Katrin Stutz a un rêve: la Suissesse veut conquérir les États-Unis sous les traits de la catcheuse Michelle Green. Au moment de conclure l’entretien, sa dernière phrase est sans doute celle qui résume le mieux sa vie et son attitude. «Je sais que mon projet est improbable, mais je sais aussi que c’est possible d’y arriver.»
Quand elle a franchi la porte d’un café zurichois une heure plus tôt, les clients attablés n’ont certainement rien soupçonné en voyant Katrin Stutz. La jeune femme n’est en Suisse que pour une courte durée. Dans quelques jours, elle sera assise dans un avion en direction de l’Amérique. Notre échange est passionnant. On ne sait souvent pas qui s’exprime, entre Katrin Stutz et son double Michelle Green.
Le Réveillon qui a tout changé
Il y a quelques années encore, la Saint-Galloise n’avait rien à voir avec le catch. Elle travaillait dans le service marketing et la vente de détail. «Quand j’étais adolescente, je regardais l’émission «Bachelor» à la télévision américaine. Juste avant le début du programme, la chaîne diffusait du catch. Je suivais donc les dernières minutes. Ce mélange de sport, d’art dramatique et de divertissement m’a tout de suite fascinée.»
La Suissesse commence à se renseigner sur le sujet, en lisant des articles et en écoutant des podcasts spécialisés. Lors du Réveillon 2019, une amie glisse un billet prophétique à chacun de ses invités. Son message touche dans le mille: «Katrin va faire du catch». Stutz se dit: «Pourquoi pas?»
Trois mois plus tard, elle commence son entraînement à la «Wrestling Academy» de Rorbas, dans le canton du Zurich. La catcheuse en herbe mettra le cap sur l’Allemagne. Mais la pandémie freine son projet. Elle décide alors de rendre visite à une amie au Mexique.
Ce changement de plan est une aubaine pour Katrin Stutz, car le catch est l’un des sports les plus populaires du pays. La Suissesse s’y entraîne assidûment et c’est le déclic! À son retour en décembre 2020, la décision s’impose: elle quitte son emploi au marketing de la Migros: «Si tu veux avoir du succès, tu dois investir 100% de ton temps et de ton énergie dans ton projet.»
Une jeunesse aux quatre coins du monde
En écoutant Katrin Stutz aujourd’hui – un peu plus d’un an plus tard – on se rend vite compte que le catch est devenu la grande passion de sa vie. Tout plaquer et abandonner une situation professionnelle stable ne lui a pas fait peur. Elle connait déjà ça depuis l’enfance. En tant que fille de diplomate, la future catcheuse avait l’habitude de déménager sans cesse et de tout recommencer à zéro.
Née à Flawil dans le canton de Saint-Gall («je garderai secrète mon année de naissance», glisse-t-elle), cette femme à l’énergie débordante a grandi en Allemagne, en Indonésie, en Espagne et au Zimbabwe. Ce n’est que pour ses études universitaires qu’elle a retrouvé Saint-Gall.
Michelle Green, la bad girl
Tout ça, c’est le parcours de Katrin Stutz. Mais cette dernière veut faire briller son double: «The International Swiss Sensation Michelle Green». «Ce qui est génial dans le catch, c’est qu’on peut se créer un tout nouveau personnage. Michelle Green parle cinq langues. Elle est intelligente et belle. Sur le ring, elle joue un rôle de méchante, cherche à se faire du pognon et se fait méchamment siffler par le public.»
Son blase n’a pas été choisi au hasard. Son prénom est tiré de l’archange Michel, dont le nom en hébreu signifie «Qui est comme Dieu?». L’appellation «Green» est un clin d’oeil plus évident à la couleur des dollars américains.
A propos d’argent. L’objectif de Katrin Stutz est de pouvoir vivre du catch. «Disons que je suis actuellement encore en phase d’investissement et je reverse donc mes économies dans mon entraînement et mes objectifs.» N’a-t-elle jamais douté de cette voie hors-norme? «Non! Le plus important dans tout ça, c’est de croire en soi. Si tu ne le fais pas, pourquoi quelqu’un d’autre le ferait à ta place?»
«Shine bright like a diamond»
Pour 2022, Katrin Stutz a un objectif clair: elle veut apparaître à la télévision nationale américaine. Actuellement, elle s’entraîne dans le Tennessee. «Les États-Unis sont le meilleur endroit pour pouvoir vivre du catch.» À plus long terme, elle aimerait être engagée par l’une des deux grandes fédérations, la WWE ou l’AEW. Si elle y parvient, ses soucis financiers ne seront plus qu'un lointain souvenir. «Je parle cinq langues. C’est une caractéristique intéressante pour se démarquer.»
La Saint-Galloise n’en est encore qu’au début de sa carrière. Le plus grand événement de catch annuel, la «Wrestlemania», attire chaque jour 100’000 spectateurs dans les stades américains de football. Pour l’instant, ses combats ont encore lieu dans des gymnases de villes de province. Les longues heures de route font partie de son quotidien. Malgré tout, Katrin Stutz tient à être toujours pimpante et glamour. Même si son environnement ne rime pas encore tout à fait avec strass et paillettes. «Si tu veux être une star, tu dois aussi te comporter comme telle.»
Un entraînement intense
La catcheuse suisse travaille dur pour réaliser son rêve américain. Pour cela, elle est prête à accepter de nombreux sacrifices. En semaine, elle s’entraîne quatre heures par jour, auxquelles s'ajoutent encore deux heures de musculation, l’analyse de ses adversaires et une alimentation stricte.
Le catch, c’est sa vie. «Ceux qui veulent réussir trouveront toujours un moment. C’est possible, donc je vais trouver un chemin vers le sommet».
C’est peu probable: mais c’est possible!