Les pessimistes diront qu’il n’y a jamais eu autant de femmes aussi rapides en sprint. Comment Mujinga Kambundji pourrait-elle alors remporter une médaille aux Championnats du monde sur 200 m, dans l'Oregon?
L’optimiste répond: il y a trois ans, la femme la plus rapide de Suisse avait déjà terminé troisième à Doha, s'offrant une médaille de bronze historique. Bien sûr, les concurrentes n’étaient pas aussi rapides que maintenant: plusieurs grandes favorites avaient alors fait l'impasse sur la distance. Mais tout de même, la Suissesse avait su monter sur le podium. Pourquoi pas cette fois-ci?
Nouveau record national
Les faits sont là: certes, la concurrence est rapide, mais Mujinga Kambundji aussi. Avec un de temps de 22''05, elle a établi le nouveau record suisse lors des demi-finales à Eugene.
La Bernoise n’a jamais été aussi rapide que ces dernières semaines. «Je suis dans la forme de ma vie», déclarait-elle à Blick avant les Championnats du monde aux Etats-Unis.
L’exploit des Mondiaux manque encore, même après cinq courses et une 5e place en finale du 100 m. Avec 10''91, elle est restée à 2 centièmes de son propre record suisse sur la ligne droite.
«Je pense que je peux courir en moins de 22 secondes»
Et même si elle a amélioré son record national du 200 m de plus d’un dixième à Eugene, ce n’est pas encore une progression flagrante. Avec exactement 2 mètres par seconde de vent arrière, elle a bénéficié de conditions parfaites: le temps n’est donc pas si éloigné de son précédent record de 22''18.
La championne du monde en salle de Belgrade sait qu’il est possible de faire mieux. Mais surtout, il faut aller encore plus vite si elle veut décrocher une médaille. «Je pense que je peux courir en moins de 22 secondes», a-t-elle déclaré à la SRF après avoir obtenu sa qualification pour la finale. «Mais je suis extrêmement contente. Je me suis sentie beaucoup mieux que lors des séries», a-t-elle souligné.
«C’est bon, je peux le faire encore une fois»
Reste la question de la concurrence. Et elle la suit de près. Septième des demi-finales, il ne lui manque qu’un dixième pour décrocher une médaille. Si l’athlète combine un saut de performance et une meilleure sortie de virage que lors des demi-finales, la dernière ligne droite pourrait bien l’emmener sur la troisième marche du podium.
«C’est bon, je peux le faire encore une fois», a déclaré Mujinga Kambundji en riant après sa demi-finale. Un temps en finale nettement inférieur à 22 secondes est possible, et donc une médaille – ce serait l’exploit ultime.
Mais attention: les adversaires sont de taille et risquent aussi de s’emballer. Les deux premières places devraient être réservées aux Jamaïcaines Sherricka Jackson et Shelly-Ann Fraser-Pryce, qui semblent nettement au-dessus du lot.
Un règlement jugé discriminatoire
La troisième place pourrait donc se jouer entre Elaine Thompson-Herah (Jam), Clark, Dina Asher-Smith (GB), Mujinga Kambundji et une nouvelle sur 200 m: Aminatou Seyni. L'athlète nigériane est une inconnue sur cette finale puisque elle a été bannie du 400 m, sa discipline favorite, pour des raisons médicales: elle est intersexuée. Son taux de testostérone est jugé trop élevé, selon l’IAAF. Depuis des changements dans le règlement en 2019, l’athlète a dû se rabattre sur le 200 m.
Le seul moyen pour retrouver sa discipline: prendre un traitement afin de réduire son niveau de testostérone. Un règlement largement controversé et jugé discriminatoire puisqu’il concerne uniquement les femmes qui présentent «des différences de développement sexuel». Il est notamment pointé du doigt par l'Association médicale mondiale et par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme. Les deux organisations demandent l'abrogation immédiate de la réglementation car elle viole l'éthique médicale.
Ces règles s’appliquent uniquement pour les distances de 400 m ou plus, pour éviter que les athlètes soient avantagées par un taux plus élevé d’hormone.
Pour les Suisses qui souhaitent voir la course, la finale sera diffusée sur la page sport de la RTS. L'émission commence dans la nuit de jeudi à vendredi, à 2h heure suisse. La finale du 200m dames est prévue à 4h35.