Possible augmentation à 24 en 2027
La Suisse a-t-elle une chance de participer au Mondial de rugby?

World Rugby souhaite augmenter le nombre de participants à sa Coupe du monde, de 20 à 24. 28e nation au classement mondial, la Suisse aurait-elle une chance d'y prendre part? Réponse avec des protagonistes du rugby helvétique.
Publié: 18.10.2023 à 12:00 heures
La Suisse est bien partie pour rejoindre la deuxième division européenne l'année prochaine.
Photo: imago/Kessler-Sportfotografie
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Matthias DavetJournaliste Blick

La Coupe du monde de rugby bat son plein depuis plus d'un mois chez nos voisins français. Un engouement qui se ressent chez les quelque 4900 licenciés de Suisse Rugby. D'ailleurs, l'équipe nationale U16 s'était rendue à Lyon pour voir la large victoire de la France face à l'Italie (60-7). Et lorsque Blick contacte Aurélie Lemouzy, celle-ci se trouve dans un train, également en direction du Mondial.

Une compétition qui, aujourd'hui, réunit vingt nations séparées dans cinq groupes. Selon nos confrères du «Times» et du «Telegraph», World Rugby envisagerait d'élargir la compétition à 24, déjà pour sa prochaine édition en 2027 en Australie. Présidente de Suisse Rugby depuis le début de cette année, Aurélie Lemouzy sait que ce format «rapprocherait l'équipe d'une qualification». Actuellement, la nation à croix blanche est 28e du classement World Rugby.

Dans le bon timing

Mais surtout, la Suisse est sur la bonne voie pour a minima jouer les qualifications du Mondial 2027. Actuellement en Trophy – la troisième division du rugby européen –, la Nati est en bonne position pour terminer première et être promue en Championship. Le deuxième niveau en Europe offre deux (voire trois) places de qualification pour une Coupe du monde d'un format à 20 équipes.

En tout cas, le sélectionneur de l'équipe de Suisse est plus qu'optimiste. «On est dans un très bon timing, annonce Olivier Nier. Si on fait une très bonne saison et qu'on obtient la promotion, on a ensuite deux années pour nous maintenir, puis deux années pour nous qualifier.» Impensable il y a six ans lorsque le sélectionneur a repris l'équipe, qui pointait au 54e rang mondial. La force d'Olivier Nier? La patience.

2027? «Ça ne paraît pas réaliste»

Mais pour la présidente de Suisse Rugby, 2027 semble encore un peu proche. «En Europe, la concurrence est la plus rude, avertit Aurélie Lemouzy. Ça nous permettrait déjà de participer à des matches de qualification et ce serait intéressant en termes de sponsoring.» Pour celle qui travaille aussi au CIO, une participation dans quatre ans «ne paraît pas réaliste». «Pourquoi pas d'ici 8 à 12 ans, même s'il est difficile de se projeter autant loin, freine Aurélie Lemouzy. On progresse, mais les autres nations également et beaucoup de pays vont vouloir taper à la porte de la Coupe du monde.»

En 2020, la Suisse avait décroché une victoire de prestige face à l'Allemagne.
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Et les principaux intéressés dans tout ça, à savoir les joueurs? Qu'en pensent-ils? «S'ils vont ouvrir le Mondial à 24 équipes, on se donne le droit d'y croire un jour ou l'autre», s'exclame Cyril Lin. Le capitaine de l'équipe de Suisse sait que la Coupe du monde est «un rêve pour tout compétiteur».

L'exemple du Portugal

Pour y croire, la Suisse peut prendre en exemple le Portugal – la sensation de ce Mondial auprès des petites nations. Dans la même division que le XV de l'Edelweiss il y a quatre ans, les Lusitaniens viennent de gagner le premier match de leur histoire à la Coupe du monde, dimanche contre les Fidji à Toulouse. Pour y arriver, les Portugais ont fait appel à des talents éligibles qui évoluent dans des championnats étrangers – et qui ne venaient que rarement lorsque la nation évoluait en troisième division. Une opportunité et un réservoir qui existent également en Suisse, selon Olivier Nier.

Et pour y croire, la Nati peut aussi compter sur son sélectionneur d'expérience. En 2011, Olivier Nier avait déjà qualifié la Roumanie à la Coupe du monde en Nouvelle-Zélande. Au dernier tour des barrages, les Roumains s'étaient même offert le scalp de l'Uruguay.

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«L'état d'esprit pour des équipes comme la Namibie ou l'Uruguay, c'est d'essayer de faire des bons matches contre les petites nations et de sauver les meubles face aux gros.»
Cyril Lin, capitaine de l'équipe de Suisse
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Des claques qui n'effraient pas

Mais participer à une Coupe du monde, c'est aussi le risque pour les petites nations de prendre de belles claques face aux grosses cylindrées. Il suffit de voir la Namibie (96-0 contre la France), la Roumanie (84-0 contre l'Ecosse) ou le Chili (71-0 contre l'Angleterre). Une éventuelle augmentation à 24 risquerait même de voir un écart encore plus disparate au niveau des scores et du jeu.

Une possibilité qui n'effraie pas le monde du rugby suisse? «Quand je rentre sur un terrain, c'est pour gagner», annonce Cyril Lin. Le capitaine depuis 2014 se rend toutefois compte de l'écart immense avec les meilleures formations. «L'état d'esprit pour des équipes comme la Namibie ou l'Uruguay, c'est d'essayer de faire des bons matches contre les petites nations et de sauver les meubles face aux gros», explique le Numéro 8 et joueur du Nyon RC.

«Un rapport de force disproportionné»

Son sélectionneur Olivier Nier tient à rappeler que le rugby est très différent des autres sports: «Il y a un rapport de force disproportionné. Il manque aussi des confrontations avec les autres nations et de bonnes conditions d'entraînement.» Mais pour le coach de la Suisse, la Coupe du monde est un accélérateur au niveau des progrès et l'éventuelle augmentation à 24 est un «formidable booster» pour la motivation des troupes.

Si tout se passe bien, la Suisse pourrait être promue en deuxième division européenne l'année prochaine.
Photo: imago images/Kessler-Sportfotografie

Et ce genre d'événement permettrait aussi de mettre le rugby suisse sur la carte du monde – la Nati n'ayant jamais participé à une édition de la compétition. «Ce serait une opportunité de grandir et de s'exposer au rugby de haut niveau», clame Aurélie Lemouzy.

Tous les acteurs se rejoignent sur un point: disputer une Coupe du monde pour l'équipe de Suisse serait quelque chose d'incroyable. «Même si à bientôt 40 ans, ça risque d'être plus compliqué pour moi» sourit Cyril Lin.

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