La chronique de Jacqueline de Quattro
Quel rôle doit jouer la Suisse dans le contexte géopolitique actuel?

Face aux menaces croissantes, la Suisse doit renforcer sa défense et sa coopération militaire. La conseillère nationale Jacqueline de Quattro appelle à une stratégie globale, incluant la cyberdéfense et une collaboration accrue avec l'OTAN.
Publié: 06.03.2025 à 14:34 heures
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Dernière mise à jour: 08.03.2025 à 09:03 heures
Avec les nombreux conflits qui éclatent dans le monde, la Suisse doit renforcer sa défense et sa coopération militaire.
Photo: DR
Jacqueline de Quattro, Vice-présidente PLR de la Commission de la politique de sécurité du Conseil national

Notre pays est neutre et doit le rester. Mais il ne peut pas se contenter de rester spectateur. La Suisse ne doit pas devenir un trou noir en matière de défense au milieu d’une Europe qui se réarme face aux menaces.

Nous devons prendre nos responsabilités et assurer notre propre défense. Rattraper 30 ans de retard dans les équipements et les infrastructures. Et collaborer avec nos voisins. La sécurité doit redevenir une priorité. Car la protection de sa population est le premier devoir d’un Etat de droit.

Un monde instable et violent

Depuis la guerre en Ukraine et l'embrasement du Proche-Orient, le monde est devenu moins sûr. De nouvelles alliances se tissent entre les Etats totalitaires, qui se montrent de plus en plus agressifs.

Le droit international est bafoué. Et depuis son retour à la Maison Blanche, Donald Trump bouscule toutes les certitudes, piétine les règles, brise d’un coup de poing les partenariats. Le président américain use et abuse de la loi du plus fort.

Dans ce contexte géopolitique instable, notre armée doit se préparer à tous les scénarios. La guerre hybride plane déjà sur la Suisse. Nous devons être capables de faire face à la fois au retour de la guerre conventionnelle qu’aux cyberattaques, à la désinformation ou aux manœuvres de déstabilisation. Car nos valeurs démocratiques sont attaquées. 

Une meilleure défense suisse

Notre pays doit disposer d’une véritable stratégie de défense globale. Le Conseil fédéral et le Parlement doivent collaborer plus étroitement avec les cantons pour renforcer, développer et moderniser nos capacités de défense dans tous les espaces d’opération. Nous devons investir davantage dans la cyberdéfense. Les cyberattaques progressent en moyenne de 30% par an et les dégâts sont énormes.

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Nous devons revoir nos priorités. Combattre les abus, les gaspillages, la bureaucratie
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Soyons clairs: nous ne disposons pas, à l’heure actuelle, de moyens suffisants pour garantir la défense de notre souveraineté et de notre indépendance. Nos chars datent des années 60, notre défense anti-aérienne n’est plus efficiente. Certes, une politique sécuritaire digne de ce nom représente un coût. Le Parlement l’a bien compris. Les dépenses de l'armée atteindront 1% du PIB en 2032. 

Une politique de sécurité efficace

Si la menace continue à monter, d’autres efforts supplémentaires pourront être nécessaires, car après trente années de coupes budgétaires au détriment de l’armée, les lacunes sont flagrantes. En compensation, les Chambres devront resserrer la vis dans d’autres domaines. Nous devons revoir nos priorités. Combattre les abus, les gaspillages, la bureaucratie. Mieux contrôler les dépenses. C’est ce que j’attends du nouveau ministre de la Défense. 

Une politique de sécurité efficace passe aussi par le développement de la coopération militaire. Il est exclu que la Suisse adhère à l’OTAN, même si elle participe déjà à des actions de maintien de la paix.

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La guerre ne doit pas nous faire oublier la menace terroriste
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Néanmoins, notre pays peut travailler de manière plus étroite avec l’Alliance atlantique dans le cadre de l’interopérabilité des forces armée: exercices militaires en commun, reprise des normes et procédures. Nous n’avons pas, par exemple, d’infrastructures pour nous exercer en milieu urbain alors que cette possibilité existe sur les places d’exercice de nos partenaires.

Le temps presse!

La guerre ne doit pas nous faire oublier la menace terroriste. Les récents attentats de Munich et de Villach en Autriche et à Mulhouse, à quelques km de la Suisse, démontrent que nous devons plus que jamais rester vigilants. D’où l’importance de rétablir la confiance dans nos Services de renseignements, qui sont nos yeux et nos oreilles.

Leur accorder plus de collaborateurs et de moyens, car leurs services sont de plus en plus demandés. Il est tout de même aberrant que ce service stratégique ait moins d’effectifs que la police municipale de Lausanne alors que ses missions explosent!

Le temps presse. Nous devons trouver rapidement notre place dans cette nouvelle architecture sécuritaire européenne. Prendre les options stratégiques qui s’imposent. Car nous ne pourrons pas toujours compter sur les autres.

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