Une barbe qui en dit long sur l’intensité de la bataille navale. Alan Roura a la mine des beaux jours passés en mer. Le marin suisse a le poil long de ceux qui n’ont pas eu le temps de penser à eux. Le final du Vendée Globe a été d’une intensité folle et il n’était plus question de prendre soin de soi. C’était tout pour le bateau et rien pour le marin. Tout pour aller chercher la meilleure des places possibles. Parce que ces hommes et ces femmes, qui tournent autour du monde, sont aussi des compétiteurs dans l’âme, ils ne lâchent rien. Jamais. «Ce matin encore, j’étais 16e et je me suis fait avoir dans le petit temps, soupire Alan Roura, pas rancunier pour deux sous. Je perd deux places mais je ne garde que les bonnes choses après 85 jours de mer qui ont été intenses. Du premier au dernier.»
Tout au long de ce Vendée Globe, Alan Roura a partagé chaque semaine ses impressions avec les lecteurs de Blick. Toujours avec cette franchise et cette sincérité qui le caractérisent. Alors qu’il patientait en mer après le passage de la ligne, il a pris le temps de livrer ses premières impressions après un troisième Vendée Globe bouclé à seulement 31 ans. Pas le temps de souffler qu’il donne déjà rendez-vous à tous les amoureux de la mer pour de prochaines aventures palpitantes.
«L'apéro, c'est pour toi!»
Après de longues heures passées sur le pont de son Hublot à attendre que la mer monte et lui ouvre enfin les portes du chenal des Sables d’Olonne, le skipper suisse a eu droit à son bain de foule. Accompagné de son épouse Aurélia et de sa fille Billie et du petit dernier Marley, un an tout juste, il a été accueilli au ponton d’honneur au son du cor des Alpes et des cloches. Sur la terre ferme, ses deux concurrents du jour l’attendaient aussi pour refaire le match de cette fin de course qui les a vu couper la ligne dans un mouchoir de poche. Benjamin Ferré est arrivé 35 minutes avant Alan Roura, et Tanguy le Turquais a devancé le Suisse de 20 minutes. «Benjamin, t’as pas le choix, l’apéro c’est pour toi», lance Alan. «T’inquiète, je suis chaud comme la braise pour faire la fête, lui répond celui que l’on surnomme 'Pepino'. Déjà aux Açores, j’avais réservé un bistrot pour nous trois mais on n'a pas eu le temps de s’arrêter.»
L’échange entre les trois marins qui se sont connus sur la Mini Transat 2013 illustre bien l’esprit qui anime encore le monde la course au large. Loin du podium, l’humain a encore sa place sur les pontons et le public qui est venu accueillir les trois derniers héros du jour ne s’y trompe pas et leur réserve une belle ovation. Sur la scène, un peu plus tard, Murray Head en personne est apparu pour y chanter son tube «Say It Aint it So Joe», la chanson choisie par Benjamin Ferré pour son arrivée. Une belle surprise partagée par Alan Roura et Tanguy Le Turquais. Inséparables en mer comme sur terre.