«On peut aller en bas, il y a des tables.» Quand on fait remarquer, sur le ton de la blague, à Guillaume Dutoit qu'il a l'air de bien connaître la piscine de Mon-Repos, le Vaudois renchérit. «Oui, d'ailleurs il y a ma chambre juste là-bas», rigole-t-il en pointant du doigt un espace flou. Il faut dire que le plongeur a passé du temps dans le bassin lausannois.
Début 2025 et juste avant son 29e anniversaire, il a décidé de mettre un terme à 20 ans de carrière. Pour Blick, Guillaume Dutoit est revenu sur cette décision, sur sa carrière mais s'est également projeté sur son futur. Interview.
Tu es désormais retraité à 28 ans. Qu'est-ce que ça te fait?
Oh wow, c'est une belle question pour commencer. C'est beaucoup d'émotions, autant positives que négatives. Forcément, je suis arrivé à un certain stade où le plongeon faisait partie de moi. Il faut se retrouver un petit peu – ce qui n'est pas évident. Mais en même temps, je suis super content de terminer cette magnifique carrière et de pouvoir découvrir de nouvelles choses.
Explique-nous un peu les raisons pour lesquelles tu as décidé de prendre ta retraite.
La raison principale, c'est que ça fait plus de 20 ans que je fais ce sport. J'ai gentiment fait le tour. À part les Jeux olympiques, j'ai tout expérimenté. Ensuite, il y a des raisons de santé: j'ai eu quelques petites blessures par-ci par-là. Et finalement, il y a aussi des facteurs de mésententes avec la fédération. Tous ces facteurs m'ont convaincu dans mon choix.
On a l'impression que cette décision était déjà dans ta tête depuis un petit moment. À quand remonte la première fois que tu as pensé à raccrocher?
J'y avais déjà pensé en 2016. À l'époque, je voulais me qualifier pour les JO de Rio et je me demandais ce que je ferais si j'y parvenais ou si j'échouais. Pour Tokyo, c'était pareil. Mais après avoir échoué à deux reprises, je me suis dit que le dernier cycle olympique était plus court, à cause de la pandémie de Covid. Ça m'a motivé à continuer une année supplémentaire – et il y a aussi eu l'ouverture de la nouvelle piscine de la Vaudoise aréna.
Mais pourquoi prendre ta retraite maintenant, en janvier 2025? On aurait pu penser que tu allais le faire en février 2024, après ta non-qualification pour les Jeux de Paris.
Il y a plusieurs raisons. À la fin des qualifications, en février, je ne voulais pas arrêter tout de suite car je voulais participer aux Championnats d'Europe en fin d'année et représenter mon club et ma patrie. Il y avait aussi un test event dans la piscine olympique, juste avant les JO. Être invité à cet événement, même sans faire les Jeux olympiques, c'était très chouette. Et finalement, mettre fin à une carrière demande une vraie réflexion. La nouvelle année a marqué un tournant, avec de nouvelles résolutions.
Et donc, ces Championnats d'Europe…
J'étais plus que prêt. Mais il y a eu une mésentente avec la fédération, qui n'a pas écouté mes besoins. J'avais bien travaillé avec mon entraîneur et un médecin après la déception des JO, surtout que j'étais à la limite de la déprime. Sauf que la fédération m'a interdit de me rendre aux Européens avec mon coach. C'était presque un danger et j'ai simplement décidé de ne pas y aller.
Sur un sujet plus positif, quel est le plus beau moment de ta longue carrière?
C'est difficile à dire, il y en a tellement. Les Jeux olympiques de la jeunesse restent marquants – j'avais encore des yeux d'enfants émerveillés. J'ai aussi adoré les Championnats d'Europe à Rome en 2022, où j'ai partagé des moments incroyables avec mes coéquipiers en synchro. De manière générale, ce sont vraiment ces instants de partage avec mes amis.
Finalement, tu n'as jamais réussi à prendre pas aux Jeux olympiques. Est-ce que c'est une déception dans ta carrière?
Je te mentirais si je te disais que ce n'est pas le cas. Mais j'ai toujours vu les Jeux comme la cerise sur le gâteau. C'est une belle opportunité, mais la compétition est similaire aux Championnats du monde. J'ai travaillé pour que ce soit une motivation, pas un regret.
Est-ce que d'avoir participé à ce test event atténue aussi la déception?
J'ai clairement vécu les Jeux d'une autre manière, puisqu'après je suis aussi allé voir les compétitions et visiter le village olympique. J'ai vécu plus ou moins les JO comme les athlètes, mais sans le stress de la compétition (rires).
La plongeuse fribourgeoise Madeline Coquoz me disait en août dernier qu'après sa retraite, elle n'avait pas réussi à sauter à nouveau. Comment le vis-tu de ton côté?
C'est clair que ce n'est pas évident. Il y a tellement d'émotions qui arrivent quand je rentre dans une piscine. Je ne plonge plus vraiment pour moi. Mais je suis aussi entraîneur et montre parfois des techniques à mes élèves, en sautant. Transmettre mon savoir est gratifiant. Cela me permet de rester connecté au plongeon.
Qu'est-ce que ces 20 ans de carrière t'ont appris?
Je retiens le travail, la discipline, l’amitié, et l’adaptabilité. Cela m’a appris à planifier, à comprendre les autres, et à m’adapter à diverses situations.
Est-ce qu'il y a quelque chose que tu aurais voulu faire différemment, avec le recul?
Je n'ai pas tellement de regret. La seule chose, et c'est peut-être un message que je veux transmettre aux plus jeunes, c'est de s'entourer au plus vite des bonnes personnes. Et sinon, il faut juste kiffer.
Quelle est la suite pour toi maintenant?
Je travaille comme entraîneur au Lausanne Aquatique. Je souhaite également développer mes compétences en santé alternative, comme massothérapeute, réflexothérapeute, et nutritionniste. À terme, j’aimerais me concentrer sur ce domaine.