-t-elle pensé en voyant le «1» s’allumer à côté du nom de l’Allemand. «Puis j’ai réalisé: 'Zut, ça veut dire que je ne suis que deuxième', sourit Mujinga. Mais Gina m’a battue, elle était plus rapide que moi. Elle l’a bien mérité.»

Sa maturité

Lorsqu’elle a manqué de peu la finale du 100 m des championnats du monde à Doha il y a trois ans, elle n’a pas aussi bien géré. «Il m’a fallu plus d’une soirée et un coup de téléphone mes proches pour que je passe à autre chose.»

La suite appartient à l’histoire. Dans l’épreuve du 200 m, elle a décroché le bronze. Une première pour le sprint suisse.

Cette année, après avoir manqué de peu l’or sur la discipline reine, la Bernoise n’a pas paniqué. «Je suis arrivé à un endroit de ma carrière où je peux gérer ce genre de situations. J’ai beaucoup mûri et j’en suis heureuse.»

Son entraînement

Quiconque a déjà observé un entraînement de sprint le sait: ce n’est pas vraiment spectaculaire à regarder. Où est-ce que Mujinga Kambundji y trouve de la satisfaction? «Pouvoir travailler sur soi-même, s’améliorer et devenir plus constante. C’est ce qui me fascine.» La Suissesse y parvient manifestement. Et ce, année après année.

Avec son coach et confident de longue date Adrian Rothenbühler, l’entraîneur national de sprint Patrick Saile et Florian Clivaz, elle s’est constituée en Suisse une équipe entièrement adaptée à ses besoins.

Ses nouveaux objectifs

Sur le plan sportif, Mujinga Kambundji n’est pas rassasiée: «Je veux aller plus vite, décrocher encore plus de médailles.» Chez la Bernoise, la quête de perfectionnement ne s’arrête pas au bord du tartan. D’ailleurs, il y a un domaine dans lequel elle doit encore s’améliorer: «Devenir plus ponctuelle. Avant c’était horrible, maintenant c’est déjà un peu mieux.»

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